Publié le 23 Sep 2020 - 20:47
DROITS CIVILS DE KARIM WADE

Ses avocats annoncent la fin de sa suspension de vote 

 

 
Karim Wade a recouvré ses droits civils, selon ses avocats qui évoquent le Code électoral.  Ses partisans jubilent et concoctent un retour triomphal.
 
 
Le Parti démocratique sénégalais (PDS) tient, coûte que coûte, à se remettre en marche. Après l’annonce de la reprise de ses activités, vendredi dernier, les partisans d’Abdoulaye Wade se projettent vers les prochaines échéances électorales.  
 
Hier, le collectif des avocats de Karim Wade a jeté un gros pavé dans la mare, en soutenant, dans un document parvenu à ‘’EnQuête’’, que ‘’depuis le 21 août 2020, le Code électoral ne peut plus être invoqué par l’Etat du Sénégal pour faire obstacle à l’inscription de leur client sur les listes électorales et à sa candidature à toute élection’’. 
 
En effet, dès sa condamnation intervenue le 23 mars 2015, par la Crei, l’ancien ministre de la Coopération internationale avait perdu tous ses droits civils. Il n’a pu participer à la Présidentielle de 2019, car ne pouvant pas s’inscrire sur les listes électorales. Pour ses conseillers, tout ceci n’était qu’une manœuvre étatique pour écarter un concurrent sérieux.
 
Mais, désormais, les choses sont rentrées dans l’ordre. ‘’Alors que la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), juridiction d’exception, n’était pas allée jusqu’à priver Karim Wade de ses droits civils et politiques, l’Etat du Sénégal a arbitrairement, sans aucune base légale, radié notre client des listes électorales, en se prévalant de l’article L.31 du Code électoral qui interdit l’inscription aux personnes condamnées’’, expliquent les avocats. 
 
Les conseils de Wade fils se réjouissent toutefois des dispositions de l’article L32 qui limite, disent-ils, cette interdiction d’inscription sur les listes à une durée de 5 ans. Ainsi, relèvent les robes noires, depuis le 21 août 2020, Karim Wade devient électeur et éligible en vertu de la loi électorale et par l’expiration du délai de 5 ans suivant la décision de la Cour suprême du 20 août 2015 qui avait rejeté son pourvoi contre l’arrêt de condamnation par la Crei. 
 
En effet, dans le Code électoral sénégalais, l’article L31 stipule : ‘’Ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale les individus condamnés pour crime ; ceux condamnés à une peine d’emprisonnement sans sursis ou à une peine d’emprisonnement avec sursis d’une durée supérieure à un mois, assortie ou non d’une amende, pour l’un des délits suivants : vol, escroquerie, abus de confiance, trafic de stupéfiants, détournement et soustraction commis par les agents publics, corruption et trafic d’influence, contrefaçon et en général pour l’un des délits passibles d’une peine supérieure à cinq (5) ans d’emprisonnement (…).’’  
 
Au même moment, L’article L32 indique que : ‘’Ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale pendant un délai de cinq (5) ans, à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive, les condamnés soit pour un délit visé à l’article L31, troisième tiret, à une peine d’emprisonnement sans sursis égale ou supérieure à un mois et inférieure ou égale à trois (3) mois ou à une peine d’emprisonnement avec sursis égale ou supérieure à trois (3) mois et inférieure ou égale à six (6) mois, soit pour un délit quelconque à une amende sans sursis supérieure à 200 000 F CFA, sous réserve des dispositions de l’article L.30. (…).’’ 
 
Par conséquent, dans sa note, le collectif des avocats rappelle à l’État du Sénégal qu’il est tenu de se conformer strictement au respect de la Constitution et des traités internationaux qui garantissent les droits de Karim Wade, violés par les autorités de son pays depuis 2012. ‘’Il lui demande de procéder, sans délai, à la réinscription de Karim Wade sur les listes électorales et réaffirme sa détermination à faire réviser son procès, comme l’exigent le Comité des Droits de l’homme des Nations Unies ainsi que de nombreuses organisations qui agissent pour la défense des Droits de l’homme et le respect des libertés et de la démocratie au Sénégal’’. 
 
Comme on pouvait si attendre, ce document est accueilli avec euphorie au sein des responsables du Parti démocratique sénégalais.  
 
Euphorie au sein des libéraux
 
Le secrétaire national chargé de la mobilisation et de la propagande du PDS étale la satisfaction des libéraux.  D’après Assane Ba, le collectif des avocats de Karim Wade a bien fait de clarifier le débat judiciaire qui a prévalu autour de la non-inscription du candidat du PDS à la Présidentielle. Il n’a jamais, dit-il, été déchu de ses droits civiques et politiques. ‘’Le gouvernement a fait une forfaiture que nous ne laisserons pas pourrir davantage. Tous les militants et cadres du parti sont heureux. Le collectif d’avocats n’a rien fait que d’aplanir les doutes qui persistaient dans l’opinion’’, estime M. Ba.  
 
Dans le même sillage, le responsable national chargé des élections du parti de Me Abdoulaye Wade rappelle que la Cour de répression de l’enrichissement illicite n’avait pas privé Wade fils de ses droits électoraux. ‘’C’est la condamnation par le tribunal qui doit énoncer cette peine complémentaire de déchéance des droits électoraux. La Crei, bien qu’elle soit un tribunal qui a bafoué les droits de Karim, n’a pas franchi le Rubicon de déchoir Karim Wade de ses droits civiques’’, fait savoir Cheikh Dieng, par ailleurs Maire de Djiddah Thiaroye Kao.  
 
Le secrétaire national chargé des émigrés et des relations extérieures du PDS et secrétaire général adjoint assimile, lui, la suspension des droits civils de Karim Wade à une forfaiture politique. D’après Pape Saër Gueye, cette décision a été rendue au mépris des lois du Sénégal, car la décision de la Crei, insiste-t-il, n’a aucunement prononcé une déchéance des droits du candidat libéral.  
 
‘’C’est un procès politique et une interprétation d’abus de pouvoir qui a pour but de radier le candidat Karim Wade des listes. Dès lors que les délais de 5 ans sont complétement épuisés, il n’y a aucune disposition qui empêche notre candidat de compétir. Nous sommes dans une posture de dire aux citoyens sénégalais et observateurs nationaux et internationaux que par rapport à la situation de notre candidat Karim Wade, tout tombe comme un château de cartes’’, soutient M. Guèye.    
 
Retour de Karim Wade 
 
Après cette nouvelle tournure dans le dossier de Karim Wade, peut-on s’attendre à un retour imminent du candidat libéral ? A ce propos, nos interlocuteurs se veulent prudents. Pape Saër Guèye indique, en effet, que le parti travaille au quotidien pour le retour de Wade fils. A l’en croire, le droit national ne permet pas d’exiler un citoyen. C’est, dit-il, un abus et une violation de l’autorité nationale et internationale.  
 
‘’Nous nous exerçons à organiser son retour dans un agenda maitrisé, avec toutes les parties prenantes et en prenant en compte tous les aspects du succès de ce retour. On ne peut pas donner un délai, car c’est un agenda sur la base de stratégies que nous mènerons, de concertations avec l’ensemble des responsables du PDS, des mouvements de soutien et de tous ceux qui sont censés contribuer à la marche démocratique pour permettre à notre candidat de revenir occuper le terrain politique’’.  
 
Le secrétaire national chargé de la mobilisation et de la propagande du PDS indique, lui, que le retour de Wade fils dépendra de la seule volonté du Parti démocratique sénégalais qui va se charger de trouver le meilleur moment.  
 
Nos interlocuteurs refusent toutefois de parler de léthargie, en ce qui concerne leur formation politique. Cheikh Dieng préfère parler de confinement volontaire pour, dit-il, éviter une contamination interne au coronavirus. Le responsable national chargé des élections du PDS reconnait, toutefois, qu’il y a quelques départs de certaines identités remarquables. Il indique parallèlement que ces départs ont été largement compensés par des arrivées.  
 
Assane Ba indique d’ailleurs que le parti a toujours bien fonctionné, malgré ‘’la déportation de Karim Wade par Macky Sall et son régime. Nous partageons toutes les décisions avec Karim Wade’’, dit-il. 
 
HABIBATOU TRAORE  

 

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