Publié le 18 Jan 2021 - 23:37
LUTTE CONTRE LA PANDEMIE DE CORONAVIRUS

Vers l’obligation directe ou indirecte du vaccin 

 

Au niveau des instances internationales, le débat se pose déjà sur l’exigence de la vaccination pour se déplacer entre les pays. Au fur et à mesure que le vaccin sera accessible, les vaccino-sceptiques n’auront bientôt plus le choix, sous peine de se voir restreindre beaucoup de libertés.

    

C’était la semaine dernière. Lors de la sixième réunion du Comité d’urgence du règlement sanitaire international (RSI) sur la Covid-19, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, demandait aux participants ‘’d'accorder une attention particulière à deux questions urgentes pour lesquelles nous sollicitons vos conseils aujourd’hui : la première concerne l’émergence récente de nouvelles souches variantes du Sars-CoV‑2 ; et la deuxième a trait à l’utilisation potentielle de certificats de vaccination et de dépistage pour les voyages internationaux’’.

Ainsi se tiennent, au sein des plus hautes instances internationales, des discussions sur la nécessité de rendre obligatoire la vaccination contre la Covid-19 ou la mise en place de mécanismes nécessitant de disposer d’une certification d’avoir été vacciné avant de se déplacer.

Alors que la deuxième vague de la pandémie fait des ravages partout dans le monde, le scepticisme sur l’utilisation d’un vaccin contre le virus commence à baisser. Face à l’éventualité de voir la maladie durer et bloquer l’économie mondiale dont des secteurs majeurs sont à l’arrêt ou fonctionnent difficilement, l’urgence de la création des conditions d’une reprise est en train de prendre le dessus sur les incertitudes qu’offre un vaccin quelque peu expérimental.

En France, où la campagne de vaccination a débuté, 54 % de Français souhaitent désormais se faire vacciner, selon un sondage réalisé par l’Ifop (Institut français d'opinion publique). Une hausse de 15 points par rapport à un précédent sondage, le 29 décembre. Au niveau de la Commission de l’Union Européenne, c’est l’idée d’un passeport vaccinal pour voyager en Europe qui est de plus en plus agitée.

Si, pour le moment, l’OMS s’est prononcé contre cette éventualité, du fait de la non disponibilité à grande échelle des vaccins, la situation peut beaucoup évoluer, dans quelques mois. Reprise hier par Lemonde.fr, Clément Beaune, Secrétaire d’Etat français aux Affaires européennes, l’a laissé entendre en soutenant : ‘’Quand l’accès au vaccin sera généralisé, ce sera un sujet différent.’’

Au Sénégal, où les stratégies appliquées en France sont souvent dupliquées, le président de la République, Macky Sall, a indiqué, la semaine dernière en Conseil des ministres, ‘’la nécessité d’accélérer la mise en œuvre urgente de la stratégie nationale de vaccination, dotée d’un budget conséquent.’’ Ceci, après avoir reçu du ministre de la Santé et de l’Action sociale une stratégie nationale de vaccination.

Donnant plus de détails à l'Agence France-Presse, le docteur Abdoulaye Ndiaye, Directeur national de la Prévention, a expliqué que le gouvernement se projette ‘’dans un chronogramme (calendrier) qui nous permettra de commencer la vaccination avant la fin du mois de mars. Les personnes âgées de plus de 60 ans, celles présentant des maladies chroniques ou des comorbidités et toute autre population du pays qui, de par ses fonctions, reste exposée’’, référence notamment au personnel de santé, seront les premiers à être vaccinés.

Les ‘’non-dits’’ du régime de gestion des catastrophes naturelles ou sanitaires

Si ces premières cibles répondent à une urgence ‘’purement’’ sanitaire, qu’adviendra-t-il lorsqu’il faudra vacciner toute la population sénégalaise ? Au moment où les différentes théories sur les dangers d’utiliser un vaccin à base d’ARN Messager pullulent, le gouvernement a-t-il voulu se créer un cadre juridique avec l’adoption de la modification sur la loi n°69-29 du 29 avril 1969 désormais relative à l'état d'urgence, à l'état de siège et à la gestion des catastrophes naturelles ou sanitaires ?

En plus d’instaurer un régime de ‘’Gestion des catastrophes naturelles ou sanitaires’’, cette modification a introduit deux nouveaux points dans la loi 69-29. L’article 24 modifié dispose : ‘’En cas de survenance de catastrophes naturelles ou sanitaires, il est donné, à l’autorité administrative compétente, sans que ne soit proclamé l’état d’urgence ou l’état de siège, pouvoir de prendre des mesures visant à assurer le fonctionnement normal des services publics et la protection des populations. Ces mesures peuvent notamment consister à l’instauration d’un couvre-feu et la limitation des déplacements sur tout ou partie du territoire national, pour une durée d’un mois renouvelable une fois.’’

L’Article 25 complète en précisant que ‘’les pouvoirs énoncés dans l’article 24 de la présente loi sont exercés par le président de la République. Ces pouvoirs peuvent, par délégation du président de la République, être exercés par le ministre de l’Intérieur, tout ministre dont l’intervention est nécessaire, les gouverneurs et les préfets’’.

Ce sont ces mesures en question qui n’ont pas fait l’objet d’une définition précise, qui inquiètent certaines organisations de la société civile qui se sont prononcés sur la possibilité d’imposer la vaccination contre la Covid-19 au Sénégal. Le collectif Noo Lank a déjà signifié que ce passage est une porte ouverte pour le président de la République d’exiger, pour la protection des Sénégalais, à toute ou une partie de la population, de se vacciner contre le coronavirus.

L’exigence de vaccin est déjà pratiquée par beaucoup de pays, contre les hépatites, la fièvre jaune ou encore la méningite, etc. A l’image des tests Covid exigés pour les déplacements internationaux, le passeport vaccinal contre la Covid-19 pourrait être la prochaine étape.

Lamine Diouf

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