Publié le 19 May 2019 - 14:15
FINANCEMENT DE L’INVESTISSEMENT

La Bnde diversifie ses produits

 

La Banque nationale pour le développement économique (Bnde) compte diversifier ses produits pour financer l’investissement au Sénégal. En plus de la finance islamique, la banque va mettre sur le marché le crédit-bail et l’affacturage. L’annonce a été faite, hier, par son Directeur général, Thierno Seydou Nourou Sy, lors d’une rencontre avec la presse.

 

Après avoir fait passer son bilan total de 30 milliards de francs CFA à plus de 175 milliards de francs, en 5 ans, la Banque nationale pour le développement économique a adopté une nouvelle vision. Elle veut, selon son Directeur général, être une banque ‘’innovante, performante, accessible et un partenaire privilégié’’ des Petites et moyennes entreprises (Pme) pour le développement du pays. Pour ce faire, l’institution financière, qui compte se lancer la finance islamique, va mettre sur le marché deux nouveaux produits. Qui vont financer l’investissement comme le crédit-bail et le fonds commun pour l’affacturage.

‘’Cela concerne pratiquement tout secteur d’activités, industriel comme celui des infrastructures. Deux secteurs vont beaucoup bénéficier du crédit-bail. Il s’agit de celui médical et agricole’’, explique Thierno Seydou Nourou Sy. Le Dg de la Bnde s’exprimait hier, lors d’une rencontre avec la presse pour faire le bilan de ses 5 ans d’activités. Il précise que dans le secteur médical au Sénégal, il est noté aujourd’hui, un ‘’déficit’’ d’équipement médical ‘’très important’’. ‘’D’ailleurs, ce secteur fait l’objet d’une stratégie nationale pour mettre à niveau le Sénégal. Nous allons avec ce produit permettre aux cliniques, laboratoires, cabinets médicaux, d’avoir suffisamment d’équipements. Nous avons les médecins les mieux formés d’Afrique, mais les Sénégalais vont à l’étranger pour se soigner, parce que les équipements ne sont pas adaptés. Donc, voilà un secteur qui doit beaucoup bénéficier du crédit-bail’’, dit-il.

Pour l’affacturage, ils comptent le lancer durant le 2ème semestre de l’année 2019. ‘’Il faut que ce soit quelque chose d’opérationnelle, de disponible’’, assure-t-il.

Pour ce qui est de l’agriculture, le Dg de la Bnde estime que le secteur a besoin de moyens d’exploitation et de transformation pour les produits agricoles locaux. ‘’Le Sénégal a pris l’option d’aller vers l’industrialisation. Nous allons avec cet outil apporter des réponses aux entreprises sénégalaises qui souhaitent transformer leurs produits et les écouler sur le plan local et international’’, affirme-t-il. Toutefois, il précise que leur institution financière n’est pas une banque agricole. Ce qui fait qu’elle n’intervient jamais dans la production agricole. Sauf si la production leur donne une scène de valeur maitrisée, du début jusqu’à la fin.

‘’Nous avons voulu laisser au Crédit agricole, son rôle de banque agricole. Nous nous focalisons sur la transformation et la commercialisation. Nous ne sommes pas une banque de l’habitat. Nous n’allons pas financer la promotion immobilière. C’est le rôle de la Banque de l’habitat. Par contre, lorsqu’il s’agira de financer une Pme, Pmi qui est dans le secteur de l’immobilier qui veut acheter des équipements, nous le financerons. Nous sommes pour la séparation des tâches pour que chaque banque puisse bien jouer son rôle pour le développement économique du Sénégal’’, fait-il savoir.

Une réponse aux contraintes des Pme

Sur ce, M. Sy rappelle que, de 2014 à 2017, ils ont accompagné des Pme, en leur donnant des facilités d’augmenter leurs capacités d’exploitation. Ce qui leur a permis de mieux les connaitre, les appréhender. ‘’A partir de 2017, nous avons mis l’accent sur l’investissement. C’est deux approches nous ont permis de mieux connaitre les contraintes de financement des Pme et les problématiques de mise à niveau de leurs équipements. Avec ces deux produits, nous espérons donner une réponse à cela’’, renchérit-t-il.

Bien que dédiés aux Pme, le patron de la Bnde pense que ces produits devraient aussi intéresser les grandes entreprises comme la Sonatel, la Sones, la Senelec, etc., et aussi les industries. Qui aujourd’hui font du crédit en leur sein, sans avoir l’expertise. ‘’Nous leur disons que ce n’est pas leur métier de faire du crédit. Le crédit, c’est la banque qui doit le faire. Ce qu’on peut faire c’est reprendre leur portefeuille et leur donner les ressources nécessaires pour leur permettre de se focaliser sur leurs métiers de base. Le fonds de roulement est un moyen très facile de savoir la viabilité d’une Pme. Nous avons appris à connaitre les Pme, à les pousser à venir vers nous et se formaliser et maintenant à les encadrer, les suivre dans leurs activités’’, indique-t-il.

Il convient de noter que la grande majorité des Pme n’ont pas accès aux banques. Le concours de ces dernières au financement des Pme ne représente qu’un peu plus de 15% de leur portefeuille, selon un document de la Bnde donné à la presse à cette occasion. Et la même source souligne que 51% des Pme n’ont pas accès au crédit pour défaut de garantie, 35% pour des dossiers incomplets. Or, ces entreprises font 99% du tissu des entreprises et 25% de leur valeur ajoutée. Au sein de la Bnde, le taux des prêts impayés des Pme représente 1% et les créances douteuses 5%.

Un plaidoyer pour une souveraineté financière de la Bnde

Le Dg de la Bnde a également saisi l’occasion pour lancer un appel pour la mobilisation de plus de ressources pour leur institution. ‘’Une banque nationale doit avoir sa souveraineté financière. Notre grande contrainte c’était d’avoir un support extérieur qui peut nous aider à nous mettre à niveau.  Si nous voulons développer des emplois, nous sommes obligés d’aller vers l’industrialisation et celle-ci ne peut se faire qu’avec des ressources longues. Pour qu’une entreprise puisse investir et être solidement gérée, il faut des ressources au moins pour 10 ans. On ne doit allouer à une entreprise un crédit sur 5 ans’’, soutient-il.

 En effet, d’après Thierno Seydou Nourou Sy, sur cette période, la Pme fait deux ans pour réussir son investissement et les 3 dernières années c’est l’épurer. C’est à la suite qu’elle commence à produire pour payer la banque. ‘’Pour accorder des prêts de cette nature et qui seront concessionnels, il n’y a que l’Etat qui peut jouer ce rôle’’, ajoute-t-il.  

Face à la percée du digital, le Dg de la Bnde admet que les institutions financières ne peuvent pas continuer à travailler en attendant que les clients viennent vers eux. ‘’Dans 3 ou 4 ans, les clients n’auront plus le temps d’aller vers la banque. Il faut trouver des moyens pour que le client puisse à partir de chez lui, entrer dans sa banque et faire ses opérations’’, signale-t-il.

Toutefois, M. Sy pense qu’il faut être prudent dans la digitalisation. Car, il y a deux approches. Il s’agit de ‘’full digitalisation’’ (digitalisation complète) ou celle partielle en mettant l’accent sur les moyens de paiement. ‘’L’approche la plus prudente, c’est d’aller vers la digitalisation des moyens de paiement. Lorsqu’un client doit faire un virement, un transfert, un paiement, avoir le solde de son compte qu’il le fasse à partir de chez lui. La digitalisation sera demain une compétition importante. Donc, faut y aller, mais avec prudence. Nous avons le budget’’, poursuit-il.

MARIAMA DIEME

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