Publié le 27 Feb 2013 - 20:55
EDITO DE MAMOUDOU WANE

 Recomposition au forceps !

 

 

La langueur dans laquelle baigne le gouvernement rompt d'avec la frénésie constatée dans le champ politico-judiciaire. Autant rien ne semble se passer dans l'équipe d'Abdoul Mbaye, à part quelques éclaircies avec la dame de fer de la Justice sénégalaise Mimi Touré ou dans la Diplomatie, pour ne citer que ces deux exemples, autant c'est l'ébullition dans le champ politique. Le jeu n'est pas simple. Cela ne se passe pas au centre, mais d'abord sur les flancs. Le coup porté par El Hadj Malick Gakou au gouvernement Abdoul Mbaye n'a pas fini de se cicatriser qu'une autre voix se signale dans les colonnes du Quotidien. Celle d'Aïssata Tall Sall qu'on avait fini d'oublier depuis la tempête qui a accompagné le départ de Wade du pouvoir. En vérité, plus on s'approchera des Locales, plus il faudra s'attendre à ce que ça bouge dans les différents partis politiques. Et que les ambitions s'affirment au sein du mammouth Benno Bokk Yaakaar.

 

Il faut dire que la chute du ''baobab'' Wade a été si fracassante qu'on avait fini par croire que Benno Bokk Yaakaar (BBY) était sortie de la cuisse de Jupiter. Alors qu'à l'origine était le désordre ! Faut-il rappeler que Benno Siggil Senegaal qui est père géniteur de la coalition qui a porté Macky Sall au pouvoir, a volé en éclats du fait des ambitions de lieutenants de cette grosse armée mexicaine d'alors. L'actuel Président, alors tout jeune opposant, était lui-même considéré comme un intrus dans une famille où il avait du mal à se flanquer deux galons sur l'épaulette. La suite, tout le monde la connaît, Macky Sall va quitter la barque, suivi de Tanor alors que Niasse va hériter d'une légitimité sans poids politique déterminant. Et retour sur scène, Macky Sall reviendra tout prendre un certain 25 mars 2012, passant du coup Général de corps d'armée, devant des ''lieutenants'' qui lui refusaient même ce statut.

 

Ce traumatisme politique, même s'il est refoulé, pour utiliser une métaphore freudienne, reviendra en force...justement par la force des choses. Car, la proximité des élections locales et les énormes enjeux qu'elles drainent pour les acteurs de la scène politique, semble désormais donner le coup de gong d'une recomposition prématurée des forces politiques. C'est bien la phase 1 d'une bataille dont l'issue ne dépend pas seulement des agendas des partis politiques, mais bien de la seule volonté des Sénégalais, comme ils le prouvent bien depuis au moins 2000. C'est sans doute ce qu'a compris Idrissa Seck qu'il s'écarte prudemment de BBY.

 

L'enjeu majeur, c'est une reconfiguration des forces politiques, peut-être de la même ampleur que celle qui avait, en 2009, expédié Karim Wade à la retraite avant terme. Alors même qu'il confiait à l'auteur de ces lignes, dans une interview accordée à l'époque au groupe Futurs Médias, que lui Karim Meïssa Wade, fils d'Abdoulaye Wade et de Viviane Vert, n'était pas un homme qui perd. Beaucoup d'eau a sans doute coulé sous les ponts depuis. Il s'agit aujourd'hui pour lui et les autres de se sauver des ''griffes'' de Mimi Touré, tenace comme Isis, qui ramassa les quatorze membres d'Osiris avant de concevoir avec lui, Horus, héritier du trône d'Egypte.

 

C'est dire que les acteurs en scène ne tiennent pas tout leur destin en main. Car, parmi les fronts ouverts par le pouvoir en place, il y en a un qui est énorme : celui de la traque des biens mal acquis. Si Macky Sall tient là un os politiquement intéressant à ronger tant que l'affaire est traitée sans parti pris, ni esprit revanchard, autant les effets collatéraux se font déjà sentir bien loin du Temple de Thémis. Touba, la capitale du mouridisme, est aujourd'hui impliquée dans ce dossier du fait que plusieurs de ses fidèles sont aujourd'hui dans les mailles de Dame Justice. Pour ne prendre que ce cas, Aïdara Sylla, comme les familles Bousso, est très influent dans la quasi-totalité des familles mourides de Touba. Si ce front est encore embryonnaire, avec un jeu d'ombres qui cache bien l'érection d'une certaine opinion contre le pouvoir en place, il ne faudrait pas négliger le poids des mourides, surtout lorsqu'ils se mobilisent contre un camp. Mais Macky Sall aura réussi un gros coup, s'il parvient à casser le réseau de Karim Wade et Cie, tout en gardant l'équilibre, bras sur le gouvernail...

 

Post scriptum !

 

Les images défilant sur les télévisions européennes, France 24 en premier, sur le procès de Laurent Gbagbo, sont plus qu'humiliantes. Pas seulement pour l'ex-président ivoirien, mais aussi et surtout pour les Africains. Au nom de quoi, ce machin qu'est la Cour pénale internationale laisse filtrer des images aussi dégradantes pour un homme présumé innocent, quel que soit ce qu'on lui reproche du reste. Au nom de quoi, Human rights watch et d'autres ONG européennes devraient-elles nous dicter la conduite à tenir dans l'affaire Habré ?

 

 

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