Publié le 17 Aug 2019 - 23:21
EN VERITE AVEC ABDOU KARIM SALL, MINISTRE DE L’ENVIRONNEMENT

‘’Ce qui me choque…’’

 

Entre le désœuvrement de certains de ses services, la montée en puissance des trafiquants de bois qui accélèrent le processus d’installation du désert dans certaines contrées du pays, les agressions de grandes entreprises comme les Industries chimiques du Sénégal, la pollution atmosphérique, les déchets plastiques, entre autres, le nouveau ministre de l’Environnement et du Développement durable veut prendre le taureau par les cornes. Chez Abdou Karim Sall, tout semble prioritaire. Le responsable à l’Alliance pour la République parle aussi des blocages du dialogue, de Wade, de Sonko, entre autres.

 

Vous revenez d’une tournée nationale. Globalement, quel bilan tirez-vous de cette visite ?

Je ne parlerai pas de bilan. Je rappelle juste que, depuis mon installation, j’ai eu à effectuer quelques visites au niveau de mes services, aussi bien à Dakar qu’à l’intérieur du pays. C’est pour une meilleure prise en charge de certaines questions. J’avais démarré par le parc zoologique de Hann qui est à deux pas du ministère. Ce qui m’a permis d’y aller dès le lendemain de ma prise de fonction. Et cela m’a permis de constater un certain nombre de problèmes. Et, immédiatement, nous avions pris des dispositions pour les combattre. Il s’agit notamment du stationnement et de la circulation des véhicules à l’intérieur du parc. Je n’ai pas vu dans le monde des parcs où on permet à des automobilistes de se garer à l’intérieur. Pire, certains ont même fait de cet espace une voie de contournement des embouteillages. Voilà pourquoi nous avons décidé d’interdire l’accès aux véhicules.

Le parc de Hann, ce n’est pas seulement un parc zoologique, c’est aussi un parc forestier. C’est un lieu où les gens peuvent se retirer pour faire  leur sport ou leur méditation. Cela n’est pas possible, s’il y a des voitures qui circulent à l’intérieur.

Après le parc de Hann, vous avez été à Senchim où vous avez relevé la présence de centaines de tonnes de déchets. Pouvez-vous revenir sur les mesures qui ont été prises ?

D’abord, il faut préciser que cette usine ne fonctionne plus depuis 2011. Mais compte tenu de sa proximité avec les populations, nous avions estimé qu’il est bon d’aller voir ce qui se passe à l’intérieur. Ce qui nous a permis de constater qu’il y avait 500 tonnes de déchets entreposées dans certaines conditions. Nous avons échangé avec les autorités de Senchim, plus précisément avec le directeur des Ics.

Ainsi, nous avons retenu avec lui un plan d’action que nous sommes en train de mettre en œuvre. Ce plan consiste, d’abord, à un confinement des futs dans le but de les sécuriser. Parce que ces futs, étant à l’air libre, n’étaient pas très bien protégés. La deuxième chose consistait en un reconditionnement des futs qui présentent un certain nombre de faiblesses. Il faut noter que ces récipients, qui contiennent des substances toxiques, sont là depuis 2011. Ils peuvent donc naturellement présenter des signes de dégradation de nature à entrainer l’échappement de certains produits. Je pense que cette question est en train d’être prise en charge.

Quel est le délai imparti aux Industries chimiques pour régler ce problème ?

Nous leur avions donné un délai qui expire à la fin du mois d’août. D’ailleurs, nous allons y retourner le 14 pour apprécier l’état d’avancement du plan d’action (l’interview a eu lieu le vendredi 9 août 2019). Je dois aussi dire qu’outre les mesures sus indiquées, nous avons aussi demandé aux Ics, comme ultime plan d’action, d’éloigner ces produits de la population. Soit en les expédiant en dehors du pays. Ou bien de trouver une formule avec les cimentiers pour que ces produits soient incinérés à haute température.

Toujours avec les Ics, il y a aussi le cas de l’émissaire de Khondjo qui constitue une grande inquiétude pour les populations de la zone. Avez-vous une idée de l’ampleur des dégâts ?

A Khondjo, nous avons effectivement constaté la présence de cet émissaire qui déverse des produits sur la plage. Mais nous n’avons pas d’informations sur le degré de toxicité de ces produits. D’après les Ics, il ne s’agit pas de produits dangereux, mais nous leur avons demandé de le prouver. En attendant, ils ont pris l’engagement, sur notre demande, de traiter ces produits au niveau de l’usine, avant de les déverser sur la plage. Cela risque de prendre du temps. Raison pour laquelle il a été décidé de délocaliser l’émissaire loin des populations. Ils ont un délai de trois mois pour la mise en œuvre du plan d’action.

Mais pourquoi le ministère n’a pas fait ses propres prélèvements et effectué lui-même les tests ?

C’est vrai que nous devons nous équiper. Aujourd’hui, nous n’avons pas les outils pour faire le contrôle nécessaire. D’habitude, on s’adresse à des entités comme l’Ucad pour réaliser certaines tâches. Mais dans nos programmes, nous avons prévu de nous doter de l’ensemble des outils nous permettant d’exercer correctement notre mission.

Quid de la zone sud du pays où les coupes abusives de bois hantent le sommeil de nombre de populations ? Qu’avez-vous prévu de faire pour juguler le fléau ? 

Lors de notre déplacement dans cette partie du pays, particulièrement dans les régions de Ziguinchor, Sédhiou, Tambacounda et Kédougou, nous avons travaillé avec les autorités administratives déconcentrées. Nous avons aussi tenu une réunion de sécurité avec l’ensemble des parties prenantes, les forces de défense et de sécurité et les autorités administratives, pour évaluer les difficultés qui font que le travail de surveillance n’est pas effectué tel que nous l’aurions souhaité. Ces réunions de sécurité seront d’ailleurs organisées tous les mois, pour un bon suivi de la situation. Mais ce qui nous a le plus marqué, c’est que ce problème du trafic illicite de bois ne concerne pas seulement la Casamance. Il sévit également là où on l’attendait le moins, c’est-à-dire même dans la région de Matam, notamment dans le département de Ranérou. Nous avons pris des mesures pour interdire l’activité dans cette région.

Vous avez aussi été visité la Grande muraille, un projet tombé à l’eau pour certains. N’est-on pas en retard dans la mise en œuvre de cet ambitieux programme ?

Je ne dirais pas que c’est tombé à l’eau, car un certain nombre de choses ont déjà été réalisées dans ce cadre. Il faut savoir que le président de la République a l’ambition de léguer à la prochaine génération un patrimoine forestier digne d’un Etat émergent. C’est ainsi qu’il faut comprendre la mise en place récente de l’Agence sénégalaise de la reforestation et de la grande muraille verte. Celle-ci va se substituer à l’Agence de la grande muraille verte qui avait une compétence locale, suivant le tracé de la Grande muraille, c’est-à-dire la zone allant de la région de Louga, passant par Matam, pour se terminer dans la région de Tamba, précisément dans le département de Bakel.

En revanche, la nouvelle agence a une compétence nationale consistant à prendre en charge la question du reboisement sur toute l’étendue du territoire.

Vous convenez donc qu’il y a un retard dans la mise en œuvre de ce projet régional ?

Vous savez, chaque année, il y a 40 000 ha en termes de destruction de nos forêts. A l’opposé, nous n’avons que 20 000 ha reconstitués. Naturellement, il y a donc un gap significatif. Si, chaque année, il y a un gap de 20 000 ha, vous voyez que si on ne prend pas les dispositions idoines, nous risquons d’avoir une situation qui risque d’être irréversible. Le désert pouvant s’installer dans certaines parties du pays.

Quelles sont les zones les plus menacées par ce phénomène ?

Il s’agit, en premier lieu, de la façade nord qui est en contact avec la Mauritanie. Il y a aussi une partie du centre. Même au sud, il y a des endroits qui méritent un plan d’action concret. C’est ainsi tout le Sénégal qui en a besoin. C’est devenu une urgence qui fait partie des priorités du président de la République inscrit dans le cadre du Plan Sénégal émergent.

Souvent, des membres de l’Administration sont accusés de complicité dans le trafic illicite de bois. Que répondez-vous ?

Je ne peux, sans preuve, aller dans le sens d’une accusation quelconque. Je puis simplement vous assurer qu’à chaque fois que nous avons vu des membres de l’Administration impliqués, nous avons pris des mesures pour que la lumière soit faite. C’est ce qui est arrivé au parc Niokolo-Koba où le conservateur et son adjoint sont en prison. L’Administration ne joue pas avec ça. A chaque fois qu’il est avéré que des agents sont concernés dans des actes illicites, nous n’hésitons pas à prendre des sanctions appropriées.  

Quelles sont, aujourd’hui, les grandes priorités de votre département ?

Mes priorités, c’est l’environnement et le développement durable dans son ensemble (rires). En fait, nous avons un vaste département et, pour moi, tout est prioritaire. En plus des questions qu’on a évoquées, il y a les déchets plastiques, la reforestation, la pollution atmosphérique... Voilà pourquoi je ne veux pas me mettre à citer. Tout est priorité chez nous. Nous y irons de manière progressive et méthodique pour atteindre les objectifs.

Parlant de pollution atmosphérique, il y a le cas spécifique de Dakar.  Y a-t-il d’ailleurs un plan spécial pour capitale ?

D’abord, permettez-moi de rectifier ceux qui disent que Dakar est la ville la plus polluée de l’Afrique de l’Ouest. Ce n’est pas exact. Dans la sous-région, le Sénégal est l’un des rares pays qui détient un Centre de gestion de la qualité de l’air. Nous contrôlons la qualité de l’air sur six points dans la région de Dakar. Nous recevons au quotidien les informations sur la qualité de l’air. Et ces informations sont loin d’être alarmantes. A chaque fois que nous avons des pics, nous alertons les services concernés comme le ministère de la Santé.

Il faut noter que, quand on parle de pollution de l’air, il y a surtout trois dimensions : la poussière, les industries, les automobiles. Sur la première, il faut admettre que nous n’avons pas d’emprise. Mais sur les deux dernières, nous avons des emprises et ne cessons d’œuvrer pour une gestion correcte de l’environnement. C’est comme ça qu’il faut comprendre notamment la mise en place du Brt, par exemple.

Toujours à propos de Dakar, il y a la question de la décharge de Mbebeuss qui revient souvent dans les débats. Que retenir de votre tour dans cette décharge ?

La décharge de Mbebeuss est une décharge très importante pour la région, pour toute la presqu’île du Cap-Vert. Sur place, nous avons pu constater qu’il y a des actions à entreprendre, comme l’a laissé entendre le président de la République. Avec nos partenaires comme la Banque mondiale, l’Agence française de développement, entre autres, des solutions sont en passe d’être trouvées.

Qu’est-ce que vous avez vu, lors de votre tournée, et qui continue de hanter votre sommeil ?

Ce qui me choque, c’est la manière, la vitesse avec laquelle nos forêts sont en train d’être détruites. C’est pénible à voir. La deuxième chose, c’est la pollution visuelle, en ce qui concerne les sachets plastiques. Quand vous êtes à proximité d’une grande ville, la première chose qui vous frappe, c’est cette étendue de déchets. Ce n’est pas beau à voir. C’est vraiment une problématique à prendre en charge. C’est ce que nous sommes en train de faire, avec notamment la loi sur les déchets plastiques.

Cette loi, on en parle depuis longtemps, mais on a l’impression que ça ne bouge pas. Les sachets étant toujours vendus au vu et su de tout le monde…

(Il coupe) Vous avez une impression comme vous dites. Mais les plans d’action sont en train d’être déroulés. Cette question est bien prise en charge par les différents services du ministère, en rapport avec toutes les parties prenantes, notamment le ministère du Commerce, le ministère de l’Intérieur, celui en charge de l’Economie et des Finances, la Justice et tous ceux qui sont concernés par la question. Il faut aussi comprendre que le périmètre de la loi n’intègre pas tous les types de plastique. Raison pour laquelle, non seulement, nous nous engageons à appliquer l’existant, mais aussi nous allons proposer d’étendre le champ à d’autres types de plastique. Notamment les sachets d’eau, les gobelets, les assiettes et plats à jeter…

Vous parlez d’élargissement du périmètre, alors qu’on ne parvient toujours pas à appliquer efficacement ce qui existe…

Nous avons démarré récemment une campagne. Beaucoup de saisies ont été faites et nous allons les continuer, pour lutter efficacement contre ceux qui passent outre la législation en vigueur. Au-delà des saisies, il y a des sanctions pécuniaires, pénales… Nous n’hésiterons pas, au besoin, à saisir le procureur pour l’ouverture de poursuites judiciaires.

Avez-vous les moyens nécessaires pour une application efficace de votre feuille de route, si l’on sait que sous nos cieux, le ministère de l’Environnement est souvent considéré comme un sous ministère ou, à tout le moins, relégué au second plan ?

Quand on m’a confié cette mission, j’ai dit que c’est un sacerdoce. L’environnement, c’est quelque chose de fondamental. Nous gérons un département transversal. Quand on parle de développement durable, on parle économie, social et environnement. Comment parvenir à concilier le développement économique et social, tout en protégeant notre environnement ? Je pense qu’il n’y a pas de mission plus importante. Aussi, eu égard au rythme de la dégradation de nos forêts, vous pouvez aisément imaginer l’ampleur de la mission qui nous attend. Je ferai de mon mieux pour mériter la confiance du président qui m’a choisi comme chef de ce très grand ministère. Maintenant, pour ce qui est des moyens, il faut savoir que si on a les moyens et pas la volonté, on n’arrivera nulle part.

En revanche, quand on a la volonté, on va aller chercher les moyens. Je suis tout à fait à l’aise par rapport à ce que j’ai comme moyens, de faire bouger les choses. Pour moi, le problème se pose surtout en termes de volonté et non de moyens. Et la volonté du gouvernement et du président de la République est sans équivoque.

Pour être plus concret, certains de vos services sont dans le désœuvrement le plus total. Ils se plaignent de manque de moyens. N’est-ce pas là une limite dans la mise en œuvre de votre politique ?

Les visites m’ont effectivement permis de constater que des efforts doivent être faits dans le sens d’étoffer davantage les équipes qui sont sur le terrain. Aussi bien sur le plan humain que matériel. Vous savez, le parc de Niokolo-Koba, par exemple, fait 913 000 ha. C’est plus que la région de Dakar et celle de Thiès réunies. Pour le surveiller, il faut des moyens. La surveillance, par des moyens terrestres, a des limites. Il faut envisager une surveillance par des moyens aériens. Nous y travaillons.

D’ailleurs, y a-t-il toujours des lions à Niokolo-Koba ?

Ah oui ! Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à vous y rendre. Nous avons fait une évaluation. Les espèces qui étaient à Niokolo-Koba au moment où on érigeait la réserve en parc sont toujours là. Il y a eu quelques menaces sur les élands de Derby. Il y a de cela 20 ans, il y a eu un prélèvement de 9 sujets qui ont été déportés dans les réserves de Fatalah et de Bandia pour un repeuplement. C’était pour ne pas perdre cette espèce rare. Les neuf qui ont été déportés ont permis d’avoir une population qui tourne autour de 100 à 120 espèces. L’éland de Derby est une particularité sénégalaise. On ne trouve nulle part ailleurs la variété qui existe au Sénégal. Au Cameroun et en Rca, il existe des élands de Derby, mais ce n’est pas exactement le même. C’est pourquoi il faut une protection spécifique de cette espèce.

Dans les mois à venir, nous allons faire ce qu’on appelle le retour à la maison. Nous allons prélever une partie des sangs pour les repositionner au niveau de Niokolo-Koba. Mais on va être en semi captivité pour que le contrôle sur l’évolution puisse se faire de manière efficace.

Parlons maintenant de politique avec le dialogue qui coince au niveau de la définition des termes de référence de l’audit. Qu’est-ce qui explique, selon vous, ces blocages ?

Pour dialoguer, il faut au moins être deux. Il faudrait d’abord saluer la volonté du président de la République d’ouvrir ce dialogue, pas seulement aux politiques, mais également à toutes les parties prenantes. Après son élection, le président avait toute la latitude de dérouler seul. Il n’y avait aucun obstacle, parce qu’il a été élu brillamment. Son élection n’a souffert d’aucune contestation sérieuse. C’est donc une générosité de sa part, une forme d’ouverture et de partage qu’il faut saluer. Je ne doute pas que des consensus forts seront trouvés, malgré les difficultés, pour le bien du Sénégal.

L’une des premières mesures qui ont été prises consiste à reporter les élections locales. Pour certains, c’est parce que la conjoncture n’est pas favorable à la majorité ?

Moi, je vous dis que ce que disent ces gens n’est pas vrai. Nous sortons d’une élection présidentielle que nous avons largement remportée. Je pense donc que le vent nous est plus que favorable. Aller aux élections, en décembre, c’est remporter l’ensemble des collectivités sans coup férir. Le décalage de ces élections procède plutôt du comité sur le dialogue politique. Ce n’est pas la majorité, encore moins l’Apr qui a été à l’initiative. Je dois dire que le décalage arrange plus l’opposition que le pouvoir.

Malgré votre envergure, on n’a pas encore vu Abdou Karim Sall élu par les électeurs. N’y a-t-il pas là un sentiment de manque ?

On le verra bientôt. Il faut quand même être objectif. Ici à Mbao, Bby est largement majoritaire. Et dans Bby, les responsables qui sont autour de moi constituent la force politique n°1.

C’est donc tout à fait normal que le jour où on ira aux élections, nous allons les remporter largement.

Visez-vous la commune de Mbao ou tout simplement la ville de Pikine ?

Pour moi, il faut d’abord gagner Mbao, avant de parler de Pikine. Et, de toute façon, à Pikine, il y a déjà quelqu’un qui est un camarade de parti.

Vous acceptez donc d’être derrière Abdoulaye Thimbo ?

Moi, je suis derrière le président de la République. Je soutiens Abdoulaye Thimbo dans le cadre de la mission qui lui a été confiée par les populations de Pikine. Je le soutiens aussi en tant que coordonnateur du département. Moi, je me veux réaliste. Je dis Mbao d’abord, il faut gagner la commune, avant de penser à quoi que ce soit. Le moment venu, les instances du parti vont choisir la personne qui doit être à la tête du département. Si le choix est fait sur le maire actuel, cela ne me poserait pas de problème.

Abdoulaye Wade continue d’accorder des audiences à une frange de l’opposition. N’avez-vous peur des unions qui pourraient en découler ?

Quand Dieu vous prolonge la vie, il diminue vos moyens. Ce qu’Abdoulaye Wade pouvait, en 2000, il ne le peut plus en 2019. Nous lui souhaitons longue vie. Mais aujourd’hui, Abdoulaye Wade ne peut pas être un problème pour le Sénégal. Qu’il s’allie avec x, y et z, ce n’est pas ça qui peut nous empêcher de dormir.

Je disais la dernière fois à Sonko qu’on ne fait pas du neuf avec du vieux. Je pense qu’il est en train de se chercher, mais qu’il sache que la solution ne peut être Abdoulaye Wade dont le parti est en état de décomposition avancée. En plus, Sonko a tellement habitué les Sénégalais à des contrevérités qu’il n’est plus crédible. Il a dit beaucoup de choses qui n’ont pas résisté à la vérification. Il avait dit qu’il était prêt à faire la lumière sur l’affaire des 94 milliards. Quand il a été convoqué par ses collègues de l’Assemblée nationale, il a refusé de déférer à la convocation. Moi, je ne m’arrête plus sur ses actes ou paroles.

Parce que, pour lui, c’est du dilatoire et que c’est à la justice de faire la lumière sur ce scandale, puisqu’une plainte a été déposée sur la table du procureur.

Cela n’enlève en rien le fait que l’Assemblée puisse jouer son rôle. L’enquête parlementaire, c’est du ressort de l’Assemblée. La personne la mieux indiquée pour lui permettre de faire son travail, c’était Ousmane Sonko et il s’est débiné. Même chose pour la question du pétrole. Je ne pense pas qu’il ait répondu à l’appel à témoin. Je ne prête donc plus attention à ce qu’il fait ou dit.

Mais au-delà de Sonko, beaucoup de Sénégalais déplorent l’inertie du procureur sur cette question des 94 milliards. N’ont-ils pas raison quelque part ?

En tant que Sénégalais, en tant que républicain, nous devons faire confiance en notre justice. Nous devons respecter nos institutions. Quand je vois quelqu’un qui prétend diriger ce pays attaquer les institutions, je me dis qu’il y a matière à réflexion. Ce n’est pas en essayant de jeter le discrédit sur ces institutions, particulièrement sur notre justice, qu’on arrivera à régler les problèmes du Sénégal.

Est-ce que vous n’avez pas mal, quand vous voyez un jeune activiste comme Guy Marius Sagna en prison ?

Moi, je m’arrête d’abord sur le terme activiste. Est-ce cette personne qui tire sur tout ce qui bouge ? Est-ce quelqu’un qui ne voit que le noir partout ? L’activiste est-il un nihiliste ? Mais, en tout état de cause, il faut exercer sa liberté dans le respect de nos lois et règlements. Quand quelqu’un se met en porte-à-faux avec nos lois, cela va de soi qu’il va s’expliquer devant la justice.

Quid des conditions de détention difficiles dans les prisons déplorées dans une lettre dont la paternité a été attribuée à l’activiste ?

S’il était dans de mauvaises conditions, il n’allait pas pouvoir écrire une lettre. S’il est parvenu à rédiger une lettre, c’est parce qu’il jouit de certaines conditions. Maintenant, la prison ce n’est pas comme à la maison.

La semaine dernière, une vidéo vous montrant en train de planter un arbre, les pieds posés sur une natte, avait défrayé la chronique. Est-ce vrai que vous évitiez de vous salir ?

Ceux qui ont voulu profiter de cette occasion pour essayer de faire un lynchage médiatique nous ont rendu service. Permettez-moi donc de les remercier pour cette publicité gratuite, consistant à montrer un ministre en train de planter un arbre, le lendemain de la Journée nationale de l’arbre. Cela dit, je dois faire un certain nombre de précisions. D’abord, ces évènements, comme je l’ai dit, ne se sont pas déroulés le jour de la Journée nationale de l’arbre. Les gens ont fait, sciemment ou non, de l’amalgame. De quoi s’agit-il ? Après avoir présidé, à la demande du président de la République, la journée nationale à Lompoul, le dimanche 4 août, j’ai dit : Si au moins la moitié des Sénégalais plantait chacun 2 arbres, on aurait 16 millions d’arbres.

Charité bien ordonnée commençant par soi, dès le lendemain, après avoir présidé comme d’habitude la cérémonie de levée des couleurs, j’ai voulu matérialiser cette ambition, en plantant deux arbres dans le jardin du ministère. J’avoue que la tenue que je portais n’était pas adéquate, parce que je devais me rendre au Cicad où le président devait présider le programme Pana, à 9 h. D’ailleurs, en ce qui concerne les plants, j’ai choisi le beer, qui était le parrain de la journée, et le khaya, qui est aussi symbolique. Au moment de passer à l’action, un agent a eu le réflexe de ramasser une natte qui trainait et est venu l’étaler au cas où je devais m’accroupir. Ce qui est le plus important pour nous, c’était de montrer aux Sénégalais l’importance de planter des arbres. Et grâce à cette vidéo, nous avons atteint cet objectif.

Je profite donc de cette tribune pour remercier ceux-là qui ont contribué à une large diffusion de cette information.

 

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