Macky Sall accélère la cadence

En Conseil des ministres hier, le président de la République a donné des instructions fermes pour diligenter l’intégration des organisations de la société civile et de l’opposition dans le Cos-Petrogaz. Il a aussi demandé la matérialisation de la loi sur la distribution des revenus. La société civile applaudit, mais attend de voir.
Du pétrole et de l’énergie. Il en a beaucoup été question en Conseil des ministres, hier. Et le président de la République entend tout bonnement faire accélérer la cadence. Sur l’ouverture du Cos-Petrogaz à la société civile et à l’opposition, agitée depuis plusieurs mois, ses instructions sont fermes. Sans délai, il demande au ministre du Pétrole et des Energies ‘’de finaliser le dispositif réglementaire relatif à : (i) l’élargissement du Cos-Petrogaz à la société civile et à l’opposition ; (ii) la loi sur le contenu local avec la création du Comité de suivi et, en particulier, du Fonds d’appui au contenu local’’.
Du côté de la société civile, cette injonction a été saluée, mais sans grande euphorie. ‘’C’est une décision actée depuis longtemps, mais dont on tarde à mettre en œuvre’’, fait remarquer le président du think thank Legs Africa (Leadership, éthique, gouvernance et stratégie). Selon lui, la présence des organisations de l’opposition et de la société civile ne ferait que favoriser un processus de prise de décision beaucoup plus transparente et efficace.
Par rapport à leur rôle éventuel, il estime qu’il s’agira de proroger leur engagement auprès des communautés. Il s’agira aussi de faire valoir l’expertise et l’expérience qu’elles ont pu accumuler à travers leurs actions dans le secteur. ‘’Mais, s’empresse de préciser M. Kane, cet engagement et cette expertise seulement ne suffisent pas. Il faudrait aussi que ces entités (Cos-Petrogaz) puissent avoir des mécanismes internes de prise de décision qui font que les voix de ces organisations puissent compter. Sinon, c’est du faire-valoir. Et cela ne permettrait pas de lutter contre la mal gouvernance’’.
De plus, la question qui se pose est de savoir quelle société civile devrait intégrer ces instances ? Pour Elimane Haby Kane, il faudra être regardant sur la trajectoire des futurs représentants des communautés. ‘’Dans ces instances, souligne-t-il, il ne s’agit pas seulement de prendre des organisations et de les coopter. Il faut évaluer les contributions des acteurs de la société civile dans le domaine, identifier ceux qui ont véritablement poussé les choses à se mettre en place. C’est aussi valable pour l’opposition que pour la société civile. J’espère seulement qu’il ne s’agira pas de prendre une certaine société civile du pouvoir comme on a tendance de le voir’’.
Et d’ajouter : ‘’Il faut faire une balance entre la représentativité et la qualité. Pour moi, la meilleure procédure est de faire un mapping, c’est-à-dire une cartographie réelle des acteurs qui interviennent dans le secteur depuis une certaine période. C’est la façon la plus scientifique pour prendre les meilleurs profils.’’
Répartition des revenus issus de l’exploitation des hydrocarbures
En Conseil des ministres hier, il a aussi été question, pour le président de la République, de demander à ses hommes (ministre en charge des Finances et du Budget et celui du Pétrole) de hâter le pas, en ce qui concerne les textes relatifs à la répartition des revenus issus de l’exploitation des ressources des hydrocarbures. Aussi, Macky Sall demande aux deux ministres susvisés ‘’de veiller au renforcement de l’ancrage d’une gouvernance, selon les meilleurs standards internationaux, des sociétés à participation publique qui évoluent dans le secteur des hydrocarbures’’.
Pour Elimane Kane, il faut surtout parachever cette armature législative et veiller à sa mise en œuvre. ‘’C’est vrai qu’il y a des efforts qui ont déjà été faits. C’est le cas, par exemple, de la loi sur le contenu local. Mais c’est une loi qui ne suffit pas à elle toute seule. Il faut toute une stratégie d’accompagnement de ce dispositif, notamment le renforcement des capacités des acteurs économiques locaux, pour tirer pleinement profit de ces ressources. Nous attendons aussi à ce que la loi sur la redistribution des revenus vers les collectivités territoriales soit mise en place. Et qu’elle ne subisse pas le même sort que les lois qui ont été votées dans le cadre du secteur minier’’, plaide le président de Legs Africa.
A l’en croire, l’Etat a tout intérêt à inclure toutes les forces vives de la nation, pour que le Sénégal puisse profiter pleinement de ses ressources. ‘’Il faut renforcer les institutions internes, en développant un pacte solide avec les citoyens, mettre en place des instruments pour une redistribution équitable des retombées du secteur. Notre conviction est que le Sénégal ne peut tirer pleinement profit de l’exploitation de ses ressources naturelles qu’à travers une gouvernance démocratique, transparente, responsable et inclusive. C’est cela qui peut permettre à l’Etat d’être dans une position de force dans les négociations avec ses partenaires qui disposent d’une certaine puissance financière’’.
Les autres mesures phares du Conseil des ministres Fraichement rentré de Paris, le président de la République, Macky Sall, a aussi réservé une bonne partie de sa communication, en Conseil des ministres, à la coopération bilatérale avec la France. Deux dossiers, inscrits dans le cadre de ce partenariat, ont retenu l’attention. Il s’agit du Campus universitaire franco-sénégalais et du Train express régional. Sur ce dernier sujet, il a informé le conseil ‘’de la participation de la France au financement de la deuxième phase de la ligne du Train express régional (Ter) Diamniadio - AIBD, aux côtés de la Banque africaine de développement (Bad) et de la Banque islamique de développement (Bid)’’. En ce qui concerne la question du Campus, il a surtout invité le ministre de l’Enseignement supérieur ‘’à parachever, avec la partie française, la mise en place opérationnelle des organes de direction de l’établissement’’. Aussi, le chef de l’Etat est revenu sur la reprise des enseignements-apprentissages dans les universités et écoles d’enseignement supérieur au Sénégal. ‘’Il a demandé au ministre de l’Enseignement supérieur et au ministre de la Santé de prendre toutes les dispositions, en liaison avec les autorités académiques, les responsables des œuvres universitaires et les partenaires sociaux, pour un retour, dans les meilleures conditions, des étudiants et enseignants dans les campus universitaires, en veillant au strict respect des protocoles sanitaires édictés’’, informe le communiqué. Par ailleurs, le président de la République est également revenu sur les inondations. Il demande au ministre de l’Eau et de l’Assainissement ‘’d’intensifier, à l’échelle du territoire national, l’exécution de la matrice d’actions prioritaires adoptées pour faire face aux inondations au titre de l’année 2020 et de lui soumettre un rapport détaillé sur l’état de mise en œuvre du Programme décennal de lutte contre les inondations (PDLI) sur la période 2012-2022’’. Le chef de l’Etat recommande, en outre, aux ministres concernés, en relation avec les maires des communes ciblées, ‘’d’accorder une priorité spéciale à la restructuration et à la rénovation des quartiers inondables, notamment ceux de Kaolack, Saint-Louis, Kaffrine, Ziguinchor, Guédiawaye et Pikine’’. Sur un autre registre, Macky Sall a salué ‘’la mobilisation nationale pour le succès du projet d’inclusion sociale des 100 000 logements’’. A cet effet, il a demandé au gouvernement de mettre en œuvre, sans délai, avec la forte implication de tous les acteurs, les décisions qu’il a arrêtées à l’issue du Conseil présidentiel tenu le 20 août 2020. Abordant la question de la gouvernance des entreprises du secteur parapublic et des personnes morales de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique, le chef de l’Etat donne instruction à l’ensemble des membres du gouvernement ‘’de veiller à la tenue régulière de pré-conseils, en amont des conseils d’administration, en particulier dans le cas des sociétés dont l’impact sur le budget de l’Etat est important’’. |
MOR AMAR