Publié le 19 Nov 2017 - 00:39
FINANCEMENT DE LA SANTE

Le chef de l’Etat promet de porter le budget à 15 %

 

Le président de la République a décidé, hier, de porter le budget de la Santé à 15 %, dans un délai raisonnable. Il attend, en retour, des résultats, en plus de savoir où va l’argent de la santé.

 

Le Forum national de plaidoyer pour la mobilisation de ressources sur le financement de la santé a été lancé. Le chef de l’Etat en a profité pour faire un mini-bilan des initiatives de la Couverture maladie universelle. ‘’Nous avons les initiatives de gratuité qui ont permis la prise en charge de plus de 7 millions de cas des moins de 5 ans, entre 2015 et 2017 ; de 314 000 cas de personnes âgées de 60 ans ; et plus de 11 000 bénéficiaires de la césarienne. Nous avons aussi appuyé plus de 20 500 personnes dans le cadre des programmes d’autonomisation des groupes vulnérables’’, a-t-il dit.

Ces quelques résultats, selon le président Macky Sall, témoignent de l’adhésion aux initiatives internationales en matière de santé, en particulier la résolution de l’Organisation des Nations Unies du 12 décembre 2012 en direction de la couverture sanitaire universelle.

Cependant, le chef de l’Exécutif a souligné qu’il faut renforcer les acquis, en mettant en place un dispositif de financement permettant de lever les contraintes majeures. Parmi ces contraintes, il cite la faiblesse des ressources consacrées à la santé.  ‘’Nous y arriverons, les 15 %, mais il faudra voir aussi où va l’argent de la santé. Nous ne pourrons pas éviter cet exercice, parce que c’est un exercice de transparence et d’efficience. Autant vous pouvez compter sur moi sur la mobilisation davantage de ressources en faveur du secteur de la santé, autant il faudra compter sur moi pour l’exigence de résultats attendus par rapport à la qualité des soins dans les établissements de santé’’, a-t-il prévenu.

‘’Avec la hausse continue des budgets, il sera difficile, pour notre gouvernement, de supporter une ressource propre, uniquement à ce rythme de dépenses, si un plan approprié de financement n’est pas mis en place. D’où l’impératif d’inscrire la stratégie de financement de la santé dans le cadre d’une évolution raisonnable et raisonnée de dépenses’’, a-t-il préconisé. Sur ce, le président de la République a engagé le gouvernement à prendre des dispositions nécessaires afin d’obtenir une progression régulière du budget en vue d’atteindre, dans un délai raisonnable, les 15 %. ‘’Nous fixerons la date, après étude et calculs. Il s’agira aussi de garantir la soutenabilité des initiatives de gratuité et le développement de l’assurance maladie’’, a-t-il fait savoir.

‘’Nous ne sommes pas un régime communiste, tout ne peut pas être gratuit’’

L’autre souci évoqué par le président Macky Sall est la non-soutenabilité, à terme, des initiatives de gratuité. Parce que, dit-il, tout ne peut pas être gratuit, sinon les hôpitaux ne vont plus fonctionner. ‘’Il faut que les gens arrêtent de penser que tout doit être gratuit. Il faut une rationalisation de ces initiatives. Les 0-5 ans, on ne va pas renoncer, au contraire, c’est une période charnière de la vie de l’enfant. Les plus de 60 ans, c’est le plan Sésame, il faut continuer. Mais, parallèlement, il faut développer l’assurance maladie et les mutuelles de santé pour que ceux qui sont entre 5 et 60 ans puissent bénéficier le maximum d’une couverture maladie’’, a-t-il suggéré.

‘’Nous ne sommes pas un régime communiste. Le communisme n’a réussi nulle part. Le tout gratuit n’existe nulle part. Donc, il ne faut pas que, dans notre schéma de financement, on nous parle de plan Marshal. Il faut être conscient que l’Etat doit faire des efforts, les collectivités locales de même, le secteur privé doit poursuivre ses efforts, parce qu’il fait déjà des efforts, mais il faut les accompagner. Parce que tout ne peut pas être pris en charge par le secteur public’’, fait-il remarquer. Le chef de l’Etat ajoute : ‘’Je suis un adepte de la protection sociale, de la solidarité. Mais il faut absolument que public et privé travaillent de concert, pour nous permettre d’atteindre nos objectifs de soins pour tous et de qualité de soins.’’

Au demeurant, il a décidé que le Programme d’urgence de développement communautaire (Pudc) prenne en compte, dans sa phase II (2018-2019), la construction de 300 postes de santé. ‘’La problématique du financement de la santé est cruciale. C’est une question complexe et difficile à maitriser, dans le long terme. Sa prise en charge nécessite une planification budgétaire efficace, un réajustement perpétuel et l’engagement de toutes les parties, dans un cadre concerté et harmonisé’’.

‘’La Cmu ne saurait être une variable d’ajustement pour les hôpitaux’’

De l’avis de Macky Sall, il y a une nécessité absolue de maitriser le système de paiement de la Couverture maladie universelle (Cmu). Parce que celle-ci ‘’ne saurait être également une variable d’ajustement pour les hôpitaux ou les centres de santé. Il faut que cette question soit claire, sinon nous allons la tuer. Parce qu’il y aura une évolution exponentielle des dépenses que l’Etat ne saurait tenir, ni soutenir’’, prévient-il. Il faut, donc, plaide-t-il, un système dématérialisé. C’est-à-dire, lorsqu’une famille X, dans une localité Y, va au poste de santé, il faut qu’il y ait un dispositif informatisé qui permette, tout de suite, d’enregistrer cet enfant examiné pour une telle maladie.

‘’Cela doit être tracé. Si ce n’est pas tracé, le chef de poste va dire qu’il a vu 70 enfants par jour. Mais qui va payer cet argent ? Pour la transparence du système de couverture maladie, à terme, l’agence de la Cmu ne doit pas être logée au ministère de la Santé. Parce que, là, vous êtes juge et partie. Vous ne pouvez pas donner les soins et vous-même vous faire payer. Ce n’est pas possible’’, a-t-il décidé. Il estime qu’il faut un système de traçabilité afin de pouvoir continuer à apporter les ressources nécessaires dont a besoin la Cmu.

Le chef de l’Etat veut donc, à partir de 2018, quand la mobilisation sera forte, sortir l’agence de la Cmu de la tutelle de la Santé et la mettre dans un autre ministère ou à la primature. Tout en continuant de travailler étroitement avec le ministère de la Santé, parce que les deux sont liés.  ‘’Je suis à vos côtés, mais je serai très exigeant.  Il y a l’adage qui dit : ‘’Qui paie commande.’’ Quand on vous donne de l’argent, vous devez nous dire qu’est-ce que vous en avez fait. C’est valable pour tous les secteurs. Nous n’allons pas faiblir les efforts engagés, au contraire. Mais ils iront avec l’exigence de résultats. Le gouvernement du Sénégal sera pleinement engagé, non seulement dans la mobilisation de ressources domestiques, mais également dans la transparence des ressources mises à la disposition de notre pays’’. 

VIVIANE DIATTA

Section: