Publié le 21 Sep 2019 - 00:07
ITW- DOCTEUR GÉRARD FAYEMI, PRÉSIDENT DE LA SOCIÉTÉ SÉNÉGALAISE DE FERTILITÉ DU SÉNÉGAL

‘’Dans un couple infertile, à peu près 40 % des causes sont d’origine masculine’’

 

En 2019, alors que beaucoup de couples peinent à éprouver le bonheur d’avoir des enfants, l’aide médicale à la procréation reste très méconnue au Sénégal. Pourtant, le premier bébé né de cette pratique devenue courante dans la médecine moderne a vu le jour dans le pays depuis 1989. Près de deux décennies après, le bilan reste mitigé. Engagé depuis 2006 pour renverser la tendance, docteur Gérard Fayemi, spécialiste en gynécologie obstétrique, par ailleurs Président de la Société sénégalaise de fertilité du Sénégal (Fiv Sénégal) depuis 2017 et Chef d’antenne du Gieraf, dissèque avec ‘’EnQuête’’ les enjeux de cette pratique, les causes de l’infertilité, le défaut de législation… Entretien !

 

A quel moment un couple est-il déclaré infertile ?

La définition donnée par l’Oms de l’infertilité est l’incapacité d’obtenir une grossesse clinique, après douze mois de rapports sexuels réguliers sans précaution. Donc, un couple jeune est déclaré infertile, lorsqu’il reste au maximum 14 mois sans grossesse, avec un rythme de rapports sexuels qui est de 3 par semaine. Le problème que nous avons, c’est lorsqu’il y a infertilité, les couples consultent tardivement le spécialiste. Or, plus on attend, plus la difficulté est grande. Parce que la femme, à un certain âge, ne peut plus concevoir, et le vieillissement du sujet entraine également le vieillissement de tous les organes de fertilité, notamment la réserve ovarienne.

A partir de 35 ans, les chances de grossesse diminuent et ça devient véritablement difficile, à partir de 40 ans. A cet âge, la qualité des ovocytes est moins bonne. Donc, plus on fait des grossesses tard, moins on a des chances de faire des grossesses à terme. Ce qui nous intéresse, nous acteurs de la Pma, c’est surtout l’achèvement de la grossesse. Il faut qu’on puisse aller au bout de notre démarche et celle-ci consiste à donner au couple un enfant.

Au moins 8 millions de bébés seraient nés de l’aide médicale à la procréation dans le monde. Quarante ans après le premier, né en 1978, où en est le Sénégal ?

L’assistance médicale à la procréation constitue, avant tout, une méthode de laboratoire. Elle regroupe les différentes techniques qui permettent à un couple infertile d’obtenir une grossesse, en favorisant le plus souvent des milieux biologiques. La rencontre entre les gamètes mâles et femelles donne lieu à la fécondation. L’induction de l’ovulation et l’insémination intra utérine sont des techniques de l’Amp qui font moins appel au laboratoire comparées au transfert d’embryon (ou fécondation in vitro - Fiv) et la micro-injection intra cytoplasmique (Ecsi) qui sont des techniques de laboratoire.

Pour ce qui est du Sénégal, le premier bébé éprouvette est né des mains des docteurs Youssoupha Diallo et Aly Diab de la clinique du Cap, en 1989. Mais devant l’ampleur du phénomène et la difficulté que les couples avaient à procréer, on s’est rendu compte, avec le Dr Sibi, qu’un seul centre (la clinique du Cap) ne suffisait pas. Nous avons ainsi commencé à nous interroger sur l’opportunité de créer un deuxième centre pour augmenter le volume de ce que nous pouvons apporter aux couples.

C’est en 2006 que nous avons pris conscience du problème de l’infertilité au Sénégal. Plusieurs études avaient été faites et ont montré que dans leurs consultations quotidiennes, les gynécologues sont confrontés à un pourcentage de 18 à 20 % de couples infertiles. C’est ainsi que nous nous sommes lancés dans l’aide médicale. Le problème qui se posait était de savoir quelles solutions apporter à ces couples en demande de fertilité. Nous avons commencé par des inséminations avec le sperme du conjoint. On a commencé avec quelques succès, avec des grossesses, mais le processus était un peu difficile et lent, comme c’est le cas pour tout début. C’est après qu’on a décidé de passer à la deuxième étape qui consistait à faire de la fécondation in vitro. La Fiv consiste à prélever un gamète femelle et de le mettre en contact avec le gamète mâle, le spermatozoïde. Il s’ensuit une fécondation, un développement embryonnaire et enfin le transfert de cet embryon chez l’utérus.

Comment évaluez-vous vos résultats, depuis 2006 ?

De 2007 à 2017, quatre cents patients ont été consultés avec un nombre de grossesses égal à 154. En réalité, les premiers bébés sont apparus en 2009. Disons que les résultats étaient un peu mitigés, au début. C’est après qu’on a commencé à se demander si on n’aurait pas de meilleurs résultats avec l’Icsi (l’Intra Cytoplasmic Sperm Injection) qu’avec la Fiv. A la différence de la Fiv où les deux gamètes sont mis simplement en contact, ici il y a l’Icsi qui consiste à injecter à l’intérieur de l’ovocyte le spermatozoïde qui était préalablement sélectionné. Ce sont des techniques de laboratoire. Vous avez un milieu de culture qui permet à l’ovocyte de se préparer et on prélève le ou les spermatozoïdes qui semblent les plus compétents. Ce n’est pas une question de nombre, mais de mobilité, de vitalité, et surtout maintenant avec l’Imsi, de morphologie.

L’Intra Morphology Sperm Injection (Imsi) est une technique de laboratoire qui, avec un microscope à très fort grossissement, permet de voir quel est le spermatozoïde qui a la forme la plus apte. Elle se base sur les caractéristiques morphologiques du sperme, donc il permet de sélectionner le spermatozoïde le plus apte morphologiquement. Une fois que l’injection est faite à l’intérieur de l’ovocyte, on observe le développement cellulaire et on a, au final, le blastocyste qui se développe au 5e jour. C’est l’embryon qui a déjà montré ses aptitudes de se développer et qui donne les meilleurs résultats en termes de procréation. C’est cet embryon-là qui, une fois sélectionné, est mis à l’intérieur de l’utérus dans les meilleures conditions. Et aujourd’hui, on a des résultats qui sont significatifs. Le nombre de grossesses qu’on a eu qui est le taux de grossesse par tentative au Sénégal tourne autour de 26,29 %. Ce qui est un taux tout à fait honorable. Bien sûr, il y a des pays qui ont des taux beaucoup plus importants, notamment le Burkina Faso et le Cameroun, mais parce que simplement, ils évoluent sur un plus grand volume.

Comment expliquez-vous ce déficit de résultats au Sénégal, comparé aux autres pays de l’Afrique ?

La première explication reste le cadre juridique. L’Amp n’est pas légiférée au Sénégal. Il faut que les pouvoirs publics nous accompagnent. Le Mali, qui est plus proche de nous, a une loi qui permet de travailler en toute sérénité et technicité. Nous travaillons de façon informelle, pour ne pas dire clandestine. A notre niveau, ce que nous devons faire, c’est de faire en sorte que la technique de l’assistance à la procréation soit plus connue. Que le plus grand nombre de personnes susceptibles de bénéficier de cette technique soit informé. L’autre explication, c’est l’accessibilité des couples à cette technique. Il y a un double obstacle à ce niveau. D’abord, les gens ne sont pas suffisamment informés ; ensuite, cette technique coute cher.

A la rentrée, on aura l’occasion de demander une audience au ministre de la Santé pour le sensibiliser par rapport à cette situation des couples qui ne peuvent pas accéder à cette technique à cause du coût. Il faut que nous fassions un effort commun pour diminuer cette cherté du traitement qui est essentiellement due à l’utilisation de certains produits biologiques, sur lesquels pèsent des taxes élevées, ainsi que le prix des médicaments. Les doses et les quantités utilisées de ces médicaments sont telles que le coût peut aller jusqu’à 2 millions et c’est beaucoup pour des couples généralement jeunes et qui n’ont pas de gros moyens. Ce qui fait qu’on peut considérer qu’à peu près 50 % des couples qui ont un besoin de traitement d’infertilité par les techniques de Pma ne peuvent pas y accéder, faute de moyens. Un autre problème qui est purement social, c’est qu’il faut que les couples qui sont en demande de fertilité consultent tôt le spécialiste.

Quelles sont les causes de l’infertilité ?

Dans un couple infertile, à peu près 40 % des causes sont d’origine masculine, 40 % d’origine féminine et 20 % des causes sont inexpliquées. Et dans la majeure partie des cas, ces causes sont liées à des processus infectieux, que ce soit du côté féminin comme du côté masculin ; c’est-à-dire des infections de longues durées mal traitées qui font que les couples se retrouvent dans ces difficultés-là. Il est important d’impliquer tout le corps médical. Bien entendu les sages-femmes sont en première ligne dans les consultations, leur rôle étant extrêmement important.

En ma qualité de président de la Société sénégalaise de fertilité, il faudra qu’un jour on organise une formation pour toutes les sages-femmes, surtout pour celles qui sont dans les réseaux et responsables d’unité de périphérie, afin qu’elles puissent, très rapidement, détecter les couples infertiles, faire les premiers bilans et les premières orientations diagnostiques. Et puis après, il faut savoir référer la difficulté que nous avons. C’est que, souvent, les couples sont mal dirigés et l’attente est trop longue. La réorientation vers un acteur de l’Amp se fait mal ou ne se fait pas du tout. J’ai vu un couple qui est resté sept ans infertile. Quand j’ai demandé à l’homme son spermogramme, j’ai été choqué de savoir qu’il ne connaissait pas ce que c’était. Ce qui montre la faiblesse dans notre système à véhiculer la bonne information et surtout à prendre en charge les couples infertiles au bon moment.

N’est-ce pas là une preuve que la stigmatisation de la femme dans nos sociétés est bien réelle ?

Dans notre société, les femmes sont à la limite ostracisées et c’est intolérable. Pour le cas de ce couple, pendant sept ans, la femme a fait un certain nombre de bilans qui ont montré qu’elle n’avait rien. Pendant que le mari ne connaissait même pas le spermogramme. J’ai eu un autre cas où le mari refusait catégoriquement de faire un spermogramme. Je l’ai convaincu à en faire et ils ont eu des jumeaux après quatre ans de mariage et un traitement unilatéral.

Mais les hommes commencent à comprendre qu’eux aussi peuvent être facteurs d’infertilité dans le couple. Tout à l’heure, je vous ai dit qu’on a commencé avec les inséminations avec le sperme du conjoint, ce qu’on appelle l’Iac. Ce qui consiste, à partir du moment où la femme n’a pas de problèmes particuliers, à préparer le sperme et à le rendre apte à féconder. On déclenche l’ovulation et une fois que c’est fait, il est important d’inséminer dans les vingt-quatre, trente-six heures qui suivent. Vous voyez donc que ce sont des indications d’infertilité d’origine masculine.

Il y a quatre critères fondamentaux pour avoir un sperme de qualité : la cytologie du sperme, la mobilité, la vitalité et la numération. La défaillance d’un de ces critères est à l’origine de l’infertilité de l’homme. Il y a l’azoospermie, c’est-à-dire que, dans le bol spermatique, il n’y a pas de sperme pour plusieurs raisons : les testicules ne fabriquent pas de spermatozoïdes qui soient disponibles dans l’éjaculation. Et dans ce cas-là, l’Amp consistera à aller chercher les spermatozoïdes là où ils sont fabriqués par une biopsie testiculaire pour tout de suite les congeler et les rendre disponibles le jour où on aura eu une préparation de la femme. L’asthénospermie, c'est lorsque les spermatozoïdes ont une mobilité et une vitalité insuffisante, entre autres causes d’infertilité masculine…

Bien que le choix des différentes techniques de l’Amp ne soit pas précisé dans les articles de la loi sur la santé de reproduction, le respect de l’éthique et des bonnes mœurs revient dans le règlement. Que faites-vous du don de gamètes qui est une des techniques d’aide à la procréation ?

Vous savez, le don se fait de façon anonyme et en toute confidentialité. Je ne peux pas garantir dans notre pays la confidentialité d’un don. Le jour où, dans un laboratoire, on se rend compte qu’une grossesse x ou y est obtenue avec l’ovocyte de quelqu’un d’autre, il y aura des conflits. Alors qu’en Côte d’Ivoire, au Cameroun, au Mali, ces techniques se font. Et c’est tellement sécurisé et encadré que le donneur ne se voit pas. Le principal critère du don, c’est l’anonymat. Il y a aussi parmi ces techniques de l’Amp qui posent encore un problème éthique et qui sont encore trop loin de nos réalités : la grossesse pour autrui qui n’est même pas autorisée en France. Il existe aussi les dons d’embryons qui sont répertoriés et vitrifiés (congelés à très basse température, à peu près à moins 196 degrés). Cette congélation permet de conserver à la fois les ovocytes et les paillettes de sperme. Nous le faisons en toute légalité.

Parfois aussi, quand il y a super-ovulation et qu’on obtient trois à quatre embryons de bonne qualité, on en place deux dans l’utérus et en garde deux. Les deux embryons donnent naissance à des jumeaux. Et puis, quand le couple n’en veut plus, il demande de décongeler les embryons surnuméraires. Le médecin peut demander leur permission pour les donner à un couple qui en a besoin. Mais, à notre niveau, ce que nous faisons, c’est que nous insistons sur des problèmes d’infertilité liés simplement à l’éloignement géographique. Nous demandons le plus souvent à la femme qui est ici, que son mari émigré vienne donner son sperme afin que ça soit congelé. La femme est ainsi préparée, on décongèle le sperme de son mari pour la féconder, que ça soit par l’Icsi, la Fiv ou l’Iac.

Vous comprenez donc que c’est le sperme du conjoint, mais pas du donneur. C’est ce qu’on appelle la fécondation décalée, du fait que le mari ou la femme ne soit pas disponible. Ce qui est très fréquent au Sénégal et qui est facteur d’infertilité. 

Est-ce qu’il y aurait une différence entre un enfant né de l’Amp et un enfant né naturellement ?

On est en train de mener une étude qui a été initiée par docteur Moreira, l’un des acteurs de l’Amp. Il avait émis l’idée de faire faire une thèse sur le devenir des enfants nés après Amp. Le recul que nous avons n’est pas suffisant pour faire une évaluation globale sur un chiffre qui soit statistiquement valable. Mais la même étude faite dans d’autres pays montre que les enfants nés de l’Amp sont aussi normaux que ceux nés naturellement. Il faudrait qu’on en fasse au Sénégal, et même au niveau du Gieraf.

Parlons de la formation et de la qualification. Un peu partout dans la capitale, des structures de santé pratiquent l’Amp. Vu qu’il n’y a pas de cadre juridique, sont-elles autorisées à en faire ?

Malheureusement, comme ce n’est pas encadré, tout le monde fait ce qu’il veut. C’est dommage et ça entraine une confusion qui fait que les gens ne savent plus à qui s’adresser. Je fais appel à une vigilance pour savoir quels sont les acteurs de l’Amp. Nous sommes une dizaine d’acteurs dans ce pays. C’est impossible de faire une Fiv sans avoir accès à un laboratoire. Nous travaillons avec le laboratoire Bio24 qui est la référence au Sénégal. Quelle que soit la technique de l’Amp, il faut un support biologique. Ensuite, ce qui est important, et en tant que président de la Société sénégalaise de fertilité, je ne prends en compte que des médecins qui ont subi une formation diplômante. Les autres sont des sympathisants qui viennent assister et s’informer.

Au sein de cette société que je préside, nous ne sommes pas plus d’une dizaine à avoir fait une formation diplômante. L’aide médicale à la procréation est devenue un terme galvaudé, malheureusement, un terme à la mode. Tous les leaders d’Amp sont adossés à un laboratoire. Au Cameroun, il y en a au moins trois. Il serait bon que dans une ville comme Dakar, qu’il y ait au moins trois centres et puis trois autres centres à Kaolack, Ziguinchor et Saint-Louis. Les gens pourraient s’arrêter dans ces capitales régionales. Mais à condition que nous nous donnions comme critère la qualité. Il existe le Gieraf, le Groupement interafricain de recherche et d’application sur l’infertilité dont je suis le représentant au Sénégal et qui regroupe quinze pays. Il a des critères de sélection et de reconnaissance de ses membres. Tous les acteurs de l’Amp doivent avoir au niveau de la Gieraf une formation diplômante.  Aussi, tous les centres d’Amp doivent avoir la labélisation du Gieraf.

En tant qu’acteur, quel plaidoyer faites-vous pour que l’Amp soit plus connue ?

Premièrement, faire en sorte que l’Amp se diffuse. Que les gens soient mieux informés, que les acteurs soient mieux formés. Que l’information soit donnée à qui de droit. Deuxièmement, il est important que le couple infertile se fasse consulter tôt. Le réel problème, c’est que les couples consultent tard. Et quand le vieillissement ovarien s’installe, les chances de grossesse diminuent. Aussi, les personnes-ressources que sont nos sages-femmes doivent être informées et formées. Ensuite, les médecins généralistes qui doivent très rapidement identifier les causes d’infertilité et doivent pouvoir référer à temps.

Il y a également le coût. C’est pour cela que nous nous orientons vers d’autres solutions, notamment en ce qui concerne les médicaments et les produits biologiques. Il n’est pas normal que des médicaments soient vendus trois fois plus cher que dans le pays fabricateur. Il faut que les pouvoirs publics nous aident sur la diminution du prix et aussi à légiférer pour que nous puissions bénéficier d’un cadre légal d’exercice, afin de travailler dans de bonnes conditions. La mise en place d’un plan national de l’infertilité, basé sur la prévention et la sensibilisation. Il ne faut plus que les femmes infertiles soient ostracisées, stigmatisées. C’est terrible. Que la société puisse les libérer, parce que l’infertilité n’est pas une tare. Il faut aussi que les sociétés d’assurance, qui prennent en charge ces couples infertiles, sachent que l’infertilité n’est pas une fatalité, ni une tare.

Et qu’il n’est pas normal qu’on refuse de prendre en charge un spermogramme ou un bilan hormonal. Des situations paradoxales où un couple est sanctionné, parce qu’il est infertile, sanctionné, parce que tous les bilans qu’il va faire, il les paie de sa poche. Les bilans d’infertilité doivent être pris en charge par les sociétés d’assurance. Ces couples sont dans le désespoir et dans une double souffrance de ne pas pouvoir avoir un enfant et de devoir payer tous les bilans d’infertilité que leurs médecins leur prescrivent, avant d’aller payer le bilan d’Amp lui-même. Enfin, qu’à travers les réseaux sociaux, qu’on puisse établir un groupe de femmes qui se partagent leurs expériences.

Fatma Mbacké

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