Publié le 26 Jan 2016 - 20:41
MOUSTAPHA FALL ‘’CHE’’, PRESIDENT DE APL

‘’Macky 2012 va battre campagne pour le triomphe des réformes’’

 

Pour le triomphe des réformes institutionnelles proposées aux populations sénégalaises, le président Macky Sall peut compter sur le soutien de la coalition Macky 2012. Selon le coordonnateur dudit cadre, Moustapha Fall ‘’Che’’, par ailleurs président de Action patriotique de libération (Apl), toutes les dispositions seront prises en interne pour battre campagne auprès des Sénégalais. Dans cet entretien avec EnQuête, le ‘’guévariste’’ de la deuxième alternance relève quelques imperfections sur les mesures proposées dans le cadre de cette réforme, avant de se prononcer sur la situation du pays qui, selon lui, s’est beaucoup améliorée par rapport à celle vécue sous le régime d’Abdoulaye Wade.

 

Macky Sall, dans le cadre des consultations sur les réformes constitutionnelles, a reçu en audience la coalition Macky 2012. Quelle a été votre position sur la question ?

Nous avons partagé les 15 réformes avec lui, de manière démocratique. On s’en est ouvert à lui et par coïncidence, nos positions s’accordent. On est d’accord avec lui. Ce n’est pas surprenant, parce qu’on a longtemps débattu sur des sujets comme la réduction du mandat présidentiel, le statut de l’opposition, etc. Nous avons partagé sa décision, on est en phase avec lui et nous défendrons intégralement ce projet de révision, à savoir les 15 mesures. Nous avons pris l’engagement de l’accompagner et même de battre campagne pour que les réformes triomphent.

Entre ce que propose Macky Sall et ce qui a été consigné au niveau de son programme de campagne avec Macky 2012, il y a des divergences comme par exemple sur la durée du mandat. Etes-vous d’accord avec lui sur le principe de la réduction du mandat présidentiel ?

Au niveau du programme ‘’Yoonu Yokkute’’ que nous avons bâti ensemble, il était prévu une réduction du mandat présidentiel de sept à cinq ans une fois que Macky Sall serait au pouvoir. Mais réduire le mandat est différent de réduire mon mandat. Initialement, le Président Macky Sall avait choisi de réduire le mandat et son applicabilité pour le prochain mandat. Mais au deuxième tour de l’élection présidentielle de 2012, quand il a rencontré le M23 (Mouvement du 23 juin), après quelques manœuvres, il est venu devant l’assistance pour décider de réduire son mandat une fois élu. Dans le programme ‘’Yoonu Yokkute’’, il s’agissait de réduire le mandat et devant le M23, la promesse était de réduire son mandat. Une décision que l’on a comprise, car étant une première dans le monde. Aucune Constitution, de 1959 à 2000, n’a fait état d’une réduction d’un mandat en cours.

Mais Jean Paul Dias ne semble pas partager cette décision du Chef de l’Etat. Comment appréciez-vous sa posture ?

Jean Paul Dias est un homme politique que je respecte beaucoup. Nous avons longtemps cheminé ensemble. Il est libre de donner sa position et il n’est pas le seul dans Macky 2012. Il y a d’autres membres qui partagent sa position. C’est dommage qu’il soit absent de la réunion avec le Chef de l’Etat car, au sortir de la rencontre, tout le monde était d’accord sur la position. Si tu veux aider quelqu’un, il faut l’aider dans ce qu’il veut et non ce que tu veux. J’ai été le premier à poser le problème du mandat, je m’en souviens. Je disais à l’époque qu’il ne pouvait plus réduire son mandat car il est forclos. J’avais donné comme jurisprudence le cas de Moustapha Niasse. Quand on a voulu  donner à ce dernier un mandat de cinq ans à la présidence de l’Assemblée nationale, j’ai dit que ce n’était pas possible, car il avait entamé sa législature de cinq ans depuis un an, il n’en reste plus que quatre. Donc, il ne peut plus avoir cinq ans. Et c’est aussi valable pour Macky Sall. Mais quand j’ai développé cette thèse, lui-même, le président de la République, m’a demandé d’arrêter, parce qu’il veut objectivement tenir sa promesse et réduire son mandat. Dès lors, je me suis rangé de son côté et j’ai accompagné et défendu sa position un peu partout.

Avez-vous fait au président de la République des suggestions allant dans le sens d’améliorer les mesures qu’il a proposées?

Il n’y a pas grand-chose à améliorer. Ce sont des mesures parfaites et objectives. Seulement, il y a par exemple, quand on dit que cette révision s’applique au mandat en cours, il fallait en faire une disposition transitoire. Mais on l’a dit dans la Constitution. Ce qui prête à confusion, car le prochain président n’est pas tenu par cela et pourtant, la Constitution dit que c’est applicable au mandat en cours. Je pense qu’il va rectifier d’ailleurs et en faire une disposition transitoire pour que ça devienne plus clair. A ce niveau, il faut des améliorations et des corrections.

Comment se porte la coalition Macky 2012 ?

Elle se porte bien mis à part qu’elle a été un peu secouée par des dissidences et des départs. Mais la vie est ainsi faite ; chaque chose a son contraire. L’unité est la ligne des contraires. Certainement qu’on se retrouvera car ce sont des divergences insignifiantes. Mais actuellement, la coalition se porte très bien et chaque jour, on enregistre des adhésions.

Hormis ces dissidences, vous avez récemment exclu le professeur Malick Ndiaye. Qu’est-ce qui motive une telle mesure ?

La première raison est ce que l’on a déclaré dans notre communiqué publié il n’y a pas longtemps. Il attaquait violemment le président et sa famille. Dans notre charte, ce comportement est interdit. Je suis le coordonnateur de Macky 2012 et Macky Sall en est le président. Malick Ndiaye savait bien qu’il violait certaines règles en agissant ainsi. J’avais envoyé une commission qui devait le rencontrer pour aplanir la situation. Il a refusé de traiter avec la commission. Solennellement et d’une manière très démocratique, une majorité écrasante s’est dégagée pour qu’on l’exclue. Ce qui a été finalement fait.

A ce rythme, est-ce que la coalition ne risque pas de se vider de sa substance ?

C’est comme un train, à chaque gare, certaines personnes descendent pendant que d’autres montent. Lorsque les camarades partaient et que Malick Ndiaye était exclu, d’autres coalitions, formations politiques et personnalités indépendantes sont venues adhérer à Macky 2012.  C’est la loi du contraire. Ce n’est rien du tout.

Comment appréciez-vous la situation du pays ?

Objectivement, la situation du pays n’est pas mauvaise par rapport à ce que l’on vivait il y a trois ans. La situation du pays était mauvaise sous le régime libéral. C’est pourquoi Abdoulaye Wade a été chassé du pouvoir et depuis lors, nous avons rectifié et posé des actes extraordinaires. L’opposition fait seulement son boulot, mais les Sénégalais objectifs savent bien qu’il y a beaucoup de changements en faveur des populations.

Certaines difficultés comme celles liées au prix du loyer perdurent, car si la baisse a été salutaire, son applicabilité pose toujours problème…

C’est une question de volonté, il faut que les locataires saisissent la loi. Sinon, les bailleurs très cupides, demandent plus qu’il ne faut. Mais la loi est là. Il faut que les gens aient le courage de veiller à ce qu’elle soit appliquée.

Est-ce que l’Etat n’a pas un rôle à jouer dans cette situation ?

Le rôle de l’Etat, c’est d’engager une procédure quand un locataire porte plainte. 

Est-ce que l’Etat ne devait pas veiller à l’applicabilité de cette loi ?

Ce sont les locataires qui préfèrent aller chercher un autre local que d’aller chaque jour à la police ou au tribunal. C’est ce qui fait notre différence avec les pays européens. Là-bas, les gens ont une conscience très développée. On met le prix qu’il faut pour faire appliquer la loi, car c’est du ressort des citoyens. Au Sénégal, le problème réside au niveau des locataires. S’ils veulent aller jusqu’au bout, il n’y a pas de problème, l’Etat finira par appliquer la loi sur les bailleurs.  

Comment appréciez-vous l’affaire Lamine Diack ?

C’est une affaire douloureuse, parce que celui qui est au centre n’est pas n’importe qui dans ce pays. On le prenait pour un ‘’demi-Dieu’’. Lamine Diack a fait ce qu’il a fait, il devait s’empêcher de salir d’autres Sénégalais, particulièrement l’opposition de son pays, et d’assumer tout seul. Quand il prenait cet argent, ce n’était pas destiné à subventionner l’opposition. Si les gens savaient que ce financement était tiré de la corruption, du dopage, ils n’allaient pas le prendre. Dans ce pays, on ne cherche jamais la provenance de l’argent. A la décharge de ceux qui ont reçu l’argent, ils n’ont commis aucune faute, parce qu’ils n’ont rien demandé à Lamine Diack. Ce dernier n’avait pas également pour objectif de combattre Abdoulaye Wade, contrairement à ce que l’on dit.

Lamine Diack faisait sa pré-campagne pour être le candidat des alliés et quand les choses ont mal tourné, il a décidé de rentrer à Monaco. Je dédouane tous ceux qui ont reçu l’argent, car ils ne savaient pas l’origine de cet argent. Mais cela ne peut pas invalider des élections. Si l’argent de la drogue était donné au ministre de l’Intérieur pour qu’il organise les élections, là on pourrait remettre en cause la présidentielle. La plupart de ceux qui ont reçu ce financement ne se sont pas présentés aux élections. Abdoulaye Wade doit retirer cela, car pour rien au monde, on ne pourrait douter de la fiabilité des élections de 2012.

Et pour ceux qui disent que votre candidat a bénéficié de ce financement ?

Lamine Diack a répondu et son fils également. Ils ont dit qu’ils n’ont rien donné à Macky Sall, car ils ne l’ont même pas vu.

Faudra-t-il extrader son fils ?

La loi ne le permet pas. On n’extrade pas ses propres compatriotes. Par contre, on peut le juger ici.

Comment appréciez-vous la position du Pds qui pose déjà ses conditions avant de répondre aux consultations sur les réformes institutionnelles auxquelles Macky Sall invite toute la classe politique ?

C’est une forme de lutte, ils sont dans leur combat pour faire libérer Karim. Mais le jeu n’en vaut pas la chandelle. S’ils ne discutent pas, c’est tant mieux pour eux. Ils sont dans leur rôle, c’est leur combat éternel : faire feu de tout bois pour faire libérer Karim Wade. 

PAR ASSANE MBAYE ET HABIBATOU TRAORE

Section: