Publié le 2 Sep 2019 - 22:48
MENSONGE ET MALHONNETETE EN POLITIQUE

Sonko, la fausse vertu

 

Si l'honnêteté est une valeur appréciée des électeurs, elle n'est pas pour autant synonyme de victoire électorale, en témoignent les défaites dans le passé d’éminents hommes politiques tels Mamadou Dia (le grand Maodo), Amath Dansokho et tout récemment Ibrahima Fall. De grandes figures morales de la politique sénégalaise qui, malgré tout, ont eu une carrière très limitée. Le constat, après plusieurs décennies de démocratie, est que les Sénégalais paraissent peu sensibles au principe d'honnêteté pour leurs hommes politiques.

C’est vraisemblablement ce qu’a compris le leader du Pastef, Ousmane Sonko qui, depuis son irruption dans le champ politique, surfe sur une vague ayant des contours de vertu, sans en être réellement le cas. Aujourd’hui, la stratégie payante au regard de la démarche d’Ousmane Sonko, est de jouer sur les émotions du citoyen, déployer le sensationnel en accusant le camp au pouvoir de tous les pêchés. Même sans raisons. L’important, à ses yeux, est de présenter les faits de sorte que la cible reste bouche-bée face aux révélations.

L’affaire du gisement de fer de la Falémé, la dernière fantaisie soulevée par M. Sonko, rentre dans cette démarche, savamment orchestrée. Il part d’un fait réel, en l’occurrence un mémorandum d’entente pour ouvrir des négociations qu’il assimile volontairement à un contrat signé en bonne et due forme. L’objectif d’un tel procédé, du reste malsain et injuste est d’en arriver à faire croire au public à des magouilles pouvant susciter son rejet des politiques en vigueur mais aussi une indignation des citoyens.

Seulement, le mensonge finit toujours par faire place à la vérité. Une vérité que le directeur des mines, Amadou Camara a rapidement rétablie dans cette affaire. « Ousmane Sonko parle de la totalité des réserves de fer de la Falémé. Il confond le contrat signé avec Arcelor Mittal qui était basé sur la totalité des réserves (750 millions de tonnes de réserve de fer) et celui en cours de négociations avec les turcs avec qui nous négocions sur 1,5 millions de tonnes par an, pour un total de 70 080 millions de tonnes de fer pour une durée de 25 ans».

Si Ousmane Sonko  était juste et responsable, il n’aurait jamais évoqué un contrat face aux Sénégalais. Car il n’en existe pas à l’heure actuelle. En vérité ce qu’il assimile à un contrat est tout simplement un protocole d’accord en vue d’ouvrir des négociations. Les deux parties (Turcs et Etat du Sénégal) ne s’étant même pas entendues sur la totalité des points contenus dans le document. Seulement neuf sur un total de vingt points ont, à ce jour, fait l’objet d’accord définitif. La partie liée aux avantages fiscaux, exonérations et autres facilités faites aux investisseurs qui alimentent une bonne partie du discours de Ousmane Sonko, seront traités comme le veut la loi, dans le cadre des règlements qui organisent et assurent la gestion des investissements au Sénégal, en particulier les textes relatifs aux Zones économiques spéciales et le Code minier.

L’amalgame dans le discours d’Ousmane Sonko et la volonté du député de propager des contrevérités sont surtout contenus dans le fait que de façon volontaire il fait l’impasse sur les dispositions pertinentes des articles  4 et 5 du MOU. Il aurait dû avoir l’honnêteté de préciser que le document qui fonde la base de son argumentaire n’est pas un engagement irrévocable mais plutôt une manifestation d’intérêts des deux parties. Voilà qui met davantage en exergue les mensonges du leader de Pastef. Dieu sait qu’il ne devrait guère s’approprier une telle stratégie d’autant que depuis tout petit, nos sociétés nous inculquent que mentir est un vilain défaut, dont la finalité est de tromper.

Ce qui compte dans le discours (mensonge) de Sonko n’est pas son fait mais le motif qui le suscite. On est aujourd’hui amené à croire que chez lui (Ousmane Sonko) la politique se conçoit comme une guerre civile larvée, dans laquelle l’arme du mensonge prend le relais des armes tout court. Il perd cependant de vue que la dynamique du mensonge annihile le rapport critique à soi-même et engendre une faiblesse stratégique. Le prix à payer pour le mensonge, la calomnie et le travestissement des faits en politique devrait être la disgrâce électorale. Ainsi, nos hommes politiques feraient plus attention au contenu du discours qu’ils servent à la masse.

Par Alioune Badara CO​ULIBALY (Journaliste)

 

Section: