Publié le 13 Jul 2020 - 16:23
CRISE AU GRANDS MOULINS DE DAKAR

La réintégration des cinq employés licenciés exigée  

 

Les travailleurs des Grands Moulins de Dakar dénoncent le ‘’licenciement abusif’’ de cinq de leurs camarades. Ces derniers sont renvoyés pour avoir exposé, dans un groupe WhatsApp, les problèmes auxquels ils sont confrontés au sein de l’entreprise.

 

Les travailleurs des Grands Moulins de Dakar (GMD) montent à nouveau au créneau, pour exiger la réintégration ‘’immédiate et sans condition’’ de cinq de leur camarades travailleurs limogés.  En effet, depuis le 5 juin, leur directeur général adjoint, Franck Bavard, et le directeur des ressources humaines, Pape Abdoulaye Djigal, avaient pris la décision de licencier huit délégués du personnel et cinq travailleurs simples, sur la base de propos qu’ils auraient tenus dans un groupe whatsApp. L’Inspection générale du travail et de la sécurité sociale a rejeté la demande d’autorisation de licenciement des délégués, ayant jugé ‘’sans fondement juridique’’ les motifs évoqués.

Ainsi, le fait que les travailleurs ‘’simples’’ soient renvoyés et non les délégués du personnel, alors qu’il s’agit des mêmes motifs, est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. ‘’En dépit de toute la médiation du Haut conseil du dialogue social et de nombreuses familles religieuses du pays, la direction générale refuse catégoriquement de revenir sur sa décision de licencier les cinq travailleurs simples’’, a regretté Lamine Sall, Secrétaire général de la CNTS, par ailleurs représentant de l’Intersyndicale des travailleurs des Grands Moulins de Dakar.

Il était en conférence de presse ce weekend, pour faire le point de la crise aux GMD. ‘’Cette année, compte tenu de la Covid-19, puisque les travailleurs ne peuvent pas se réunir, ils ont jugé nécessaire de créer un groupe whatsApp dans lequel ils ont communiqué leurs problèmes.  C’est à partir de ce moment qu’il a dit qu’il les licencie pour avoir participé aux discussions du groupe. Le droit à l’expression, qui est un droit fondamental, c’est ce droit qu’il leur refuse’’, a-t-il expliqué. Après avoir ‘’épuisé toutes les médiations’’, les travailleurs des GMD comptent user d’autres moyens. Ils ont décidé de faire face, de tenir le temps qu’il faudra ‘’pour qu’enfin les autorités des Grands Moulins de Dakar comprennent qu’ils ne sont pas en territoire conquis’’.

Ils ont ainsi annoncé le dépôt d’un préavis de grève pour la semaine prochaine, même si leur avocat, Maitre Assane Dioma Ndiaye, a introduit la requête au niveau du tribunal du travail. C’est la grève du Sytjust (Syndicat des travailleurs de la justice) qui a retardé la convocation du tribunal.

Par ailleurs, ils n’ont pas manqué l’occasion d’évoquer les autres problèmes auxquels ils sont confrontés depuis belle lurette. Ils ont dénoncé avec fermeté ‘’les agissements’’ de Franck Bavard et de Pape Abdoulaye Djigal.  Ces derniers, selon Lamine Sall,  ‘’sont plus que décidés à réduire à néant la dignité des travailleurs des GMD’’. Et que leurs actions sont ‘’motivées par des intérêts crypto-personnels qui ne visent qu’à nous réduire au silence’’. D’après M. Sall, ‘’Franck Bavard a toujours opprimé les travailleurs’’ en leur interdisant de se retrouver même en assemblée générale dans l’entreprise, et ça depuis des années. ‘’Les Grands Moulins de Dakar ont été créés, il y a plus de 66 ans, par la famille Mimran et toutes les directions qui se sont succédé ont su laisser leur empreinte et marquer l’histoire par des acquis sociaux qui ont placé les Grands Moulins de Dakar dans le peloton de tête des entreprises référenciées dans le domaine social’’, a-t-il rappelé.  ‘’Mais ce climat social apaisé n’a   cessé de se détériorer depuis l’arrivée, en 2013, du DRH. Et avec l’arrivée du DGA Franck Bavard, en 2014, les choses n’ont pas cessé d’empirer’’, a-t-il poursuivi.

Entre 2013 et 2020, les travailleurs des GMD ont noté ‘’plus de 165 suppressions de poste de travail’’. Ils ont aussi dénoncé les suppressions des acquis sociaux : prêt habitat social, un car pour les cérémonies familiales, colonies de vacances, caisse de solidarité, subventions accordées aux ‘dahiras’ et aux amicales. ‘’La presque totalité des acquis sociaux a été remise en cause, mêmes le lait liquide qui était distribué aux ouvriers, est remplacé par des sachets des laits en poudre dans le seule but d’en diminuer le coût’’, fulminent les travailleurs des GMD.

Qui ajoutent : ‘’Le comble, c’est une gestion calamiteuse de notre IPM qui nous imposait un remboursement fictif d’un déficit qui n’a jamais été sous-tendu par des états financiers validés par un conseil d’administration. D’ailleurs, ce dossier sera déposé devant le tribunal pénal dans les prochains jours.’’ En ce qui concerne le projet dit ‘’Diamniadio’’ -des terrains que Mimran avait promis aux travailleurs - il a été, selon ces derniers, ‘’un moyen, pour le DGA, de les diviser et de créer un climat invivable au sein de l’entreprise, depuis 6 ans, et jusqu’à ce jour, aucun lopin de terrain n’a été distribué’’. En dépit de tout cela, les travailleurs des GMD relèvent ‘’une gestion frauduleuse qui s’est érigée en règle et qui fait perdre à l’entreprise énormément d’argent, des centaines de millions sont régulièrement déclarés volés sans suite’’.

Selon eux, cette situation a permis au groupe Mimran de vendre l’entreprise au groupe See Board. ‘’Mais le plus dur et le plus triste dans l’histoire est qu’ils n’ont pas voulu nous recevoir pour un au revoir, après plus de 63 ans de compagnonnage. Les repreneurs, un groupe américain, restent sur cette lancée, parce que depuis leur arrivée en 2018, nous cherchons désespérément à les rencontrer, mais en vain’’, regrettent-ils.

Avant de conclure : ‘’Nous avons décidé de faire changer les choses. Parce que nous n’accepterons plus d’être réduits à de simples exécutants. Nous sommes la force de travail dans l’entreprise et c’est nous qui produisons les richesses.’’

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