Publié le 5 Jan 2018 - 13:37
DETOURNEMENT PRESUME A LA JEANNE D’ARC DE DAKAR

Momar Ndiaye et Abdou Dieng risquent la prison et le mandat de dépôt 

 

Le parquet a requis, hier, des peines de 3 ans et 2 ans ferme, respectivement contre Momar Ndiaye, ancien président de la Jeanne d’Arc, et le comptable Abdou Dieng. Le premier est poursuivi pour abus de confiance et le second pour complicité d’abus de confiance. Le parquet a également requis des amendes et des mandats de dépôt contre les prévenus.

 

Suspendu le 21 décembre dernier après l’interrogatoire d’audience, le procès du détournement présumé à la Jeanne d’Arc de Dakar s’est poursuivi hier, à la barre du tribunal correctionnel de Dakar. Le parquet a requis 3 ans ferme contre Momar Ndiaye poursuivi pour abus de confiance. Son présumé complice, Abdou Dieng, encourt 2 ans ferme. Le substitut Aly Ciré Ndiaye a demandé que les prévenus soient condamnés à payer chacun une amende de 300 000 F Cfa. Il a également requis le mandat de dépôt contre les prévenus, car ceux-ci ont  comparu libre du fait qu’ils ont été mis en liberté provisoire, après six mois de détention préventive.

Les prévenus ont été arrêtés suite à la plainte de Moussa Yoro Camara. Ce dernier les accuse d’avoir dilapidé l’argent issu de la vente d’un terrain de 20 043 m² situé à Sotrac Mermoz. A l’en croire, c’est Momar Ndiaye lui-même qui le lui avait cédé en juillet 2008. D’après le plaignant, c’est un bureau de 15 membres qui a ordonné la vente du terrain. Or, seule l’assemblée générale est habilitée à prendre une telle décision.

Par conséquent, le mandat donné à Momar Ndiaye n’est pas valable. Pour la transaction, M. Camara a allégué que la société de promotion immobilière Benja Sa a versé à la Ja, via le notaire Me Moussa Mbacké, la somme de 1,392 milliard de francs Cfa. Ainsi, Momar Ndiaye, en sa qualité de président de la Ja, a reçu, pour le compte du club, la somme de 1,061 milliard de francs Cfa. Un peu plus de 142 millions de francs Cfa ont été versés dans les caisses de l’État, représentant la taxe de la plus-value foncière. Tandis que 80 millions de francs Cfa ont été dépensés pour transformer le bail en titre foncier. Les comptes de la Ja étant fermés, toutes les sommes ont été, d’après les plaignants, versées au président d’alors qui a récupéré les chèques avec ses collaborateurs.

Devant les enquêteurs et à la barre du tribunal, les prévenus se sont justifiés par rapport à l’utilisation de l’argent. D’après l’ex-comptable, le club devait beaucoup d’argent à Momar Ndiaye qui, a-t-il argué, en a profité pour se faire rembourser. D’autre part, M. Dieng a indiqué que l’argent a aussi servi à payer les salaires des joueurs, de l’encadrement technique et du personnel administratif du club. Ayant retiré 20 millions et 13 millions de francs Cfa du prix de vente du terrain, le prévenu a déclaré avoir agi sur ordre du président, seul ordonnateur des dépenses. Quant à Momar Ndiaye, il a soutenu avoir dépensé l’argent pour les besoins du club, de 2005 à 2008.

Mais pour le conseil de la partie civile, il n’existe pas de pièces justificatives pour étayer ces dépenses alléguées. Me Guèye a aussi réfuté les affirmations des prévenus selon lesquelles la direction précédente avait laissé des créances, car il n’y avait aucun manquant. ‘’Il a géré de façon personnelle en logeant les fonds du club dans son propre compte. Il a reçu 1,4 milliard et il n'a pas pu justifier les 8 433 000 F Cfa’’, a conclu le jeune avocat.

Son confrère, Me Gorgui Guèye, s’est mis à faire le bilan de Momar Ndiaye, élu, dit-il, ‘’à la tête de la Ja en 2005, au bout d'une campagne de dénigrement contre Oumar Seck’’. ‘’Il n'avait pas de quitus pour faire les dépenses. Il a planifié la mort de la Ja qui est descendu au sous-sol. Au-delà des sommes détournées, les supporters ont souffert, car il a organisé un pillage, alors qu'on lui avait confié une mission’’, a martelé la robe noire. Me Khassimou Touré a abondé dans le même sens, non sans relever ‘’les variations’’ de Momar Ndiaye durant la procédure. ‘’A la gendarmerie, il avait dit qu’il avait un contrat de mandat et que les justificatifs se trouvaient dans sa valise volée par son chauffeur qui l’a ensuite vendue à des membres de la Ja’’, a renseigné Me Touré. A l’en croire, la surfacturation a été la ligne de défense de M. Ndiaye qu’il accuse d’avoir fait ‘’un festin d'hyène’’ avec la complicité d’Abdou Dieng qui lui a apporté aide et assistance. Pour le préjudice, Me Touré a réclamé la somme de 1,5 milliards de francs Cfa.

Une telle demande ne peut prospérer, aux yeux de Me Aly Fall qui a évoqué l’irrecevabilité de la constitution de partie civile des plaignants. ‘’Ils veulent s'enrichir sans cause, car ils n'ont subi aucun préjudice et n’ont pas de qualité à agir. Seul le président de la Ja peut ester en justice, or il avait bien donné un quitus à Momar Ndiaye’’, a déclaré Me Fall. Selon son argumentaire, la partie civile n'a même pas accès au dossier et la Ja, qui devrait subi un préjudice, n'a pas porté plainte. ‘’C'est une affaire affligeante de règlement de comptes’’, a conclut Me Fall.

‘’Lorsqu'un grand plaideur parle de Dieu, c'est parce qu'il a fait une mauvaise procédure’’

Son confrère, Me Abdou Dialy Kane, s’est attaqué à Me Khassimou Touré qui a beaucoup invoqué Dieu durant sa plaidoirie. ‘’Nous ne sommes pas au clairon du jugement dernier, mais devant le tribunal des hommes. Lorsqu'un grand plaideur parle de Dieu, c'est parce qu'il a fait une mauvaise procédure’’, a raillé la robe noire. Lui aussi est convaincu que l'action civile est irrecevable en faveur de M. Camara et Cie. ‘’Vous leur donnez le patrimoine de la Ja, ils le mettront dans leur poche. Or la Ja estime que Momar Ndiaye a bien tenu les comptes en lui délivrant un quitus’’, a poursuivi le conseil. Mieux, il a ajouté que le 8 mai dernier, le club de la Vieille Dame a payé une dette à l’ex-président. Concernant Abdou Dieng, il a soutenu que le seul fait que ce dernier soit impliqué dans les deux chèques de 13 millions et 20 millions de francs Cfa ne signifie pas qu'il est complice, surtout que l’infraction principale n'existe pas, au vu du quitus.

Délibéré le 17 février prochain. 

FATOU SY

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