Publié le 23 Mar 2020 - 19:57
LE SÉNÉGAL FRANCHIT LA BARRE DES 50 CAS

Abdoulaye Diouf hausse le ton

 

La situation du coronavirus se complique au Sénégal, surtout avec la transmission communautaire. Il s’y ajoute le refus du respect des mesures de prévention et des interdictions de rassemblement. Le ministre Abdoulaye Diouf Sarr prévient que l’État restera ferme et demande à tous les leaders de prendre leurs responsabilités.

 

‘’Aucune tolérance ne sera permise dans l’application des mesures déjà arrêtées’’. Ce sont les paroles fermes lancées, ce samedi, par le ministre de la Santé et de l’Action Sociale, face à l’entêtement de certains citoyens qui refusent de respecter les consignes. Abdoulaye Diouf Sarr et ses agents exhortent chaque Sénégalais au strict respect des consignes de prévention. ‘’Le virus est bien là, il faut que les mesures soient appliquées’’, a martelé Abdoulaye Diouf Sarr qui faisait le point sur la RTS.

Dans un premier temps, la stratégie a consisté à rassurer les populations, en leur disant que c’est une grippe. ‘’Il faut leur dire que ce n’est pas une maladie honteuse. Il faut leur dire que le taux de létalité n’est pas très élevé, mais c’est une maladie qui peut aller très vite et qui peut pousser la personne à des situations de détresse respiratoire. Nous rassurons les populations et leur demandons de se déclarer et de ne pas fuir, dans certaines situations, comme ce qui s’est passé samedi’’, explique le ministre.

L’autre élément, dit-il, est que si la population à la base se comporte de cette manière, c’est que le portage par les leaders n’est pas suffisamment bien assumé. C’est pourquoi il lance un appel à l’ensemble des leaders, en leur demandant d’assumer toutes les responsabilités, parce que les masses les regardent et les suivent. ‘’C’est à vous de prendre quelque part vos responsabilités et de relayer la bonne information, de ne pas avoir l’avis qui consiste à dire que la maladie n’existe pas ou à faire percevoir que ce n’est pas une menace. Mais nous demandons aussi aux leaders de tout bord d’assumer leurs responsabilités, en donnant à l’opinion la vraie mesure à tenir’’, dit-il.

À son avis, il y a des mesures de portée individuelle et des mesures collectives. ‘’Les mesures individuelles sont très importantes, mais j’insiste sur le comportement collectif. À ce niveau, il faut absolument être vigilant et ne permettre aucune tolérance, parce que la propagation est plus rapide dans le comportement collectif. C’est-à-dire tout ce qui existe comme rassemblement, la circulation, entre autres’’, fait-il savoir.

‘’On est responsable de soi-même et des masses qui sont derrière nous’’

S’agissant des rassemblements et des prières dans des mosquées, vendredi dernier, le ministre s’est voulu ferme. ‘’On est responsable de soi-même. On est responsable des masses qui sont derrière nous. J’ai l’habitude de dire quand, généralement, des mobilisations échouent, c’est rarement le fait de la base populaire opérationnelle. C’est souvent parce qu’on n’a pas un véritable général capable de développer un leadership transformationnel qui impacte sur le comportement’’, déclare Abdoulaye Diouf Sarr.

Concernant les cas importés devenus très fréquents, il souligne que le dispositif du contrôle sanitaire aux aéroports est très efficace. À chaque fois, dit-il, qu’un cas est entré malade, il est détecté. ‘’Cela est arrivé à plusieurs reprises. La personne est arrivée avec une température élevée et des symptômes ; le dispositif l’a arrêtée. Mais quand un cas arrive sans que les symptômes ne se déclarent, ni température ni rien, nous ne pouvons que retenir les adresses et faire un suivi. Le dispositif n’est pas un dispositif de détection de la maladie’’, précise M. Sarr.

Les mesures d’arrêter systématiquement sont prises. ‘’Le dispositif est déjà de mise. Aujourd’hui, on ne craint plus l’arrivée des cas importés, mais on gère le stock déjà dans le système, avant que ces mesures d’arrêt ne soient de mise. D’ailleurs, tous les cas que nous avons déclarés, ces derniers jours comme étant des cas importés, ce sont des cas qui sont arrivés au Sénégal, bien avant la mesure. Nous gérons ce stock et essayons de travailler à la main’’, informe-t-il.

Pour ce qui est des compatriotes arrivés d’Europe et du Maroc via la Mauritanie, il rassure qu’ils sont pris en charge par le Comité régional de gestion de l’épidémie de Saint-Louis. Parce que, dit-il, chaque région dispose d’un comité régional de gestion des épidémies présidé par le gouverneur. Il est rattaché au comité national. ‘’Toutes les dispositions sont prises, au niveau de Saint-Louis, pour leur confinement. Nous les suivons le temps d’incubation. Si aucun malade ne se déclare, d’ici là, nous allons les libérer. Mais il est très important d’assurer leur sécurité pour leurs familles d’abord, ensuite, la population de manière générale’’.

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DOCTEUR ABDOULAYE BOUSSO, DIRECTEUR DU COUS

‘’Nous n’avons pas encore de cas grave’’

Cinq régions sont touchées par la pandémie de Covid-19. Selon l’urgentiste, Docteur Abdoulaye Bousso, la situation est sérieuse, mais au niveau de la prise en charge, des sites sont déployés et, pour le moment, ils n’ont pas encore reçu de cas graves.

Le Sénégal est à 67 cas détectés positifs, dont 5 guéris et 62 sous traitement. Ce dimanche, sur 85 tests réalisés, 11 sont revenus positifs. Il s’agit de 6 cas importés et 5 cas contacts suivis. Selon le directeur général du Centre des opérations d’urgence sanitaire (Cous), Docteur Abdoulaye Bousso, les cas sont répartis dans cinq régions : Dakar, Thiès (principalement à Mbour), Diourbel, notamment à Touba, Ziguinchor et Saint-Louis. Actuellement, ils suivent plus de 1 000 contacts, 969 sont déjà sortis de leur liste suivie. Il s’agit de personnes contacts qui étaient liées aux 4 premiers patients. Mais aucun d’eux n’a été contaminé. Pour les cas nouveaux, il rassure que les investigations seront poursuivies, pour enregistrer les cas contacts. Certains ont eu à être contaminés, essentiellement, par des parents proches.

‘’Jusqu’à aujourd’hui, nous avons la chance que nos patients se portent mieux, avec des perspectives de guérison, dans les jours à venir. Nous n’avons pas encore de cas graves, mais il est important que les mesures soient respectées. Car, aujourd’hui, au vu du profil épidémiologique, il faut s’attendre à ce qu’il y ait de nouveaux cas’’, prévient-il.

En effet, selon lui, les effets des mesures qui ont été prises, la limitation des mouvements et la fermeture des aéroports ne seront vus que d’ici une quinzaine de jours.

Pour l’épidémiologiste, les personnes qui sont déjà rentrées sur le territoire, en appliquant la règle de l’incubation de cette maladie, ont jusqu’à 14 jours pour voir si elles sont atteintes ou non. Donc, il faudra s’attendre à ce qu’il y ait de nouveaux cas. Ce qui est important, à son avis, c’est que l’ensemble des structures de santé soient mobilisées, les capacités de prise en charge développées, accentuées et renforcées. ‘’Même les régions ont la capacité de pouvoir prendre en charge des patients. L’ensemble des équipements de protection ont été mis à disposition’’, fait-il savoir.

Trois sites de prise en charge, actuellement

En termes de prise en charge, pour le moment, à Dakar, c’est toujours le Service des maladies infectieuses de Fann et l’extension de l’hôpital de Diamniadio. Il y a aussi l’hôpital régional de Ziguinchor. ‘’Le patient testé positif y est pris en charge. Et nous avons en perspective d’augmenter la capacité au niveau de Saint-Louis, même si le cas a été transféré à Dakar. Nous prévoyons, d’ici à la semaine prochaine, de mettre à l’hôpital régional de Saint-Louis un centre de traitement qui pourra accueillir des patients. Ce sera le cas à Kaolack, avec le service des maladies infectieuses’’, informe l’épidémiologiste.

Au niveau de Thiès, la structure de santé où ont été diagnostiqués les cas, va servir également de centre de traitement. ‘’Nous allons appliquer la même stratégie qu’à Touba, en utilisant un centre de santé qui a déjà eu à recevoir des patients. Autre perspective de prise en charge, la structure privée qui a été donnée par un de nos confrères’’.

Dans la lignée du ministre de la Santé, il invite à une prise de conscience collective. ‘’Nous avons quand même cinq régions qui sont touchées. Nous pouvons dire que le virus est au niveau du pays. Ça amène à la prise de conscience des populations dans le respect des règles qui ont été édictées. Dans le cadre de la stratégie, ce n’est pas des mesures médicales qui vont mettre fin à l’épidémie. Toute la stratégie médicale a été mise en œuvre sur instruction du ministre de la Santé, avec la mise en place des centres de traitement’’.

VIVIANE DIATTA

 

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