Publié le 19 Feb 2024 - 13:30
DÉCOUVERTE - BASILIQUE DE YAMOUSSOUKRO

Notre-Dame-de-la-Paix, la majestueuse

 

Pur chef-d’œuvre architectural, la basilique Notre-Dame de la Paix fait la fierté de Yamoussoukro, la capitale politique de la Côte d’Ivoire. Du haut de ses 158 m, sa coupole de 90 m de diamètre et de 60 m de hauteur et bâtie sur une surface de 130 ha, elle est le plus haut et le plus grand édifice religieux catholique  au monde.

 

Sous la chaleur infernale en ce début d’après-midi, le soleil se trouve à son zénith, à Yamoussoukro. Depuis le grand boulevard de la route menant vers Daloa (centre-ouest de la Côte d'Ivoire), on ne peut s’empêcher d’admirer, prendre une photo de cette immense et impressionnante œuvre architecturale. Il s’agit de la majestueuse basilique Notre-Dame de la Paix, se dressant sur une vaste étendue bordée de cocotiers. L’édifice, visible à n’importe quel point de la capitale politique de la Côte d’Ivoire, est l’un des endroits les plus visités de Yamoussoukro. Entre 100 et 200 personnes en moyenne, les moments creux, le nombre de visiteurs peut atteindre 1 000 par jour, durant les périodes de vacances ou les congés de Noël.

Il est 12 h 13. À l’entrée secondaire de l’édifice sont affichés les tarifs des tickets de visite, qui varient selon la nationalité du visiteur. Pour les nationaux, c’est 500 F CFA pour les enfants, les étudiants et les corps habillés, et 1 000 F CFA pour les adultes. Concernant les étrangers, il faudra débourser la somme de 2 000 F CFA pour une visite guidée. En plus du ticket d’entrée, les visiteurs munis d’une caméra ou d’un appareil photo doivent payer 5 000 F CFA pour avoir le droit de l’utiliser dans l’enceinte.

À l’intérieur de l’église, un groupe de visiteurs est déjà pris en charge par un guide. Scotchés aux explications de ce dernier, ils ont les yeux de Chimène pour ce chef-d’œuvre de l’architecte libano-ivoirien Pierre Fakhoury, qui ‘’s’est inspiré de la Bible, notamment l’Apocalypse 4 (chapitre 4 du livre de l’Apocalypse, NDLR) de Saint-Jean’’’, selon notre guide Marlène Angoua. La basilique Notre-Dame de la Paix est entourée de 24 vitraux représentant les 24 vieillards de l’Apocalypse tout autour du trône du Christ. Cela représente 7 400 m2 qui en font la plus grande surface de vitraux au monde.

Depuis l’entrée principale, notre attention est attirée par ce baldaquin géant qui surplombe l’autel en marbre de la basilique. Il est soutenu par quatre colonnes de 28 m qui sont en laiton et en bronze, et équipées de haut-parleurs. Au centre du baldaquin pend un lustre en verre qui éclaire l’autel. Et juste en dessous, est suspendue une croix de 50 kg et 2,5 m de long, qui surmonte l’autel. Elle est supportée par deux fils en acier inoxydable d’une capacité de charge de 250 kg.

Un héritage d'Houphouët-Boigny le bâtisseur

Au lendemain des indépendances, la Côte d’Ivoire connaît une période de paix et de prospérité. Pendant une vingtaine d’années, ce pays de l’Afrique de l’Ouest enregistre une forte croissance tirée par les exportations de matières premières agricoles (cacao, café, etc.) et une stabilité politique. Dans sa générosité, Félix Houphouët-Boigny, premier président de la République de Côte d’Ivoire, a décidé de déplacer la capitale du pays, Abidjan, à Yamoussoukro, son village natal. Pour rendre grâce à Dieu pour les grâces en faveur de son pays, Houphouët a eu l’idée de bâtir une basilique dans cette contrée.

‘’Cette basilique, explique Marlène, c’est l’œuvre du président Félix Houphouët-Boigny. Il l’a conçue comme trait d’union entre la terre des hommes et le ciel pour remercier Dieu pour la paix en Côte d’Ivoire, qu’il a qualifiée de grâce particulière. Car, depuis l’indépendance de la Côte d’Ivoire (7 août 1960) jusque dans les années 1980, il y avait la paix, mais aussi la prospérité. Durant cette même période, on parlait du miracle ivoirien. C’est pour cette raison qu’il a voulu construire cette basilique pour dire merci à Dieu’’.

Pour abriter cet édifice, le président a fait don de son champ de cocotiers et d’ananas, sur une superficie de 150 ha. Il ne restait plus qu’à réaliser le plan de ce gros bâtiment. C’est le plan de l’architecte ivoiro-libanais Pierre Fakhoury qui a retenu l’attention d’Houphouët. Les travaux ont duré trois ans, entre 1986 et 1889, et ont mobilisé 1 500 ouvriers travaillant jour et nuit. La basilique Notre-Dame de la Paix s’élève sur 158 m, la plus haute de toutes les basiliques du monde. Son dôme bleu ciel, le plus grand au monde, de 90 m de diamètre et de 60 m de hauteur, est surmonté d’une croix en or massif. Au fond de cette coupole, on aperçoit l’image de la colombe qui s’étend sur sept mètres de long.

La basilique peut accueillir jusqu’à 200 000 fidèles, 7 000 places pour les bancs à l’intérieur et 11 000 personnes debout. Durant les grandes célébrations, des chaises peuvent être installées dans les allées et derrière les colonnes. Ce qui fait un total de 18 000 places à l’intérieur. Et le parvis couvert, qui fait le tour de l’église, peut accueillir jusqu’à 30 000 fidèles debout. Il y a l’esplanade à trois niveaux qui peut recevoir 150 000 fidèles.

À la fin des travaux, le président a fait don de ce lieu de culte au Vatican. Il a également déposé un fonds servant à son entretien. Notre-Dame-de-la-Paix a été consacrée par le Pape Jean-Paul II en personne, le 10 septembre 1990.

Pourtant, le projet de construction de la basilique à Yamoussoukro n’a pas toujours obtenu l’approbation du Vatican, prétextant que celle-ci ne devrait pas être plus grande que la basilique Saint-Pierre de Rome.

Officiellement, le coût de ce joyau architectural n’a pas été dévoilé. ‘’Le président a construit cette basilique sur fonds propres. Il n’a pas donné le coût de l’ouvrage. Selon lui, ce que la main droite donne, que la main gauche ne le sache pas (tiré de l’Évangile de Saint Matthieu, NDLR)’’, a expliqué Mme Angoua. Mais d’après les estimations, il s’élèverait à 40 milliards de francs CFA. Ce montant faramineux aurait créé la polémique, car certains ne concevaient pas le fait qu’on puisse autant investir dans un édifice religieux alors que les catholiques ne représentaient que 22 % de la population ivoirienne.

Symbole de l’hospitalité ivoirienne

La Can-2023 a été placée sous le signe de l’hospitalité dont se réclament les Ivoiriens. D’où le surnom de ‘’Can de l’hospitalité’’. Le ‘’Akwaba’’, signifiant bienvenue et provenant des groupes ethniques agni et baoulé de Côte d’Ivoire, est bien matérialisé à la basilique Notre-Dame de la Paix. En franchissant le portail de la clôture du domaine, le visiteur parcourt une allée d’un kilomètre bordée par un jardin de 37 ha, avec plus de 40  000 espèces de fleurs, aux bons soins de 43 jardiniers. Au bout de cette promenade fascinante se dressent deux bâtiments (comprenant quatre chapelles dédiées aux quatre évangélistes Matthieu, Marc, Luc et Jean) en forme d’arc délimitant l’esplanade et ‘’imitant le signe du Akwaba’’. À l’entrée de l’église également, le fidèle est accueilli ‘’à bras ouverts’’ par l’image de la Vierge Marie Notre-Dame de la Paix à qui la basilique est dédiée.

Cet immense édifice en plein cœur du pays baoulé ne saurait tenir sans ses nombreuses et énormes colonnes qui la soutiennent. Elles sont au nombre de 368 au total de l’extérieur à l’intérieur. À l’intérieur, la basilique contient 60 colonnes dont 48, hautes de 21 m et d'un diamètre de 2,40 m, supportent son poids central estimé à 98 000 t. Elles sont fixées à une profondeur de 30 m. Les douze autres colonnes creuses symbolisent les 12 apôtres de Jésus. Quatre d’entre elles renferment les ascenseurs, six des escaliers et deux des gaines techniques pour alimenter le niveau supérieur.

L’ombre d’Houphouët plane sur Notre-Dame de la Paix

En plus d’être gigantesque, la basilique de Yamoussoukro est conçue de façon à s’assurer que les fidèles puissent confortablement suivre la messe. Les dossiers de couleur rouge des 7 000 sièges de l’édifice, en bois local appelé kotibé, disposent tous d’un revêtement absorbant. Il s’agit d’un ensemble acoustique qui tempère la résonance. De plus, les sièges diffusent un système de climatisation. Et par souci d’économie d’énergie, la climatisation est sectorielle. Elle peut donc être activée seulement dans les compartiments occupés. Pour maintenir cette fraîcheur dans l’église quand les 22 portes de deux tonnes chacune sont ouvertes, des grilles au sol, en forme circulaire, s'échappe une pression d’air qui sert de barrière entre la chaleur du dehors et l’air frais de la climatisation.

Ce mastodonte de la capitale politique et administrative de la Côte d’Ivoire ne déroge pas à la tradition des bâtisseurs de basiliques. Ainsi, sur l'un des vitraux retraçant l'entrée triomphale du Christ à Jérusalem, Houphouët-Boigny est représenté au premier rang, mains jointes aux pieds de Jésus comme un ‘’treizième apôtre’’. Sur le côté, à l’extrême gauche, on a l’image de l’architecte Pierre Fakhoury. L’ombre du président Félix Houphouët-Boigny plane ainsi sur la basilique. Sur l'une des rangées situées non loin de l'autel se situe le siège sur lequel il s'asseyait pour assister à la messe. Depuis sa mort en 1993, son nom est gravé sur une plaque dorée fixée sur le dossier de ce siège.

Depuis trente-cinq ans, la basilique Notre-Dame de la Paix est gouvernée par les prêtres de la congrégation des Pallottins, sous la direction d’un père-recteur. En janvier 2017, le père Franck Allatin est devenu le premier recteur ivoirien de la basilique.

LOUIS GEORGES DIATTA (Envoyé spécial à Yamoussoukro, de retour)

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