Publié le 15 Feb 2013 - 20:40
POST-POINT par MOMAR DIENG

 Le pays et les lobbies

 

 

Un jour sans doute, peut-être, sûrement, la démission d'El hadj Malick Gakou du gouvernement de la République livrera ses secrets enfouis, pour le moment, dans les sinuosités des grands conflits d'affaires qui entourent cette pauvre petite merveille qui nous tient en otage au quotidien, le pain. Un jour ou l'autre, on saura qu'on ne saura jamais comment et pourquoi le successeur putatif de Moustapha Niasse à la tête de l'Alliance des forces du progrès a préféré quitter son poste de ministre. Gakou est-il parti parce qu'«un ministre, ça démissionne où ça ferme sa gueule», comme l'a théorisé Jean-Pierre Chevènement ? Quel est le lien (éventuel) entre «les convenances personnelles» qui auraient été avancées par l'ex-ministre, et les amitiés et sujétions qui l'auraient poussé à reprendre sa liberté ?

 

Dans tous les cas, cette secousse gouvernementale de très grande ampleur qui intervient moins d'un an après l'arrivée au pouvoir de Macky Sall, est une alerte sérieuse pour notre pays. Elle pose en effet la problématique, vieille comme le monde, des postures et activismes des groupes d'intérêts économiques et financiers dans et autour de l'appareil d'Etat. EnQuête l'avait souligné dès les premiers moments de la magistrature du Président Sall : les lobbies d'affaires – banquiers, pétroliers et autres – sont visiblement trop présents au Palais de la République et dans le gouvernement dit de rupture censé remettre le pays à l'endroit après la culture de l'envers développée par l'ancien régime. Aujourd'hui plus qu'hier, le chef de l'Etat se doit d'être autoritaire en décrétant de manière concrète la primauté absolue de l'intérêt général sur les appétits catégoriels. S'il se retient de le faire, c'est le Sénégal qu'il met en danger, d'un danger qui n'aurait alors même plus besoin des pogroms du voisin malien pour imploser la patrie.

 

Par définition, les lobbies visent souvent les mêmes objectifs de capture des stations de pouvoir décisionnel pour en manipuler les entités qui donnent accès aux ressources. On peut comprendre les hommes d'affaires, qui qu'ils soient, qui investissement des moyens financiers faramineux dans un business «indispensable» au pays et qui, raisonnablement, en attendent des dividendes. C'est peut-être le cas de ces fameux meuniers confrontés à une bataille des prix impitoyable sur un marché international soumis au principe de la main invisible qui détermine les cours des produits. A ce sujet, il est temps que l'Etat clarifie sa politique. Libérale, interventionniste ou de modulation ?

 

Si les lobbies situés hors du gouvernement sont dans leur rôle, et c'est à l'Etat de jouer le sien, il est encore plus grave et plus inacceptable que des groupuscules d'intérêts tapis au sommet de ce même gouvernement «travaillent» pour leurs comptes propres en profitant «légalement» de la posture qui est leur au vu et au su – peut-il en être autrement ? - de l'autorité suprême de la République. Quels industriels ne siégeant pas à la table du Conseil des ministres accepteraient d'être écrasés par un concurrent en affaires qui nous apparaît chaque jour sous les traits d'un ange sans histoires venu du paradis ?

 

 

 

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