Publié le 25 Feb 2016 - 07:28
PORTRAIT DE SAMBA FAYE, NOUVEAU RECORDMAN DU MARATHON SENEGALAIS

Un destin lié à l’athlétisme 

 

En battant le record vieux de 14 ans de Cheikh Ndiaye lors de la première édition du marathon Eiffage Sénégal, Samba Faye  entre dans l’histoire de l’athlétisme sénégalais.

 

Il n’était arrivé que dixième au classement général de la première édition du marathon d’Eiffage de Dakar mais son nom est désormais inscrit à jamais dans les annales de l’athlétisme sénégalais. Placé derrière la longue file kenyane, sous les ovations des milliers de spectateurs, Samba Faye a battu, le dimanche 14 février dernier, le record du marathon sénégalais de 2h30mn44s réalisé par Cheikh Ndiaye en 2012. Le Caporal à l’Association sportive des Forces Armées (Asfa), premier Sénégalais à franchir la ligne d’arrivée, a couru la distance en 2h25mn01s. "Je suis très content de ce succès et d’avoir représenté mon pays dans cette compétition. Cette performance est la plus importante de ma carrière car  je l’ai réalisée au Sénégal", s’est-il réjoui, après la réception de ses trophées.

Marathonien, un choix confirmé

En remportant la voiture Citroën 3, prix réservé au premier Sénégalais sur la ligne d’arrivée, Samba vient de prouver que le choix porté sur sa personne pour assurer la relève du marathon dans le club militaire n’est pas fortuit. En décembre 2014, la direction technique de la section athlétisme de l’Asfa, qui avait jugé la carrière du marathonien Pierre Ndour finissante, avait coopté le jeune caporal pour raviver le flambeau. Mais son encadreur a  beaucoup hésité pour l’introniser. Il continuait de courir le semi-marathon (21 kilomètres) pendant la saison 2014-2015. Dimanche dernier, lors de son baptême du feu dans l’épreuve de 42,195 kilomètres, l’ancien pensionnaire du lycée Coumba Ndoffène Diouf de Fatick, a surpris le staff du club militaire. Il a surclassé le vétéran  qui devait se contenter de  la deuxième place du classement sénégalais.

Les empreintes à l’Asfa

Cette nouvelle performance du médaillé d’or du Championnat d’Afrique militaire (Abidjan 2014) est le fruit d’une constance dans l’investissement intime. "C’est un jeune rigoureux et travailleur. Il a consenti beaucoup de sacrifices et d’efforts personnels pour obtenir ce succès. Le record du marathon sénégalais, il l’a battu à l’entraînement, 20 jours avant la compétition", témoigne le chef de la section athlétisme de l’Asfa, l’Adjudant-chef Ibrahima Fall. Ce jeune, âgé de 30 ans, est dépeint par son camarade et ami Charles Dionou comme un homme taquin, généreux et sociable. Petite par la taille  avec 1m69 mais grand par le talent, Samba a marqué ses empreintes dans le club basé au stade Iba  Mar Diop. Il a remporté plusieurs trophées  nationaux. Trois fois vainqueur du 10 km de Saint-Louis (2012, 2013 et 2014), le médaillé d’or du semi-marathon international de Dakar en 2011 est champion du Sénégal du  5000 et 10 000 m en 2012. Au plan continental, il est médaillé d’argent en 2012 au Cap-Vert  et 3e au semi-marathon de Niamey en 2011.

Divorce d’avec le ballon rond

Le destin de ce jeune a basculé de manière quasiment inattendue. Il avait un rêve fou pour le foot au départ. Ce sérère natif de Doudam, village situé dans la commune Diouroup (département de Fatick), ambitionnait même de devenir pro. Il ne pensait donc pas devenir athlète. Le vainqueur du cross régional de Dakar (2012) a embarrassé cette discipline à l’âge de 20 ans. Bathie, comme l’appellent gentiment ses camarades et proches, débute  sa carrière de footballeur en 2004 dans le championnat populaire sportif communément appelé "Navétane". Il a joué comme excentré à l’ASC la Linguère (commune de Diouroup). A la fin de la saison, Samba Faye réussit aux tests de recrutement du club (Entente jeunesse Fatick) qui évoluait en National 1 (3e Division sénégalaise). Mais l’élève en classe de seconde au lycée Coumba Ndoffène Diouf de Fatick divorcera d’avec le ballon rond le jour de la signature de sa licence. "Le jour de l’officialisation de mon engagement avec l’équipe de football de Fatick, j’ai assisté à l’entraînement des athlètes et j’ai constaté que j’étais plus rapide qu’eux.

J’ai promis aux dirigeants de remporter des médailles pour le club, s’ils m’intégraient à la section athlétisme", renseigne-t-il. Il convainc alors le président d’EJ Fatick, Matar Ba, actuel ministre des Sports, et ses camarades le même jour après une bonne prestation. Samba Faye réussira alors son pari. Il sera sacré champion régional du cross de Fatick en 2005 et 2006 et médaillé d’or au Championnat régional de 5000 mètres en 2006. L’année suivante, il débarque à la capitale sénégalaise pour le semi-marathon international de Dakar. Le candidat au baccalauréat surprend les autorités de l’Asfa. Dans cette compétition où les militaires ne laissaient aucune chance aux civils, Bathie Faye est arrivé 3e, derrière Ibrahima Gning et Pierre Ndour.  Séduit  par le talent  et les qualités de l’athlète, le colonel Mama Ndiaye lui  proposa un recrutement à l’Asfa après un passage à l’armée.

Une offre qu’il accepta sans réserve avec l’agrément de sa mère. Une option motivée par le décès prématuré de son père en 2005. Après la tentative infructueuse au baccalauréat, il atterrit au camp de Dakhar Bangho  (village situé dans la région de Saint-Louis) comme promis, le 1er septembre 2007. Après cette première étape de la vie militaire, il fait son stage au camp Leclerc où il sort avec un certificat de Formation qualificative en armement (FQA) et un Certificat d’aptitude en éducation physique sportive militaire (CAPEPS). Après deux ans de service dans l’armée sénégalaise, il est réengagé avec grade de soldat de première classe. Le jeune militaire intègre la section athlétisme de l’Asfa en 2009. Le célibataire trentenaire est décrit comme une personne impulsive par ses proches. Un témoignage unanime qu’il reconnaît : "C’est vrai que je me fâche vite mais j’essaie de ne pas faire mal à mes prochains."

Rio  2016 en perspective

Samba Faye a déjà oublié l’épisode du marathon international Eiffage Sénégal.  Le caporal a désormais pour ambition de se qualifier aux Jeux Olympiques de Rio 2016. Après avoir raté les minimas dimanche 14, le coureur de l’Asfa  compte se rattraper au marathon international de France en mai prochain.  Une mission difficile certes mais réalisable. "Je vais me rattraper avec l’aide de Dieu. C’était ma première participation à un marathon. C’est pourquoi je ne voulais pas forcer le chronomètre. Mais à mon arrivée, j’ai senti que je pouvais faire mieux", regrette-il. L’ancien joueur de l’ASC la Linguère compte aussi parfaire ses aptitudes à l’étranger. Un souhait qui nécessite l’appui des autorités étatiques. "Je sollicite le soutien du ministre des Sports et de la Fédération sénégalaise d’athlétisme pour l’aider à poursuivre sa carrière sportive en France ou aux États-Unis", lance  son entraîneur, l’Adjudant Chef Ibrahima Fall.      

OUMAR BAYO BA (STAGIAIRE)

                                

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