Publié le 26 Jul 2020 - 00:33
PATHE KEITA, PRESIDENT DE GUEDIAWAYE BASKET ACADEMIE

‘’Il y a un calcul très méthodique pour barrer la route à Tandian’’

 

Pathé Keita considère la suspension de Baba Tandian comme un moyen de l’empêcher de se présenter à l’Assemblée générale élective de 2023. Le président de Guédiawaye basket académie a également donné son avis sur d’autres points comme le basket local, les équipes nationales, la nomination de Moustapha Gaye à la Direction technique nationale…

 

Vous avez assisté à la conférence de presse du Saint-Louis basket club, le samedi dernier. Qu’est-ce qui a motivé votre présence ?

Ma présence à cette rencontre s’inscrit dans une logique de marquer ma solidarité au Saint-Louis basket club et à Baba Tandian. Le SLBC est une grande équipe qui a marqué l’histoire du basket sénégalais. Elle a élu Baba Tandian comme nouveau président, mais la fédération a, par la suite, décidé de le suspendre. Je considère cela comme une injustice qu’on a faite à l’endroit de Baba Tandian, ancien Président de la Fédération sénégalaise de basket-ball, par ailleurs grand contributeur du basket. Je considère que c’est de l’acharnement contre lui. Nous avons senti une injustice.

Donc, il était de notre devoir de marquer toute notre solidarité pour combattre cette forfaiture. La fédération sanctionne régulièrement des dirigeants qui critiquent sa gestion. Hier, c’était moi et d’autres dirigeants. Aujourd’hui, c’est Baba Tandian et demain, ce sera peut-être un autre président de club.  

La fédération a réduit maintenant la peine de 10 à 3 ans avec sursis dont 6 mois ferme. N’est-ce une mesure salutaire ? 

Le Saint-Louis basket club n’a pas demandé une réduction de la sanction. Elle a fait un recours hiérarchique auprès du ministre des Sports pour exiger l’annulation pure et simple de la suspension de Baba Tandian. Les dirigeants saint-louisiens attendent donc le verdict du ministre.  Mais la fédération a entre-temps sorti une nouvelle décision. Elle a réduit la peine. Cette mesure entre dans l’agenda de l’actuel président consistant à empêcher Baba Tandian de se présenter à la prochaine élection de la présidence de la fédération. Nous constatons que la suspension de 3 ans de sursis expire après l’Assemblée générale élective de 2023. Ça veut dire qu’il y a un calcul très méthodique qui a été fait par le président pour barrer la route à Tandian. C’est pourquoi nous exigeons une annulation totale de la suspension. La suspension est illégale et non conforme aux règlements. Les fédéraux ont violé les textes, dans la mesure où le Conseil de discipline est la première instance habilitée à sanctionner un président de club. Ils ne l’ont pas fait. Ils ont fait fi des textes et convoqué directement le Bureau fédéral.  

Mais certains membres du Bureau fédéral disent qu’ils n’ont pas intérêt à disqualifier Tandian, dans la mesure où il est déjà inéligible à cause de ses condamnations pénales antérieures…

Ce n’est pas vrai. Il n’existe aucune disposition dans les textes de la fédération pouvant empêcher Tandian de se présenter. Il jouit toujours de ses droits civiques et politiques, à partir du moment où aucune peine complémentaire n’a été prononcée à son encontre. Cela signifie que Baba Tandian peut se présenter à l’élection présidentielle du Sénégal. Je considère que c’est une aberration de dire que Tandian est inéligible à la Fédération sénégalaise de basket.  Ceux qui le disent ne maitrisent pas les textes. Cela est d’autant vrai que Tandian n’a été condamné à une peine d’emprisonnement. Il a connu des peines assorties de sursis. 

Que vous inspire l’annulation de la saison de 2019-2020 pour cause de Covid-19 ?

C’est une décision salutaire. Je pense que cette mesure s’imposait, dans la mesure où il était impossible d’organiser des matches de basket, avec la propagation de la pandémie et l’interdiction des rassemblements publics. Mais nous regrettons l’attitude abstentionniste de la fédération. Nous attendions son accompagnement, ne serait-ce que moral, mais elle ne l’a pas fait, malheureusement. La fédération n’a pas joué pleinement son rôle envers les clubs, lors de cette pandémie. Elle devait accompagner les clubs en cette période de crise. 

Quelle analyse faites-vous du championnat de basket du Sénégal ?

 Le Sénégal organise un championnat local de première et deuxième division malgré ses maigres ressources financières. Mais le niveau de notre championnat national de basket ne reflète pas nos performances au plan continental. Avec son statut de pays de référence au plan africain, le Sénégal devait disposer d’un championnat à trois niveaux, en pensant d’abord à améliorer le calendrier et la programmation. Les équipes de 2e division ne jouent pas suffisamment et les fédéraux ne maitrisent pas le calendrier. La saison dernière a été boulée en novembre avec le tournoi de montée. Il faudra réfléchir sur la mise en place d’un système permettant d’améliorer le championnat en augmentant le nombre de matches chez les filles et les garçons.

Qu’en est-il des équipes nationales ?

On ne gagne pas chez les garçons depuis 1997, bien qu’on joue souvent les demi-finales. La sélection féminine fait mieux avec une présence sur le podium depuis 2005. Ces résultats montrent que le Sénégal fait partie des meilleurs pays de basket sur le plan africain, aussi bien chez les garçons que chez les filles. Mais nous sommes concurrencés par d’autres pays comme le Nigeria, chez les filles. Il nous dame le pion depuis 2017. Les Nigérianes nous ont imposé leur domination lors des deux derniers Afrobasket.  Il y a aussi l’Angola, le Mozambique et le Mali. Ces trois équipes font des progrès. Le Nigeria et la Tunisie avancent aussi chez les garçons.

Ces percées interpellent les dirigeants sénégalais. Il nous faut une vraie politique pour reconquérir le titre. Nous devons mettre en œuvre une réelle organisation autour de nos équipes nationales, si nous voulons véritablement gagner de nouveaux trophées.  

Moustapha Gaye a été nommé Directeur technique national. Pensez-vous qu’il pourra réussir cette politique dont vous faites allusion ?

Moustapha Gaye a un bon programme. Il est en train de faire des choses importantes depuis qu’il a été nommé à la Direction technique nationale. Nous sentons en tout cas qu’il est motivé et déterminé. Ce qu’il faut regretter, c’est l’instabilité sur le banc des équipes. Les entraineurs ne durent pas et cela pose un problème de ménagement. Cheikh Sarr avait commencé un bon travail, mais il a été limogé après l’élimination des Lionnes au tournoi préolympique de Maputo (Mozambique). Adidas aussi a été remercié à la veille de la Coupe du monde masculine Chine-2019. Cette instabilité ne peut que créer des effets négatifs sur la compétitivité de nos équipes nationales.

Boniface Ndong est devenu le nouveau coach de l’équipe nationale masculine. Est qu’il a le profil adéquat, selon vous ? 

Oui, c’est un bon choix. Boniface est un professionnel qui a joué dans le haut niveau. Il a été sur le banc de grandes équipes, même s’il n’a jamais été coach principal. Maintenant, la fédération et la Direction technique nationale doivent essayer de l’accompagner et le laisser travailler. La fédération doit désormais penser à travailler dans la durée et éviter des politiques de campagne. Il ne sert à rien de fixer un objectif à la veille d’une compétition et de limoger l’entraineur s’il ne réussit pas. Les Maliens ont une constance sur leur banc et leurs joueuses font des résultats. Le Nigeria et l’Angola font autant. Donc, cette constance permet à l’équipe d’être plus compétitive et plus performante. Si on le fait, les résultats vont suivre forcément. Je dis que le choix de Boniface est bon, mais il faut qu’on le laisse travailler et lui donner des moyens suffisants.

Moustapha Gaye, Directeur technique national, occupe également le poste de sélectionneur des dames. Que pensez-vous de ce cumul ?  

Le cumul de poste a eu lieu dans le passé avec Maguette Diop. Il a été directeur technique et sélectionneur de l’équipe nationale féminine. C’est bien possible, mais moi, je ne le souhaite pas. Je préfère une distinction de ces deux postes. Le directeur technique national a un énorme chantier à réaliser. Il doit s’occuper de la détection dans les régions, de la promotion du basket local, de la prise en charge de la petite catégorie, de la gestion des équipes nationales…

C’est donc difficile d’exercer simultanément les rôles de DTN et d’entraineur. C’est pourquoi je pense que le DTN doit être détaché des équipes nationales.         

OUMAR BAYO BA

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