Publié le 30 Aug 2018 - 15:54
MACKY & MERKEL SUR LA MIGRATION CLANDESTINE

Haro sur les trafiquants

 

Les dirigeants sénégalais et allemands ont promis de combattre la migration clandestine et toute l’organisation du trafic qui se cache derrière.

 

La question ne pouvait pas être éludée. La récente vague de migrants clandestins sur l’Europe, qui rappelle les heures les plus sombres de ce phénomène au milieu des années 2000, s’est invitée dans la conférence de presse conjointe d’Angela Merkel et Macky Sall. Ce dernier de déplorer la situation : ‘‘Le Sénégal vit avec beaucoup de douleur les drames de l’immigration avec son lot de morts dans le Sahara et en Méditerranée. C’est difficile à supporter.’’

La problématique est d’autant plus actualisée qu’en Allemagne, des Sénégalais, en situation irrégulière, ont été menacés d’expulsion en novembre 2016 puis en mai 2017. L’entente sur la conduite à tenir sur ce sujet doit beaucoup à la convergence de vues des deux leaders. ‘‘Nous avons 6 300 dont 1 100 sont en situation irrégulière. Nous travaillons présentement sur leur identification’’, a lancé le président Macky Sall. Après cette phase, la possibilité que l’Allemagne leur offre un cadre d’accueil, et non d’asile, est à l’étude. Le cas échéant, ils peuvent rester, ‘‘sinon nous allons voir comment organiser leur retour dans les conditions qui respectent leur dignité. Nous avons décidé de travailler sur cette question avec beaucoup de sens des responsabilités et avec humanisme’’, a déclaré le président sénégalais. Le problème pour lui réside dans la manière d’aménager un équilibre entre la nécessité d’assurer l’assouplissement des conditions d’accès en Europe et le besoin de réprimer ce trafic dont l’ampleur inquiète.

‘‘Le Sénégal ne sera pas complice. Nous devons combattre ce phénomène, nous ne pouvons pas être complices de ces trafiquants. Mais en même temps, il doit y avoir une immigration normalisée qui puisse permettre aux étudiants, aux artistes, aux universitaires de se mouvoir tranquillement en Europe’’, a-t-il déclaré en proposant ses programmes de développement (Pse, Pudc) à la jeunesse comme solutions.

La chancelière allemande a également dû concéder que cette ‘‘situation était difficile pour les deux pays’’. Dans le sillage du président Sall, elle a soutenu que toute l’organisation criminelle derrière ce trafic sera combattue et que son pays travaillera de concert avec le Sénégal pour ‘‘donner des possibilités de travail sur place et offrir de meilleures conditions d’avenir’’.

Macky Sall : ‘‘L’Europe ne peut pas continuer à s’enfermer’’

Le président sénégalais n’a ménagé ni la chèvre ni les choux dans la survenue de ce phénomène. S’il estime que la jeunesse africaine doit être réaliste car la migration n’est pas une perspective envisageable, Macky Sall a dénoncé les fausses idées véhiculées par la presse occidentale dans sa médiatisation du continent africain. ‘‘L’attraction des jeunes Africains se comprend à travers les médias. D’un côté les médias nous montrent un continent en guerre, où il y a les maladies, la corruption. De l’autre, on nous montre les lumières, l’eldorado…Il y a forcément une force d’attraction. Il y a donc un effort à faire pour donner une autre image de l’Afrique. Nous devons aussi développer nous-mêmes un discours africain, construire des récits qui tournent sur les réussites’’, s’est défendu Macky Sall.

 Le durcissement des politiques migratoires sur le Vieux continent a également été un sujet de préoccupation pour le chef d’Etat sénégalais. S’il concède que l’Europe ne peut pas se faire une spécialité d’accueillir tous les migrants, il a invité à plus d’ouverture. ‘‘L’Europe n’a pas à avoir peur des migrants bien qu’elle ne puisse pas les accueillir. Elle ne peut pas continuer à s’enfermer. Cela véhicule la peur de l’autre, l’absence d’expérience de l’autre peut causer beaucoup de torts’’. Dakar dispose d’un centre sénégalo-allemand d’information pour l’emploi, la migration et la réintégration, destiné à combattre les rumeurs que font courir les passeurs sur le côté paradisiaque de ce pays. ‘‘Nous voulions disposer d’informations fiables et sincères et les dispenser aux jeunes qui arrivent chez nous avec des attentes erronées (…) Le chemin vers ce monde est dangereux’’, a déclaré la chancelière allemande.

OUSMANE LAYE DIOP

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