Publié le 20 Sep 2017 - 17:20
PR IBRAHIMA FAYE (ISLAMOLOGUE) SUR LA SITUATION EN BIRMANIE

‘’Il est plus facile chez les Bouddhistes de tuer une personne que de tuer un coq’’

 

Depuis le 25 août dernier, plusieurs voix ne cessent de s’élever pour dénoncer les exactions de l’armée birmane à l’endroit des Rohingyas. Selon le Pr Ibrahima Faye, ce conflit date de très longtemps et les Bouddhistes n’hésitent pas à tuer les personnes comme ils tuent les coqs. 

 

De Dakar à Jakarta en passant par Johannesburg et Paris, des milliers de personnes se sont déjà rassemblés pour condamner la vague de violences qui sévit en Birmanie, depuis le 25 août 2017. D’après les estimations, des milliers de personnes ont déjà trouvé la mort et 20 000 Rohingyas sont toujours bloqués à la frontière entre la Birmanie et le Bengladesh. Jetant un regard sur ce qui se passe dans ce pays, le Pr Ibrahima Faye soutient que cette ‘’guerre interne’’ ne date pas d’aujourd’hui et que cela n’est rien d’autre que le prolongement d’un processus entamé par les Anglais, après la période coloniale.

‘’L’Islam est entré dans ce pays (Birmanie) depuis le 2ème siècle, bien avant que cette religion ne soit apparue au Sénégal. La difficulté que vivent les Rohingyas n’a pas commencé en 2017. Elle a débuté depuis très longtemps. En 1784, la Birmanie avait un roi, et ce dernier a colonisé par force les populations de l’État d’Arakan, ce territoire habité par les Musulmans. On peut même dire qu’elle a débuté au XVIII siècle. Chez les Bouddhistes, on brûle les morts. C’est pour vous dire qu’il y a une grande différence entre les Bouddhistes et les Musulmans’’, explique le Pr Faye dans un entretien accordé à un site de la place.

Ainsi, l’islamologue renseigne qu’à partir de 1942, les Musulmans sont devenus plus nombreux et ont demandé à obtenir leur légitimité, après le départ des Anglais qui ont colonisé la Birmanie. Cela, dit-il, a créé des frustrations au plan interne. ‘’Les Bouddhistes avaient reçu des Anglais des armes pour tuer les Rohingyas. Etant une minorité et moins armés, ces derniers ne pouvaient pas se défendre. Ils les massacraient. D’ailleurs, ils n’hésitaient même pas à tuer les femmes qui allaitaient leurs bébés. C’était une grande atrocité. Je peux dire que les Anglais ont été les premiers à combattre l’Islam. Ils sont à l’origine de ce qui se passe aujourd’hui en Birmanie, en Arabie Saoudite, en Egypte, en Inde et dans plusieurs pays du monde’’, fustige avec fermeté l’Enseignant à l’Université de Thiès.

Poursuivant son propos, le Pr Faye révèle que les Musulmans étaient enterrés vivant dans des fosses communes ou pire encore, on les brûlait vivants avec de l’essence. ‘’Les enfants n’étaient pas épargnés dans cette atrocité. On les mettait en rangées et un véhicule passait sur eux. Jusqu’à aujourd’hui, personne ne peut donner le bilan exact du nombre de Rohingyas tués. Quatre mille personnes ont déjà été tuées et des milliers de maisons incendiées, depuis le début de ces exactions en Birmanie. C’est énorme et c’est inhumain’’, s’offusque le Pr Faye. Rappelant qu’en Birmanie, le muezzin n’a pas le droit d’appeler à la prière à haute voix.

Silence brisé !

Depuis le début de cette crise, la célèbre Aung San Suu Kyi (prix Nobel de la Paix en 1991) et son gouvernement sont restés muets face à cette répression. C’est enfin ce mardi 19 septembre que la dirigeante birmane a décidé de briser le silence. Aung San Suu Kyi s’est adressée à ses concitoyens à la télévision pour se prononcer sur la crise qui secoue son pays. Elle, qui devait prendre part, avant-hier, à la réunion des Nations unies sur cette question à New York, a préféré le faire via la télévision. Elle en a profité pour analyser à sa manière la répression de l’armée birmane à l’endroit des Rohingyas.

‘’Les violations des droits de l’Homme ainsi que toute autre action qui menaceraient la stabilité et l’harmonie du pays et saperaient l’État de droit seront traitées conformément à l’application stricte de la loi et de la justice’’, lance Aung San Suu Kyi dont les propos ont été repris par le South China Morning Post. Elle considère que cette situation est ‘’déplorable’’ et que la Birmanie ne devrait pas être divisée. ‘’Nous compatissons avec l’ensemble des personnes souffrant d’être aux prises avec ce conflit. Nous ne souhaitons pas que la Birmanie soit une nation divisée sur des fondements religieux ou ethniques. Chacun a le droit de vivre son identité propre’’, préconise l’ancien prix Nobel de la Paix dans son adresse à la nation.

Depuis l’éclatement de cette crise, Amnesty International a déjà dénombré à 210 le nombre de villages de Rohingyas incendiés et des dizaines de mines anti personnelles qui, selon l’organisation, ont été enfouies entre la Birmanie et le Bangladesh.    

GAUSTIN DIATTA (THIÈS)

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