Publié le 16 Mar 2019 - 05:34
INTERNET, UTILISATION ABUSIVE DES SMARTPHONES…

Ces ennemis qui menacent la croissance biologique de l’enfant

 

Avec l’avènement du net et des smartphones, toutes les habitudes ont changé dans certaines familles. Les enfants ont une durée de sommeil très courte. Selon le Pr. Amadou Gallo Diop, spécialiste en neurologie, les conséquences immédiates de ce manque de sommeil et de l’utilisation jusqu’à des heures tardives des téléphones portables ne sont rien d’autres que le ralentissement du développement biologique chez l’enfant et, plus tard, ils seront assujettis aux maladies chroniques telles que le diabète.

 

Nouveau modèle de consommation mondiale, le smartphone est devenu un outil indispensable. Tout ou presque peut se faire avec. Aujourd’hui, au Sénégal, comme ailleurs dans le monde, chacun peut s’en procurer. Et même les enfants. Du coup, le smartphone devient, par la même occasion, le meilleur cadeau qu’un parent peut offrir à son enfant qui a réussi un très bon premier semestre. Ce n’est plus le chocolat chaud ou les livres de dessins animés. Il faut un smartphone ou rien. Conséquences ou effets immédiats : les enfants restent connecter 24 heures/24.

Chez lui, dans le bus, en classe pendant les récréations… l’enfant a les yeux rivés sur son téléphone portable. Il tchate comme bon lui semble. De retour de l’école, c’est pratiquement la même scène qui se dessine. Ce dernier n’a presque pas le temps pour souffler et reposer son esprit. A l’heure d’aller au lit, il est encore sur son smartphone. Parfois, certains écourtent leur sommeil pour surfer sur le net.

D’après le Pr. Amadou Gallo Diop, tout ceci engendre des conséquences néfastes sur la santé de l’enfant. Pire, ajoute-t-il, cela peut concourir à freiner son développement biologique. ‘’Les enfants ne dorment plus assez, du fait de tout le temps qu’ils passent sur le net. Ils n’ont plus le temps pour jouer ou respirer. Ce n’est plus le cas. Un enfant a besoin de beaucoup d’activités ludiques. Mais pas forcément de téléphone portable. Il a 10 ans. Quand il descend de l’école, on lui demande de faire ses devoirs jusqu’à 23 h. A minuit, il va au lit. Ses parents le laissent dans sa chambre avec son cellulaire. Et pendant ce temps, il en profite encore pour surfer sur Internet jusqu’à 2 h du matin et à 6 h, il se lève pour retourner à l’école. Ce manque de sommeil peut freiner sa croissance biologique. C’est extrêmement dangereux’’, avertit le docteur en sciences neurologiques. Qui invite les parents à ‘’résister et à ne pas fournir’’ de téléphones aux enfants.

‘’Dormir sous Wifi est extrêmement dangereux’’

Le Pr. Amadou Gallo Diop, qui prononçait avant-hier la leçon inaugurale de l’amphi de rentrée de l’Université de Thiès sous le thème ‘’Le temps de l’école, le temps de la société, le temps du cerveau : les calendriers académiques sont-ils adaptés au rythme biologique ?’’, pense que l’heure est venue de mettre un terme à cette pratique qui nuit à la santé de l’enfant. Il recommande, ainsi, à ce que le cycle de sommeil de l’enfant soit bien respecté, afin de déclencher un meilleur processus neurobiologique.

‘’La nuit est faite pour dormir, que ce soit pour l’enfant et n’importe quel apprenant. Les choses vues et entendues pendant le jour sont mémorisées la nuit. La nuit, nous dormons profondément, mais le cerveau travaille de manière intense. Les ongles poussent la nuit. Les plaies se cicatrisent la nuit. Donc, un enfant qui vient de naître à 100 mille neurones. Entre 0 et 10 ans, le développement de son cerveau se fait de façon fulgurante. C’est pour vous dire que le sommeil est fondamental chez l’enfant. Il répare tout’’, insiste le professeur de médecine.

Dans certaines familles, les enfants dorment avec le Wifi allumé. Pour le spécialiste en neurologie, c’est un danger permanent. ‘’Dormir sous Wifi est extrêmement dangereux. Parce qu’il comporte des effets magnétiques, tout comme le téléphone portable’’, alerte le Pr. Amadou Gallo Diop. Aussi, le docteur en sciences neurologiques demande-t-il aux parents d’éviter d’installer des téléviseurs dans la chambre des enfants. Sur ce cas précis, il révèle que cela va leur permettre d’écourter leur sommeil pour regarder leurs séries préférées jusqu’à des heures tardives de la nuit. ‘’La durée minimum d’un sommeil est de 6 heures de temps. L’enfant a besoin de plus. L’adolescent a besoin entre 8 et 9 heures de sommeil. L’adulte entre 6 et 8 heures. Mais, parfois, les enfants dorment moins de 6 heures. C’est un drame’’, se désole-t-il.

Dette de sommeil = maladies comme le diabète

Poursuivant sa communication devant un auditoire essentiellement composé d’élèves et d’étudiants, le spécialiste en neurologie a invité les parents à favoriser un sommeil de qualité aux enfants. Car, informe-t-il, la dette de sommeil peut se payer de façon très chère. A court terme, celui-ci est confronté à une fatigue et à des maux de tête incessants. A long terme, le Pr. Amadou Gallo Diop soutient que l’enfant peut développer des maladies chroniques telles que le diabète. ‘’Je suis scandalisé de voir ou d’entendre à 3 h du matin des tentes avec de la sonorisation pour empêcher aux enfants et même aux apprenants de dormir. Les enfants qui n’ont pas un sommeil de qualité vont tout droit vers l’échec. Ce sont eux qui redoublent. Vous voyez, pendant le jour, des enfants dormir dans les bus. C’est parce qu’ils n’ont pas dormi la nuit. Nous cherchons toujours à plaire à l’Occident ou à l’Orient. Ils ont entre les mains des tablettes et des smartphones. Alors, ils se rattrapent le jour. C’est extrêmement dangereux. Parce que, plus tard, ils auront des difficultés neurobiologiques’’, confie le spécialiste.

Toujours dans son plaidoyer, le Pr. Amadou Gallo Diop recommande aux parents de veiller davantage à l’éducation de leurs enfants. Sinon, dit-il, ils ne vont pas hésiter à goûter au plaisir érotique. ‘’Selon une étude, 35 % des vidéos visualisées via les cellulaires sont des pornos. Aux parents d’y veiller pour épargner à leurs enfants ce plaisir érotique’’, conseille-t-il.

Abordant la problématique des enseignements-apprentissages qui, selon lui, doivent être en adéquation avec l’organisation sociale du Sénégal, le Pr. Gallo Diop indique que l’heure a sonné pour se départir de certains modèles d’enseignements en cours dans les écoles préscolaires, élémentaires, moyennes, secondaires et universités du pays.   ‘’Nous ne pouvons plus continuer à dispenser des enseignements lourds, compliqués en 13 ou seulement 14 heures. Nous ne sommes pas des chauves-souris ou encore des hiboux. Nous ne sommes pas non plus des animaux nocturnes’’, affirme le Pr. Diop.

Avant de finir son cours inaugural, le spécialiste en neurologie a souligné qu’il est important de parvenir à un couplage du temps de l’école avec enseignements et contrôles, mais aussi et surtout en suivant le rythme et la santé. ‘’Le temps de l’école doit être adapté aux enseignements et contrôles. Au bout de deux heures d’enseignement, il faut observer une pause ou créer quelque chose de ludique pour reposer le cerveau’’, avertit le Dr Amadou Gallo Diop.

Se réjouissant de la présentation du Pr. Diop, le recteur de l’Université de Thiès, Ramatoulaye Diagne Mbengue, a dit toute sa disponibilité pour perpétuer cette tradition ‘’déjà ancrée au sein de l’institution universitaire’’, pour le bonheur et le bénéfice de tous les étudiants.

GAUSTIN DIATTA (THIES)

 

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