Publié le 22 Feb 2020 - 10:27
DEMATERIALISATION DES PROCEDURES DE CONTENTIEUX COMMERCIAL

La Justice joue la carte de la transparence

 

Le ministère de la Justice veut améliorer davantage le cadre de travail du Tribunal de commerce hors classe de Dakar.  À cet effet, il a lancé, hier, une plateforme de dématérialisation des procédures qui a comme ambition de renforcer la transparence des décisions de justice et de booster le climat des affaires.

 

Le ministère de la Justice, en partenariat avec l’Apix, a doté le Tribunal de commerce hors classe de Dakar (TCHCD) d’une plateforme de gestion du système d’information judiciaire. Il s’agit d’une plateforme de dématérialisation des procédures qui a été présentée, hier, aux avocats et huissiers de justice devant l’utiliser pour la simplification de leur travail. A en croire la secrétaire générale dudit ministère, la mise en service de cette plateforme s’inscrit dans une politique de réforme de la justice commerciale entamée par le gouvernement, depuis quelques années.

‘’Le Sénégal a engagé d’importantes réformes pour parvenir à une justice commerciale plus transparente, plus sûre et plus fiable. La réforme la plus marquante est l’adoption de la loi portant création, organisation et fonctionnement des tribunaux de commerce et des chambres commerciales d’appel et l’installation du tribunal de commerce hors classe de Dakar au mois de février 2018. L’autre grande évolution est que, maintenant, les procédures vont être dématérialisées’’, a expliqué Aïcha Gassama Tall.   

La dématérialisation vient compléter cette série de réformes pour rendre plus simple, grâce au numérique, les procédures judiciaires concernant les contentieux commerciaux. ‘’Avec cette plateforme, il est possible, maintenant, depuis l’enrôlement jusqu’à la délivrance des décisions, de tout faire en ligne. Les avocats et les huissiers peuvent, à partir de leur bureau, faire les assignations, déposer leurs requêtes, recevoir des notifications et faire des communications en ligne pour obtenir les décisions de justice, consulter la jurisprudence et la législation. C’est donc une grande avancée qui permet d’avoir une justice beaucoup plus sûre, plus rapide et dans des conditions meilleures’’, a-t-elle ajouté.

Cette plateforme a été bien accueillie par les avocats et les huissiers de justice qui espèrent pouvoir simplifier leur travail, grâce à son utilisation. ‘’Cette plateforme est importante, à partir du moment où l’avocat peut, à partir de son bureau, faire une procédure, saisir le tribunal, déposer une assignation, conclure et développer son argumentation et obtenir du tribunal qu’une décision soit rendue et lui soit délivrée sans qu’il n’ait bougé de son cabinet. Cela est une avancée très importante dans le développement des affaires’’, s’est réjoui Me Laïty Ndiaye, Bâtonnier de l’Ordre des avocats.

  Impact sur le climat des affaires

La plateforme de dématérialisation des procédures a été mise en place, non seulement, pour simplifier le travail des juges et avocats intervenant au tribunal de commerce de Dakar, mais elle vise aussi le renforcement du climat des affaires. L’objectif, dans ce sens, est de faire gagner au Sénégal des points dans le prochain classement du Doing Business. ‘’En 2018, le Sénégal était à la 141e place au classement du Doing Business et en 2020, on est arrivé à la 123e place avec un score qui est passé, en 2018, de 53,73 % environ à 59 % en 2020. Ce qui a donné un bond de 5 points en 2 ans. Cela est déjà important. Maintenant, avec la procédure dématérialisée et sa fonctionnalité, c’est sûr qu’on va gagner au moins 5 points pour 2021’’, estime Mme Tall. 

Le secrétaire général de l’Apix est aussi de cet avis. En tant que facilitateur du projet, l’Apix espère, grâce à la dématérialisation, permettre au Sénégal d’effectuer un bond de 5 points dans le prochain classement du Doing Business, pour attirer davantage les investisseurs nationaux comme étrangers. ‘’Nous avons pour obligation de mettre un système fiable pour permettre au Sénégal d’avancer. Cette plateforme s’inscrit dans ce cadre et si elle est bien utilisée, elle va permettre au Sénégal de faire un grand bond dans le monde des affaires. Les avantages qu’on en tire sont multiples. Elle permet de diminuer l’utilisation du papier, d’économiser le temps et l’énergie pour les utilisateurs et faciliter l’archivage qui est un problème très sérieux au niveau du Sénégal. Rien que sa mise en service permettra à notre pays de gagner 6,5 points dans le classement du Doing Business 2021’’, a indiqué le SG de l’Apix, Oumar Sarr.  

11 054 DECISIONS RENDUES, UN CONTENTIEUX GENERAL DE PLUS 245 MILLIARDS FCFA…

Les chiffres du Tribunal de commerce hors classe de Dakar

Créé en 2017 pour améliorer le climat des affaires, le Tribunal de commerce hors classe de Dakar (TCHCD) a commencé à fonctionner en février 2018, avec l’installation de la chambre commerciale. Ce tribunal est dédié aux activités commerciales avec l’intervention de juges consulaires qui ont un délai de traitement de 3 mois pour juger avec une conciliation obligatoire.

Ainsi, deux ans après ses premiers procès, le président du TCHCD a dressé, hier, à l’occasion du lancement de sa plateforme de dématérialisation des procédures, un bilan satisfaisant de l’institution.

En effet, selon le juge Alioune Ndiaye, les résultats, après deux ans de fonctionnement, sont ‘’parlants’’.  ‘’Nous avons enregistré 11 450 affaires inscrites au rôle, 11 054 décisions rendues et 3 035 jugements. Le contentieux général est de plus 245 milliards de francs CFA dont plus de 150 milliards pour le contentieux bancaire’’, a-t-il dévoilé.

Cependant, malgré ce bilan ‘’satisfaisant’’, le président du tribunal a regretté l’insuffisance des ressources humaines de son institution, pour diligenter les décisions.  ‘’Depuis un an, on n’a que six magistrats avec des juges consulaires qu’on a augmentés. Mais ce sont les magistrats qui rédigent les décisions de justice. Nous sommes en nombre insuffisant, même si on nous impose des délais’’, a-t- déploré.  

Ce manque de personnel a aussi été déploré par le représentant du barreau qui a interpelé le gouvernement pour qu’il mette plus de moyens humains au tribunal de commerce. ‘’Il faut dire que cet impératif de célérité qui conduit à ce que les affaires doivent aller très vite et qui nécessite des procédures dématérialisées, doit être concilié à un impératif de sérénité, parce que la justice doit être réfléchie. C’est pourquoi nous disons qu’on doit poser la problématique de la qualité des décisions rendues.  On nous dit, assez souvent, dans ce foirail, qu’il faut juger vite et bien. On nous explique très souvent ce que c’est juger vite et on ne nous explique que très rarement ce que c’est juger bien’’, a regretté Me Laïty Ndiaye.

ABBA BA

 

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