Publié le 12 Apr 2015 - 22:10
PARRICIDE A DAGANA

Abdoulaye Fall tue son père et recouvre la liberté 14 ans après

 

C’est une affaire vieille de 14 ans qui a été vidée hier devant la cour d’assises de Saint-Louis. L’accusé Abdoulaye Fall, qui a tué son père, le 29 août 2001 à Yasser hameau dans le département de Dagana, a été acquitté. Il a été sauvé de justesse par l’article 50.

 

Abdoulaye Fall est libre depuis hier, à la faveur de l’article 50 du code pénal. La cour d’assises de Saint-Louis a suivi la plaidoirie de son conseil qui a plaidé la démence. D’ailleurs cette question a constitué la pomme de discorde entre le ministère public et la défense. Mais, c’est le témoignage du psychiatre Dr Masseck Wade du centre hospitalier régional de Saint-Louis qui a emporté l’adhésion de la Cour. En effet, l’homme de l’art a diagnostiqué chez l’accusé des troubles cognitifs  et des conduites antisociales. En conclusion, il a dit que le sujet est atteint de schizophrénie. Que le sujet est inaccessible à une sanction pénale, mais qu’il est curable.

Ce jour d’août 2001, les pandores ont trouvé sur le lieu du drame le corps sans vie du pater Ameth Fall gisant dans une mare de sang, les bras ramenés au bas-ventre, les pieds liés et la tête tournée vers le Sud. Du sang coulait de ses narines et des blessures béantes étaient visibles sur la tête. Interpellé, Abdoulaye Fall a reconnu les faits et expliqué aux pandores avoir interdit à son père de faire des travaux pénibles. Mais son père très âgé s’était entêté. Ainsi, ce jour-là, il avait voulu extraire de l’argile pour la construction de sa case. Son père est arrivé sur les lieux pour faire des travaux. Il disait l’avoir réprimandé et une vive altercation s’en était suivie. Abdoulaye Fall expliquait aux enquêteurs que son papa portait sur lui un couteau, mais, se sentant en position de faiblesse, il a voulu s’enfuir. Il l’a atteint à la tête avec la pioche avec laquelle il creusait pour trouver de l’argile. Devant le magistrat instructeur, il avait déclaré qu’il ne voulait pas tuer son père.

La cour suit la thèse du conseil de l’accusé

Hier, l’avocat général a souligné dans son réquisitoire que les déclarations de l’accusé ne sont pas lointaines de celles tenues à l’enquête comme devant le juge d’instruction. Toutefois, il a fait remarquer que ces déclarations sont en déphasage avec celles tenues par la mère de l’accusé qui a soutenu que le jour des faits, son mari, accompagné de sa jeune fille, est allé chercher de l’eau au puits. D’ailleurs, selon le témoignage de la fille, son père venait de descendre de la charrette lorsqu’Abdoulaye Fall l’a apostrophé pour savoir ce qu’il venait faire sur les lieux. « La fille, témoin des faits, a déclaré que son père n’avait pas vu son frère. C’est ce dernier qui l’a atteint avec un seul coup de pioche, à la suite de leur altercation », a révélé l’avocat général.

Le maître des poursuites de dire : « Il est constant qu’il est l’auteur des coups reçus par son père et là il s’agit bien d’un parricide ». Il a enchaîné sur l’intention d’homicide, en soutenant que tous les critères retenus par la jurisprudence sont irréfutables. ‘’Pire, a-t-il ajouté, après les coups donnés, l’accusé s’en est allé. Il n’a point secouru la victime. La qualification de meurtre est largement établie et l’excuse de provocation et la légitime défense ne peuvent prospérer.’’ A propos des conclusions du médecin, l’avocat général a soutenu que « le médecin ne peut pas établir qu’au moment  de l’action, l’accusé était en état de démence. Je pense qu’on ne peut pas se baser sur cet article 50 », a-t-il martelé. Il a alors demandé à la cour  de le déclarer coupable du chef de parricide. Pour la peine, il a demandé 14 ans de travaux forcés, en tenant compte de son état actuel et des vœux formulés par la famille, notamment ses deux frères qui, à la barre, ont dit qu’ils étaient prêts à l’accompagner.

L’avocat à la défense Me Ousseynou Gaye, en plaidant l’application des dispositions de l’article 50, a tenté de montrer à la cour que son client est dément. « Dans ce cas d’espèce, il s’agit de troubles et que la cause de la démence est constituée par l’acte » a-t-il dit. Reprenant les témoignages des voisins, il a rappelé à la cour que l’accusé était l’ami de son père, la personne qui lui montrait le plus d’affection. « Trois mois avant le parricide, il a divorcé du fait de sa situation mentale qui ne lui permettait pas d’entretenir un foyer », a ajouté Me Ousseynou Gaye.

Finalement, la cour lui a donné gain de cause, en appliquant l’article 50 du code de procédure pénale.

Fara Sylla

 

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