Publié le 27 Feb 2018 - 01:09
NOTE DE L’ÉDITEUR

Presse sénégalaise : faire mieux que survivre !

 

Nous y sommes. Vous tenez entre les mains le 2000e numéro de votre quotidien préféré. Certes, ce fut difficile, mais pour tout organe de presse qui naît au Sénégal, il y a comme un défi commun à expérimenter : vivre ou… survivre. C’est connu, beaucoup de titres - et bien souvent de qualité - ont malheureusement déserté la place. Il n’est donc pas question de se glorifier, puisque nous aurions pu faire partie du lot si, à un moment donné, nous (rédaction, syndicat et direction) ne nous étions assez serrés les coudes dans une sorte de pacte tacite ; le temps de passer la tempête.

C’est pourquoi, atteindre le cap de 2000 parutions en moins de sept ans d’existence (‘’EnQuête’’ a été lancé le 7 juin 2011) révèle une saveur particulière pour nous. Car elle traduit un effort quotidien et un travail dans un environnement économique et social pas du tout favorable à la presse, surtout celle écrite. C’est l’occasion donc de remercier toutes les personnes qui ont œuvré et qui continuent de se battre pour qu’’’EnQuête’’ puisse continuer de tenir son rang dans le landerneau de la presse sénégalaise.

Nous pensons aussi que c’est ici l’occasion d’interroger nos responsabilités communes dans la crise que connaît la presse sénégalaise. Peut-elle rayonner dans un contexte où elle se déconnecte de plus en plus des réalités économiques de son environnement, alors que la presse étrangère, surtout européenne, affiche des ambitions de plus en plus claires, dans son objectif de conquérir le ‘’marché africain’’ ? Serons-nous en mesure de résister, alors que les profils qui personnalisent la presse sénégalaise sont de plus en plus faibles ? D’où tirerons-nous les moyens de nos ambitions, dans les années à venir ? Bref, sommes-nous outillés pour faire face à l’avenir ? Nous en doutons fort.

 Aujourd’hui, il est évident qu’il ne suffit pas d’avoir un journal à très bon contenu, il faut savoir aussi le manager ; et cela aucun des patrons de presse (ou alors ils se comptent sur les doigts d’une main)  ne sait le faire, ne l’a appris non plus. Aussi curieux et paradoxal que cela puisse paraître, le vendeur à la criée semble développer plus de talent ou de savoir-faire pour ‘’l’industrie’’ des journaux que ceux qui assurent les contenus. Aucun titre n’a vécu sans, en quelque sorte, la volonté et la complicité d’un distributeur qui dispose de beaucoup de pouvoir sur le destin des titres qui ornent les kiosques. C’est de ce même ‘’droit’’ (encore plus important)  que disposent les annonceurs qui entretiennent un marché publicitaire estimé à 6 milliards de francs Cfa, selon le cabinet Omedia ; mais un marché auquel n’accède pas n’importe quelle entreprise de presse, condamnée alors à ne compter que sur ses recettes de vente (souvent maigres) pour vivre, alors que les spécialistes de l’économie de la presse analysent que pour vivre, un titre doit compter sur 60 % de recettes provenant de la publicité.

C’est donc dans un tel contexte de morosité économique que votre canard célèbre son numéro 2000. Mais ‘’EnQuête’’ sait qu’il peut  compter sur ses lecteurs et annonceurs pour toujours relever le défi de paraître et  d’exister. Beaucoup de nuages à l’horizon, il faut sans doute réinventer le grand soir…

Post-scriptum : Nous nous inclinerons de manière pieuse devant la mémoire des confrères qui ont commencé l’aventure avec nous et qui nous ont quittés en cours de route. Il s’agit de Jules Diop (2013), Thiémokho Coulibaly (2013) et Moussa Paye (2014).  Paix à leur âme !

 

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