Publié le 20 Nov 2020 - 23:17
MALADIE MYSTERIEUSE

Les premiers éléments de l’enquête

 

Alors qu’on n’a pas fini de parler du coronavirus, une nouvelle maladie est venue tirer les autorités sanitaires de la relative quiétude dans laquelle elles étaient retournées depuis quelque temps.

 

On en sait un peu plus sur la nouvelle maladie qui sème la peur dans certaines zones côtières, notamment à Mbour et à Thiaroye-sur-Mer. Et s’il y a quelque chose qui mérite d’être signalé, c’est la promptitude avec laquelle a réagi le poste de santé de Thiaroye-sur-Mer dans la prise en charge de cette maladie plus qu’inquiétante. Dans un rapport d’investigation reçu hier, le médecin-chef du district de Mbao informe : ‘’L’investigation révèle que le premier cas, âgé de 20 ans, a été reçu en consultation le 12 novembre 2020, avec comme symptomatologie : éruption cutanée vésiculeuse non généralisée, tuméfaction du visage, sécheresse des lèvres et rougeur des yeux. Il n’a pas été noté de cas graves.’’

Après avoir reçu, de l’infirmier-chef de poste, la notification de multiples cas de dermatoses, l’équipe du district de Mbao, composé du MCD (médecin-chef de district), du point focal surveillance et d’un technicien de laboratoire, a fait une descente, le mardi 17 novembre, au poste de santé de Thiaroye-sur-Mer pour mener des investigations. Il ressort de ces investigations que les patients signalés sont tous ‘’des pêcheurs migrants âgés de 13 à 46 ans, de sexe masculin, résidant à Saint-Louis, Diogo, Fass Booy et Thiaroye-sur-Mer’’. Ils présentent ‘’des lésions dermatologiques variées siégeant au visage, aux extrémités et parfois au niveau des organes génitaux externes’’.

Mais quelle est aujourd’hui l’étendue de la propagation maladie ? Pour l’heure, rien ne semble encore clair à ce niveau. Il ressort de l’interrogatoire des patients qu’il y aurait des cas similaires dans les maisons, mais également d’autres partis en mer. A propos de l’origine de leur contamination, ils ont estimé que c’est au contact avec l’eau de mer.

Le diagnostic du dermatologue

Pour en savoir davantage, les autorités ont fait appel à un dermatologue, qui a fait un examen clinique des patients et un résumé de la situation. Il résulte de ses observations : ‘’Des lésions d’impétigo à localisation péri narinaire et péri buccale ; des lésions papuleuses ombiliquées par endroits localisées aux extrémités (pieds et mains) ; des érosions localisées au niveau des organes génitaux externes (testicules et gland)…’’ Le spécialiste a également décelé une hyperhémie conjonctivale, des céphalées, de la fièvre, des œdèmes du visage surmonté de micro papules chez certains prurigineus[H1] es. Selon toujours les observations du dermatologue, les constantes varient entre : tension artérielle : 13/09 et 08/06 mm hg ; température : 36° à 38°5C ; pouls : 76 à 54 bpmn.

A la suite de ces constats, différentes hypothèses ont été dressées. Il s’agit de l’eczéma aigu, la Covid, la varicelle et le syndrome pied-main-bouche. ‘’Un traitement à base d’antihistaminiques, d’antibiotiques, de pommade, de bétadine dermique, antalgique et antipyrétique a été institué selon le tableau clinique’’, a indiqué le MCD de Mbao. Qui ajoute : ‘’Suite à l’entretien avec le responsable de la division surveillance, un échantillon de 10 patients parmi les plus symptomatiques a fait l’objet d’un prélèvement sanguin et PCR Covid-19, en plus du dosage de la calcémie…’’

Selon le document, il a été décidé, après concertation, que les patients mis en observation doivent être transférés au centre de santé Sicap Mbao, pour une meilleure prise en charge, en attendant les résultats. Les autres patients, renchérit le rapport, sont isolés au niveau du poste de santé de Thiaroye.

Recherche active des cas

Chez la tutelle, en tout cas, on semble avoir pris les devants pour parer à toutes les éventualités. Félicitant les personnels pour leur réactivité, le ministre en charge de la Santé et de l’Action sociale a donné des instructions fermes à ses services. Selon le rapport, ces instructions vont dans le sens de continuer la coordination et le suivi de la situation, d’assurer la prise en charge correcte des cas, de poursuivre les investigations… Il a aussi été convenu de mener la recherche active des cas à domicile et dans les autres structures périphériques, de prendre en charge les autres cas malades qui seraient partis en mer, de s’enquérir, dans les plus brefs délais, des résultats des prélèvements.

Par ailleurs, souligne le rapport, le ministre n’a pas non plus manqué d’insister sur la nécessité d’une implication multisectorielle afin d’élucider la situation. Déjà, le médecin-chef de région, la Direction générale de la santé, le responsable du laboratoire de toxicologie ont rejoint l’équipe d’investigation ainsi que les autorités locales dont le sous-préfet de Thiaroye, le maire de la commune, la gendarmerie, les sapeurs-pompiers, le chef du Service régional de la pêche.

PR. MAGLOIRE NOEL MANGA, INFECTIOLOGUE

‘’Il faut attendre les résultats des enquêtes biologiques et microbiologiques pour se prononcer’’

Pendant ce temps, le professeur Magloire Noël Manga essaie de calmer les populations et lance un appel à la sérénité. Très prudent, l’homme ne veut pas trop se hasarder dans les qualifications. ‘’C’est très tôt. En ce moment, on ne peut avancer que des hypothèses. Et c’est hasardeux. Il faut attendre les résultats des enquêtes pour se prononcer’’.

Cela dit, le professeur déclare à l’endroit des populations : ‘’Le message, c’est de leur dire que c’est quelque chose de nouveau. Les professionnels sont en train de mener des enquêtes. Il faut leur laisser le temps et la lucidité pour mener les investigations nécessaires et proposer des solutions de prise en charge adéquates.’’

A l’heure actuelle, précise-t-il, on ne peut parler d’épidémie. ‘’On ne sait même pas encore si c’est un agent infectieux qui est en cause. Pour parler d’épidémie, il faut qu’il y ait un rapport avec un agent infectieux clairement identifié. Ce qui n’est pas encore établi. C’est donc prématuré de classer dans tel ou tel autre registre’’.

Concernant l’eczéma qui a été évoqué dans le rapport d’investigation, il précise : ‘’L’eczéma est une allergie. Encore une fois, ce n’est que des hypothèses. Les gens sont en train de mener des enquêtes, aussi bien sur le plan épidémiologique que sur le plan microbiologique. Il faut donc attendre de voir les résultats pour se prononcer de manière sûre.’’

MOR AMAR

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