Publié le 23 Jun 2020 - 21:12
DECES BADARA MAMAYA SENE

L’arbitrage sénégalais perd sa racine  

 

Badara Mamaya Sène, élément incontournable de l’arbitrage du football sénégalais, a rendu l’âme, hier. L’ex-arbitre international était aussi remarqué sur la scène politique avec ses fonctions de maire de la ville de Rufisque et membre du Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT).

 

Les arbitres de football sénégalais ont perdu un élément clé, avec le rappel à Dieu de Badara Mamaya Sène. Le natif de la ville de Rufisque a consacré toute sa vie à l’arbitrage. Il a d’abord officié comme juge central au plan national, puis au niveau continental, grâce à son rang d’arbitre international. Le fait marquant de la carrière de Badara Mamaya Sène était sa désignation, par la Commission des arbitres de la Confédération africaine de football (Caf) pour diriger la finale de la Coupe d’Afrique des nations Sénégal-1992, opposant le Ghana à la Côte d’Ivoire, au stade de l’Amitié de Dakar (actuel Léopold Sédar Senghor). Le choix de la Caf porté sur M. Sène était historique, parce qu’il venait d’être le premier Sénégalais à siffler une finale de Can.

Après sa retraite des pelouses, le juge central a rangé le sifflé certes, mais il n’a pas pour autant abandonner sa passion. Le Rufisquois s’est reconverti en inspecteur d’arbitre pour assurer la formation des jeunes passionnés du sifflet au niveau de la Commission régionale des arbitres (Cra) de Dakar. L’ex-maire de la ville de Rufisque (2009-2014) réussira alors son pari avec le grand plaisir de voir ses deux poulains, Falla Ndoye et Badara Diatta, suivre ses pas. Ces deux juges centraux ont officié chacun une finale de Can. Le premier a dirigé le dernier match de la Can Tunisie-2004, entre la Tunisie et le Maroc, après avoir pris part à la Coupe du monde 2002. Le second, pour sa part, a sifflé l’acte final de la grand-messe du football africain de 2017, opposant la Zambie à la Côte d’Ivoire. L’ex-édile de Rufisque a aussi formé et encadré les arbitres internationaux de la nouvelle génération : Malang Diédhiou, Djibril Camara et El Hadj Malick Samba.

Ces derniers ont, pendant cinq années, constitué un trio international et pris part à des compétitions internationales (Coupe du monde Russie-2018, les Can 2015 et 2017, Jeux olympiques Rio-2016) sous ses ordres. L’ancien arbitre, devenu inspecteur, a ensuite intégré la commission des arbitres sous le magistère du Camerounais Issa Ayatou. Il remplacera d’ailleurs le Tunisien Tareck Bouchemaoui à la tête de la Commission des arbitres africains en 2017.

Badara Mamaya Sène ne s’activait pas uniquement dans le sport. L’ancien membre de la Commission des arbitres de la Fédération internationale de football associations (Fifa) a été également un acteur politique. Il a créé d’abord son parti politique, l’Alliance pour la République et la citoyenneté (Arc), puis a pris part aux élections locales (2009) de sa ville natale et enfin remporté le vote du conseil municipal devant le maire sortant d’alors, Ndiawar Touré. Mamaya, comme l’appelaient affectueusement ses proches, a dirigé la mairie de Rufisque pendant cinq ans (2009-2014), mais il a perdu le contrôle de la ville lors dernières élections locales. Il a, par la suite, soutenu le président de la République Macky Sall et intégré le Haut conseil des collectivités territoriales. Le HCCT est le dernier poste politique qu’il a occupé jusqu’à son dernier souffle.

MALANG DIEDHIOU, Inspecteur Caf 

‘’Mamaya était un visionnaire’’

‘’Badara Mamaya Sène était un monument de l’arbitrage sénégalais, au même titre qu’Amadou François Guèye, rappelé à Dieu en mars dernier. Donc, nous avons perdu deux références. Mamaya a été le premier arbitre sénégalais à diriger une finale de Coupe d’Afrique des nations.  Il a été aussi le premier arbitre sénégalais à être dans les instances de décisions, c’est-à-dire la Commission centrale de la Caf et de la Fifa. Il était chargé de proposer les arbitres à la liste de la Fifa, mais je dis qu’il le faisait objectivement, notamment dans la désignation des arbitres dans les grandes compétitions que sont la Can et le Mondial.

Après nous avoir proposés sur la liste des arbitres internationaux de football (avec Djibril Camara et El Hadj Malick Samba), il a suivi notre cursus à la Caf jusqu’à notre désignation à la Coupe du monde de 2018. Il nous a constitués en trio en 2014 et nous mettait toujours ensemble dans le championnat local. Je dis que cela a facilité notre succès. Mamaya était un visionnaire, parce qu’il voyait les choses arriver. 

C’est pourquoi il mettait les arbitres sénégalais sous pression pour l’atteinte des résultats excellents dans le long terme. Il est aussi sociable et humble. A notre retour de la Coupe du monde 2018, il a organisé l’accueil populaire à l’aéroport pour le trio. Il avait aussi organisé un ‘’sargal’’ (fête d’honneur) pour nous. Il a été au service de l’arbitrage jusqu’à son dernier souffle, puisqu’il était jusqu’hier (avant-hier, NDLR) le président de l’Association nationale des arbitres de football. Je suis reconnaissant de tous ses efforts qu’il a consentis pour l’arbitrage sénégalais. Je pris pour le repos de son âme.’’   


DJIBRIL CAMARA, ARBITRE ASSISTANT INTERNATIONAL 

‘’Il a fait de moi un arbitre d’élite’’

‘’Je connaissais bien l’homme, pour l’avoir côtoyé en tant que jeune arbitre. Il a été un bon dirigeant et un leader exemplaire. Au-delà d’être ma référence, Badara était également un père pour moi. Sa disparition est une grande perte pour nous arbitres sénégalais, mais aussi pour nos collègues de la Caf et de la Fifa. Il a fait de moi un arbitre international d’élite de la Caf et de la Fifa. Il a été le guide et la référence des arbitres sénégalais. Je prie pour que le bon Dieu lui rétribue ses bonnes œuvres et l’accueille au paradis.’’      

OUMAR BAYO BA  

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