Publié le 3 Aug 2016 - 03:07
ENORMES BOUCHONS, VOITURES EN PITEUX ETAT, CHARRETIERS INDISCIPLINES…

La circulation rime avec anarchie à Mbour

 

Il est difficile aujourd’hui de trouver des qualificatifs à la circulation dans la ville de Mbour. Même s’il y a  un large consensus autour du vocable ‘’anarchie’’. L’agglomération connait un sérieux problème de mobilité, mettant en danger la vie des piétons. Le transport dans la ville-carrefour est assuré par des taxis en piteux état et des charrettes qui flirtent avec le danger. Du fait des énormes bouchons quotidiens, un sentiment de chaos se dégage de l’ensemble. Alors que les bus Tata promis se font toujours attendre.

 

‘’Eh ! Ne pouvez-vous pas rouler sur la chaussée ? Si vous me touchez, nous allons en découdre !’’ Ainsi parle un piéton qui a été surpris dans sa marche par un taxi 7 places qui a failli le heurter. Une scène pareille se produit tous les jours à Mbour sur la route nationale n°1. Les embouteillages sont devenus monnaie courante dans le quotidien des Mbourois. Il est difficile de marcher sur le trottoir sans qu’une voiture ne vous manque de peu. La ville connaît un sérieux problème de mobilité, du fait de la densité de sa circulation. C’est une combinaison de facteurs qui explique l’anarchie qui règne sur les routes.

Etant un carrefour, les automobilistes qui rallient Fatick, Kaolack, Tambacounda, le Mali, passent par Mbour. Ce qui fait que la ville est noyée dans des bouchons à n’en plus finir. Et pour contourner les obstacles, les conducteurs n’hésitent pas à mettre en danger la vie des piétons. En effet, les chauffeurs, pour ne pas se laisser coincer dans les embouteillages, quittent la route et disputent les trottoirs aux piétons. ‘’Ils klaxonnent, font des demi-tours impromptus. Si des feux rouges étaient installés sur la route, ils allaient tout le temps les griller’’, s’offusque Maguette. Pour traverser la route, le piéton est souvent obligé de patienter pendant plusieurs minutes. ‘’Une fois, un taxi a failli m’écraser. Je marchais sans me soucier de rien, parce que j’étais sur l’espace réservé aux piétons. Depuis, je regarde ou je mets les pieds’’, explique la commerçante Khady Ba.

La grande voie est en permanence saturée. L’anarchie dans la conduite n’offre pas aux populations des solutions de mobilité adaptées.

Pléthore de taxis, charrettes dangereuses, Jakarta inexistants

En outre, la vétusté des taxis n’est pas de nature à améliorer la situation. ‘’Le matin, quand je vais au boulot, je reste plus d’une trentaine de minutes à attendre un taxi. Ceux qui arrivent sont pleins’’, se désole Mintou. Pourtant, il y a une pléthore de véhicules qui officient comme taxis. Malgré leur nombre, ces moyens de transport ne prennent pas en comptent tous les besoins de mobilité urbaine des populations. Certains comme Mintou cherchent des alternatives qui, même si elles sont efficaces, ne sont pas reposantes. ‘’Je dois prendre un taxi tous les matins pour rallier la gare routière. De là, je prends un car pour Sandiara, mon lieu de travail. Mais des fois, je préfère marcher de chez moi jusqu’à la gare, parce que la circulation n’est pas très fluide. Prendre un taxi peut te faire perdre plusieurs minutes’’.  Un état de fait qui vient s’ajouter à l’état des véhicules, de véritables carcasses. ‘’Une fois, j’ai été obligé de descendre avant l’arrêt, du fait de son étroitesse. Avant d’y entrer, j’ai inspecté l’intérieur, tellement le taxi était sale’’, ajoute-t-elle.                                                                                          

Outre les automobiles, il y a aussi les hippomobiles qui participent au déplacement des citadins. La charrette demeure le moins cher et le plus pratique, de l’avis de certains. Ce qui lui donne une certaine clientèle. Toutefois, certains Mbourois la considèrent comme la plus dangereuse de tous les moyens de transport. En effet, le carrosse peut être renversé par le cheval. Les conditions de sécurité et de confort des passagers sont jugées inexistantes. Il n’y a pas d’abri ombragé. Les passagers sont ainsi exposés aux rayons solaires. La charrette est également fréquemment surchargée. Elle peut contenir onze personnes. Cinq de chaque côté, plus le cocher, sans compter les bagages et des passagers placés au milieu. Le cheval peut donc s’écrouler à tout moment. Venue faire des achats, Oumy en a eu une mauvaise expérience. ‘’J’ai eu cinq points de sutures sur mon front, parce je suis tombée de la charrette’’, explique-t-elle.

En dépit de cette mésaventure, elle continue à la prendre. Elle considère la charrette comme  une alternative pratique.  Mais surtout, parce qu’elle y a trouvé un avantage comparatif. ‘’Il n’est pas dangereux de monter à bord des charrettes, car les cochers conduisent à une vitesse raisonnable. Avec les charrettes qui vont à Gounass, je descends à quelques mètres de chez moi, ce qui n’est pas possible avec un taxi ’’, se réjouit-elle. Le problème de cohabitation se pose aussi. Les charretiers sont accusés d’être à l’origine des encombrements quasi-permanents.

Le mode de transport version Jakarta est inexistant, sauf à Saly. Là-bas aussi, l’intérêt pour les transports version Jakarta est relativement récent. Et ils ne sont assurés que dans un circuit bien défini dans la commune.

Population en attente des bus Tata

Mbour étant en pleine transition urbaine, pour certains, c’est le moment de planifier le développement du  transport urbain qui constitue un élément clé de l’économie. Les taxis et les charrettes constituent le mode de déplacement quotidien le plus utilisé et ils ne cessent de croître. A l’inverse, le service public de transport urbain est inexistant. D’ailleurs, avant le référendum de mars dernier, le directeur des transports avait annoncé en grande pompe la mise en place d’un système de transport public innovant à Mbour. Développé avec succès à Dakar et à Thiès, le bus Tata a été considéré comme capable d’apporter une solution aux problèmes de mobilité des Mbourois. Plus d’une trentaine de bus Tata avaient été annoncés pour la ville.

Depuislors, pas l’ombre d’un bus n’est aperçu dans la commune. ‘’Ce serait vraiment une aubaine pour nous si à Mbour on avait des bus Tata, comme à Dakar et Thiès. Nous en avons le plus besoin. Seuls les taxis et les charrettes ne peuvent satisfaire la demande. On perd beaucoup de temps dans nos déplacements’’, dit Khady Ba. Comme elle, ils sont nombreux les gens qui partagent son avis. Et qui attendent toujours que leur ville soit dotée de transport public adéquat. 

KHADY NDOYE (MBOUR)

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