Publié le 12 Jan 2019 - 22:57
PRESIDENTIELLE 2019

L’opposition se radicalise

 

Hier, à la place de la Nation, l’opposition a prôné la radicalisation de son combat face au pouvoir qu’elle accuse de vouloir imposer un ‘’coup d’Etat électoral’’.

 

Est-ce le calme qui annonce la tempête ? Les Sénégalais se lassent-ils des multiples manifestations jamais suivies d’effet ? En tout cas, hier, à la place de la Nation, l’opposition a certes mobilisé, mais pas comme les fois précédentes. Qu’à cela ne tienne, le discours reste constant. Et toujours la même rengaine : départ d’Aly Ngouille Ndiaye de l’organisation des élections, participation des candidats recalés à cause du parrainage, de Khalifa Sall et de Karim Wade… A ces vieilles doléances qui mobilisent la minorité politique depuis plusieurs mois, se greffe une toute nouvelle.

Celle-ci n’est pas mise sur la table par n’importe qui. C’est bien le numéro 2 du Parti démocratique sénégalais, Oumar Sarr, qui en fait la demande devant des militants surexcités. ‘’Nous devons réfléchir ensemble sur les mesures que nous devons prendre. Il est temps de dire que ça suffit, que Macky Sall ne doit même pas organiser les élections. Il faut un pouvoir différent, un pouvoir de transition qui pourra organiser les élections et qui fera en sorte que tout le monde puisse participer. Macky Sall est incompétent. Il faut qu’il dégage ! Nous ne devons pas le laisser détruire ce pays. Nous sommes prêts à tous les sacrifices, nous sommes prêts à la victoire’’.

Pape Diop : ‘’Le pays n’appartient pas à Macky Sall. L’heure n’est plus au discours.’’

Un discours guerrier, très engagé. Cela ressort de presque toutes les interventions. Pour Pape Diop, même la mort ne sera pas de trop pour sauver la démocratie sénégalaise construite depuis des décennies. Aux jeunes et aux femmes, il harangue : ‘’Notre pays a besoin de vous pour la grande bataille que nous devons engager. Quand on voit Macky Sall agir, on a l'impression que le Sénégal lui appartient. C’est quelqu’un qui est prêt à tout pour se maintenir au pouvoir. Nous aussi devons être prêts à tous les sacrifices pour lui barrer la route. S’il est prêt à mourir pour le pouvoir, nous devons être prêts à mourir pour la démocratie de notre pays.’’

C’est dire que le discours du leader de Bokk Gis Gis est beaucoup plus musclé depuis quelque temps, et cela s’est encore vérifié. Compagnon de longue date de Me Abdoulaye Wade, il a, hier, tenu un exposé qui, à bien des égards, rappelle les envolées du ‘’Pape du Sopi’’ dans les années 80, quand il appelait le peuple à faire face, même aux forces de l’ordre. Pape Diop : ‘’Le pays n’appartient pas à Macky Sall. L’heure n’est plus au discours. Il ne faut pas avoir peur des policiers, parce que ce sont des Sénégalais comme nous. Ils ne vont pas faire des massacres sur le peuple. Nous devons créer le rapport de force qui sera favorable à l’opposition. C’est ce qui nous manque.’’

Les ‘’éloges’’ de Déthié Fall à Macky Sall

Pour réussir ce pari, le leader de Bokk Gis Gis semble convaincu qu’il faut encore plus d’efforts de la part des leaders. Il avoue : ‘’Nous n’avons pas pu créer le déclic pour que le peuple nous suive dans ce combat. Il nous faut maintenant réfléchir et agir. Chaque jour qui passe compte pour l’élection à venir. Il sera question que le Sénégal ait un autre président le 25 février prochain. Et cela demande de grands efforts dans tous les domaines, mais surtout sur le plan physique et financier.’’ Représentant son mentor Idrissa Seck, Déthié Fall ne dit pas autre chose. Il appelle, en outre, les Sénégalais à intensifier la lutte comme en 2012. ‘’Dama namm lacrymogène’’, dit-il avant d’ajouter à l’intention de Macky Sall : ‘’Qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, il faut lui reconnaitre une chose : jusque-là, il fait ce qu’il veut. Il nous a imposé son parrainage, son ministre et il nous empêche d’avoir accès au fichier. C’est à nous de faire ce que nous ne cessons de clamer. Il nous faut le même courage, la même détermination.’’

Comme Déthié, Thierno Alassane Sall estime que la situation que traverse le Sénégal est ‘’très grave’’, même plus grave qu’en 2012. Pour lui, à l’époque, la démocratie n’était pas aussi menacée. Il y avait, au moins pense-t-il, une opposition, des universitaires engagés, une société civile et une presse dynamiques. ‘’Aujourd’hui, par contre, gronde-t-il, il y a un coup d'État électoral rampant, des reculs démocratiques graves. Et seule la force arrêtera ce coup d'État. Ce serait une honte pour tout le Sénégal, si Macky Sall réussit cette forfaiture. Qu’on ne se leurre pas, il faut une résistance populaire pour faire face’’.

Comme s’ils s’étaient passé le mot, les autres leaders ont également abondé dans le même sens, durcissant le ton, encore plus que d’habitude. C’est le cas pour l’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye, l’ancien directeur général des Douanes Boubacar Camara, l’architecte Pierre Atépa Goudiaby, Serigne Moustapha Sy Djamil, Issa Sall du Pur… La seule dame du ‘’collectif’’, Aïda Mbodj, a pour sa part estimé que Macky Sall a éliminé les femmes parce qu’il a peur d’elles.

 Quant à l’ancien Premier ministre Hadjibou Soumaré, il promet tout simplement qu’il va, lui, déloger le patron de Benno Bokk Yaakaar du palais. ‘’Il faut l'enlever, peste-t-il. Macky Sall ne peut pas nous intimider. En tout cas, pas moi Hadjibou. Douma deelou guinaw ; douma yokh yokhi. Élection bii di nieuw, dinako guéné palais bi mou gueneu (Je ne reculerai pas ; je vais le déloger du palais’’.

La rencontre a aussi été marquée par les absences d’Aïssata Tall Sall et de Me Madické Niang qui n’ont même pas désigné de représentants, comme l’ont fait certains absents.

MOR AMAR

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