Publié le 25 Mar 2020 - 19:42
PLAN DE RIPOSTE CONTRE LA COVID-19

Les réserves de Sonko et Decroix

 

Au palais de la République, hier, pour répondre à l’appel de la lutte contre le coronavirus, Ousmane Sonko a soulevé certaines préoccupations par rapport au plan de guerre du président Macky Sall et à la gestion du Force-Covid-19. Son collègue parlementaire, Mamadou Diop Decroix, a également émis des réserves.

 

L’opposition sénégalaise adhère au plan de guerre contre la Covid-19. Seulement, certains émettent des réserves sur la gestion du Force-Covid-19 qui mobilise des ressources financières importantes. Le député Ousmane Sonko renseigne qu’il a abordé avec le chef de l’État ses préoccupations quant à l’utilisation et le contrôle de l’enveloppe de 1 000 milliards destinée au Fonds de riposte et de solidarité contre les effets de la Covid-19 (Force-Covid-19). Ce qui explique, selon lui, la pertinence de la question sur le recours à l’article 77 de la Constitution.

‘’Nous sommes en crise et cela justifie cette solidarité. Mais il ne faudrait, en aucun cas, qu’un seul franc destiné à ce combat aille ailleurs que de droit. C’est une gestion transparente et vigoureuse qui nous le permettrait. Nous ne voudrons pas que la crise serve à justifier un certain nombre de comportements. Il faudra un sacrifice pour que cet argent soit payé par les Sénégalais et qu’il se retrouve dans la lutte contre le virus et la relance de l’économie’’, a déclaré le leader du Pastef, au sortir de son face-à-face.

Selon le parlementaire, il est bien d’interpeller le président de la République sur certaines questions, avant de prendre une position car, rappelle-t-il, le plan n’est pas encore présenté aux Sénégalais. À son avis, il faut avoir des détails sur toutes ces préoccupations, car il faut de l’argent pour gagner cette guerre qu’il faut aller chercher. ‘’Nous avons été rassuré que l’argent, nous l’aurons. Après, où va cet argent ? C’est aussi important. Il ne faut pas que cet argent soit dépensé pour acheter des 4x4 pour des soi-disant structures qui vont lutter contre le virus. Ou bien que, dans l’allocation, cet argent profite à quelques lobbies et que cela n’aille pas vraiment à la gestion de la crise. C’est un plan détaillé qui nous permettra de voir’’, estime Ousmane Sonko.

Même son de cloche chez le leader d’And Jef Mamadou Diop Decroix. Dans des contextes pareils, dit-il, certains peuvent avoir des comportements aux antipodes des normes souhaitées. ‘’Il y en a qui ne deviendront jamais des anges, qui profiteront de cette période assez difficile pour des actions qui n’iront pas dans le sens des intérêts de ce que nous voulons, c’est-à-dire vaincre la pandémie. Il faudra qu’on soit vigilant et ferme par rapport à ce genre d’action’’, prévient le parlementaire.

Parmi les préoccupations d’Ousmane Sonko, figure aussi les détails de ce qui va alimenter le fonds de 1 000 milliards. A ce propos, il déclare : ‘’La Banque centrale européenne a dégagé une enveloppe de 750 milliards d’euros ; le Sad aux États-Unis a débloqué une enveloppe de 500 milliards de dollars. Mais la BCEAO ne peut pas dégager d’enveloppe. Parce que nous avons une contrainte liée à notre monnaie. Ce qui reste, c’est de recourir au budget et reconnaître tous qu’il va falloir qu’on recreuse le déficit. Et il faut recourir au FMI, les tirages spéciaux. Peut-être 100 ou 150 milliards à tirer là-bas, peut-être la Banque mondiale. Mais, ensuite, il faut réorganiser notre budget.’’

L’insuffisance des 50 milliards alloués aux mesures sociales

Le leader de la coalition Sonko-Président est également revenu sur les mesures fiscales annoncées par le chef de l’État. À ce propos, il renseigne qu’il a clairement notifié son désaccord au président de la République sur la question. ‘’L’annulation des dettes fiscales, surtout quand c’est fait de manière généralisée, n’est jamais une bonne mesure. On ne peut pas mettre dans le même panier ceux qui ont carrément commis des crimes fiscaux, notamment en collectant la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) et en ne la reverser, ou en collectant l’impôt sur les salaires et ne pas le reverser, avec ceux qui, peut-être ont commis des erreurs de bonne foi. C’est peut-être une question d’interprétation. Il serait plus pertinent de demander simplement un moratoire, de repousser le paiement de ces dettes fiscales’’, préconise le parlementaire.

Le député Sonko trouve, par ailleurs, insuffisants les 50 milliards alloués aux mesures sociales. Pour étayer ses propos, il se fonde sur la situation économique du pays et pense qu’il faut envisager un peu plus. ‘’Nous n’avons pas entendu de mesures pour les salariés. Il n’est pas question, pour nous, de dire que les gens ne vont pas payer ceci ou cela. On entend certaines choses qui se disent, à savoir qu’on ne paie pas le loyer, l’eau, l’électricité. On n’est pas dans cela. Puisqu’on n’a pas encore prononcé des mesures de confinement. Les gens peuvent continuer plus ou moins à vaquer à leurs occupations. Mais il faut envisager des mesures pour accompagner ces pans. Parce que beaucoup de gens dépendent de ces salaires’’, souligne le leader du Pastef/Les patriotes.

HABIBATOU TRAORE

 

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