Publié le 24 Oct 2020 - 23:05
PRÉSUMÉ HOMOSEXUELS DE SACRÉ-CŒUR

Matar Diaw assume tout

 

Les 20 présumés homosexuels arrêtés à Sacré-Cœur vont croupir pendant 2 ans ferme en prison, si le juge des flagrants délits suit le réquisitoire de la représentante du parquet. Alpagués dans la nuit du 17 au 18 octobre derniers, sur le point de célébrer un mariage, ils ont contesté l’acte contre-nature qui leur est reproché. Par contre, certains parmi eux ont assumé leur homosexualité.

 

‘’C’est avec Yakhya Ndiaye que je devais me marier, le soir de notre interpellation’’, dit Matar Diaw à la juge des flagrants délits hier, tout en avouant son homosexualité. Venu comparaître avec ses 19 co-prévenus, ce tailleur a reconnu à la barre être l’organisateur de la rencontre où les limiers ont pu mettre la main sur 26 présumés homosexuels dans un appartement à Sacré-Cœur.

Selon lui, en les invitant, il n’a pas dit à ses convives qu’il célébrait son union avec son amoureux Yaya Ndiaye qui détenait, au moment de leur arrestation, deux alliances, un pendentif et le gâteau d’anniversaire. Accablé par son co-prévenu, celui-ci conteste avec véhémence ses allégations et avance que les bijoux étaient juste un cadeau. Outre Matar Diaw, Lamine Faye et Alassane Thiandoum ont assumé leur homosexualité, mais ils ont nié avoir entretenu des rapports sexuels. A en croire Matar Diaw, l’assistant social Moussa Seck et Khadim Mbaye en fuite sont les seuls à être passés à l’acte. Toutefois, tout comme le reste des prévenus, ils ont déclaré qu’ils ignoraient les réelles intentions de Matar Diaw.

‘’Je ne connais pas Matar Diaw. C’est son ami Abdoulaye Fall qui m’a invité. Sur place, nous étions en train de nous changer avec Mama Yakhou et Mouhamed Diop, quand les riverains ont débarqué’’, déclare Alassane Thiandoum, la voix efféminée. Il jure qu’il ignorait que c’était une rencontre entre gays, car on lui avait juste parlé d’anniversaire.

Pour le confondre, la représentante du parquet lui a demandé d’enlever son T-shirt. C’était l’indignation dans la salle, car le garçon avait en dessous un débardeur pour fille de couleur noir avec des motifs roses.  

Le prévenu O. Kane, marié et père d’une fille, voulant se laver à grande eau, a soutenu que son épouse était venue lui rendre visite à la prison à plusieurs reprises. N’étant pas convaincue, la représentante du ministère public lui a demandé de désigner dans la salle son épouse pour corroborer ses dires. Celui-ci de rétorquer : ‘’Elle n’est pas venue aujourd’hui, mais c’est elle qui devait se rendre à l’anniversaire, mais elle n’a pas pu y aller, car notre fille était malade.’’ O. Thiam a soutenu qu’il n’a jamais su que Matar Diaw était homo. ‘’Il est juste mon tailleur. Il m’a invité à son anniversaire et je suis parti avec mes frères M. Mboup et A. Anne’’, se dédouane-t-il.

Disculpé par Thiandoum, J. F. Diédhiou a déclaré n’avoir rien à voir avec la bande. Il a indiqué qu’il a été appréhendé aux abords du cimetière Saint-Lazare. Il revenait d’un mariage à Thiaroye et rentrait chez lui à Ouest-Foire.

Etant donné que les prévenus ont nié être passés à l’acte, le parquet a relevé que la loi ne dit pas exclusivement relation sexuelle, mais le délit est établi. ‘’L’acte contre-nature est une action contre la nature, qui heurte les mœurs établies. Et dans la société sénégalaise, avoir une relation amoureuse avec un individu du même sexe, n’est pas dans l’ordre normal des choses’’, a martelé la parquetière. Elle ajoute que lors de leur descente, les policiers ont constaté la présence de plusieurs individus, torse nu, entassés, sur un lit, dans une des pièces de cet appartement. Les limiers y ont trouvé également une décoration mentionnant ‘’Heureux ménage’’, des ‘’bines-bines’’ (ceintures de perles), des boites à maquillages, des gels lubrifiants, 10 tests VIH/sida et des préservatifs, entre autres. ‘’Vous avez tous les éléments pour entrer en voie de condamnation’’, conclut-elle avant de requérir une peine de 2 ans ferme contre tous les prévenus. 

A tour de rôle, les conseils de la défense ont sollicité le renvoi des prévenus des fins de la poursuite. Apportant la réplique à la parquetière, Me Anta Mbaye a indiqué que le langage juridique est différent du langage commun et la loi a bien défini l’acte contre-nature. 

Pour Mes Abou Abdoul Daff et Moussa Cissé, même si les prévenus ont reconnu leur orientation sexuelle pour certains, ils ne sont pas poursuivis pour cela. ‘’L’homosexualité n’est pas réprimée par la loi sénégalaise’’, a asséné Me Ousmane Thiam. ‘’C’est dommage ; certains parmi eux sont dans la déviance. Nous ne le cautionnons pas, mais nous sommes tenus de solliciter leur renvoi des fins de la poursuite’’, a plaidé Me Khalil Sèye.

Maitres Mbaye Sall et Aly Nar Ndiaye ont dénoncé l’absence de preuve, concernant le mariage.

Au terme des plaidoiries, le tribunal a mis l’affaire en délibéré. Le jugement sera rendu le 6 novembre prochain.

CHEIKH THIAM

 

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