Publié le 15 Dec 2017 - 16:57
PROCES KHALIFA SALL

Les partisans du maire de Dakar appellent la magistrature à plus de lucidité

 

Les partisans du maire de Dakar ont fait face à la presse, hier, pour se prononcer sur le renvoi du procès de leur leader. Et appeler, par la même occasion, les magistrats chargés de cette affaire à plus de lucidité.

 

Le procès de l’édile de la capitale sénégalaise, qui devait s’ouvrir hier, a finalement été renvoyé au 3 janvier prochain. Les partisans de Khalifa Sall ont fait face à la presse pour se prononcer sur la comparution de leur leader. Ils ont, à cet effet, interpellé les magistrats chargés du dossier à plus de lucidité. D’après eux, de hauts responsables de la magistrature, y compris le juge en charge du dossier, auraient été convoqués nuitamment au palais. Ce qui fait croire aux partisans du maire socialiste que ce dernier subit une tentative de liquidation. ‘’Les avocats de Khalifa Sall doivent récuser le juge, si cette information est avérée, car il faut une indépendance de la justice’’, dénonce Idrissa Diallo. Selon ce dernier, le renvoi du procès était prévisible, car les conditions n’étaient pas réunies. ‘’Nous serons au tribunal le 3 janvier prochain, car nous pensons qu’il faut des gens comme Khalifa Sall pour faire sortir le pays de cette situation’’. 

Toutefois, les proches du maire de Dakar renseignent qu’ils ne prêteront pas le flanc dans cette affaire. Pour Barthélemy Dias et Cie, il est impensable de descendre dans les rues pour brûler des pneus ou saccager des bus et troubler l’ordre public. ‘’On n’est pas dans la stratégie, mais plutôt dans l’action. Notre  objectif est que Khalifa Sall soit candidat, contrairement au pouvoir. Nous ne sommes pas dans l’émotion ou le sensationnel, mais nous faisons de la politique’’, souligne le maire de Mermoz Sacré-Cœur.

Par ailleurs, les ‘’khalifistes’’ prévoient d’organiser un conclave, ce samedi, dans la région de Kaolack, une ville ‘’symbolique’’ pour l’histoire du Ps. Cette rencontre, qui porte sur le thème ‘’La renaissance du Ps pour de nouvelles conquêtes’’, aura pour but, selon Dias fils, ‘’de remobiliser les bases du parti  et de sillonner le pays pour faire comprendre au Sénégalais notre détermination à accompagner Khalifa Sall’’.

Lui emboîtant le pas, le responsable des jeunes, Bassirou Samb, déclare que ce conclave va enregistrer la participation de tous les membres du Comité central, afin, dit-il, de montrer à Ousmane Tanor Dieng que l’ensemble des socialistes sont avec Khalifa Sall.   

REACTIONS… REACTIONS… REACTIONS…

Me BABOUCAR CISSE, AVOCAT DE L’ETAT DU SENEGAL

 ‘’Nous avons un dossier en béton’’

‘’On s’attendait à ce renvoi, tout simplement parce qu’il s’agit d’une affaire qui vient pour la première fois et qui a été enrôlée à l’audience ordinaire de la 2e Chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Dakar, qui a été inscrit au numéro ‘’Ordonnance de renvoi (Or) 100’’. Donc, le tribunal a estimé devoir renvoyer cette affaire à l’audience spéciale du 3 janvier prochain. On ne pouvait pas s’y opposer. Parce qu’il y a certaines formalités qui n’ont pas été accomplies et qui doivent l’être pour permettre la tenue de ce procès.

Pour la défense de Khalifa Sall qui parle de procès politique, eux, ils sont libres de le dire. Mais nous, nous avons un dossier en béton. Nous avons le rapport de l’Ige, l’enquête préliminaire et l’instruction de ce dossier, et les prévenus n’ont pas nié les faits qui leur sont reprochés. Sur la contestation de Me El Hadj Diouf, pour le moment, elle n’a pas encore été développée. Elle le sera à la date du renvoi, parce que Me Diouf était député et son mandat n’a pas été renouvelé. La loi dit que l’avocat qui fut député ne peut pas se constituer contre l’Etat. Même s’il ne l’est plus, il y a un délai qui doit être observé. Il ne l’a pas observé. L’inobservation de ce délai entraîne des sanctions. Et nous sommes déterminés à défendre les intérêts de l’Etat.’’ 

Me EL HADJ MOUSTAPHA DIOUF, PAS ENCORE CONSTITUE DANS CE DOSSIER

 ‘’Ma constitution d’avocat fait peur’’

‘’Le tribunal a reconnu que les droits de la défense ont été violés. Il a renvoyé l’affaire jusqu’à ce que les formalités substantielles prévues par l’article 174 du Code de procédure pénale soient respectées. Le texte dit que, quand il y a renvoi pour juger une affaire, les avocats doivent être avisés par le procureur. Le maître des poursuites ne l’ayant pas fait, a commis une faute grave, a violé la loi. Le tribunal ne pouvait aucunement juger cette affaire. Après avoir constaté les violations flagrantes des droits des prévenus et de leurs conseils, il a renvoyé cette affaire d’office. C’est la première victoire de la défense.

Car, à toutes les occasions, on a refusé tous les droits de Khalifa Sall, y compris son statut de député, son immunité parlementaire. Ils ont peur de ma constitution en tant qu’avocat. Je connais les dispositions du règlement intérieur de l’Assemblée nationale. En tant que député, je ne peux pas plaider pour un inculpé ou un prévenu qui est poursuivi dans un dossier où l’Etat est partie civile. Aujourd’hui, je ne suis plus député. Je suis libre et libéré. Ils perdent leur temps. Il n’y a pas de délai. Ils ont tout confondu. Mais pour les arguments, on attend le 3 janvier prochain. Je démontrerai qu’ils n’ont pas compris les textes. Par ailleurs, le porte-parole du gouvernement, Seydou Guèye, a dit que Paris n’a pas d’ordre à donner au Sénégal, mais Dakar l’a fait avec Banjul (Gambie). Macky Sall doit pacifier l’espace politique.’’

Me KHASSIMOU TOURE, AVOCAT DE LA DEFENSE

‘’Le procès est ouvert au moment où il y a des recours qui n’ont pas été vidés’’

‘’Le tribunal, de son propre chef, a renvoyé l’affaire, mais il n’est pas certain qu’à la date du renvoi, l’affaire puisse être utilement retenue, pour la bonne et simple raison qu’il y a un certain nombre d’actes qui peuvent être posés aussi bien par les avocats de la défense que par ceux de la partie civile et l’agent judiciaire de l’Etat. Et en soulevant ces questions techniques et juridiques, je ne pense pas que ce dossier va être en état d’être jugé. Dans tous les cas, la défense est prête à plaider cette affaire pour la manifestation de la vérité. Le procès est ouvert au moment où il y a des recours qui n’ont pas été vidés. On verra si, malgré cela, le procès va se tenir.

Les voies de recours sont offertes à tout citoyen de par la loi. C’est ma conviction personnelle, tant que ces recours ne sont pas réglés, le procès ne peut pas se tenir. J’ai confiance à un procès équitable, en une bonne administration de la justice et en une bonne distribution de la justice.’’

BAMBA FALL, MAIRE DE LA MEDINA

‘’Nous allons nous organiser pour dire non’’

‘’Nous n’étions pas au tribunal. Nous étions à l’abattoir. Ce renvoi est le fruit d’un long processus de violation des droits de Khalifa Sall et d’un complot politique soutenu par le Parti socialiste, mon parti. Complot visant à éliminer un potentiel candidat aux prochaines élections présidentielles. Ce que nous, Dakarois, nous n’accepterons jamais. Nous sommes là et nous veillons au grain. Khalifa Sall ne sera jamais sacrifié. Nous allons nous organiser pour dire non. Du début à la fin, rien n’est respecté dans cette affaire, que ça soit au niveau du tribunal ou à l’Assemblée nationale. Aujourd’hui, ils ont même tenté de refuser la constitution de Me El Hadj Diouf. Ce qui est irrégulier.’’     

MAMADOU DIOP DECROIX, DEPUTE

‘’C’est la mascarade qui se poursuit. Les décisions viendront du palais’’

‘’Il ne faut rien attendre de ce procès. C’est la mascarade qui se poursuit. On instrumentalise la justice pour régler des comptes politiques, comme exactement avec Karim Wade, en son temps, et avec peut-être quelqu’un d’autre la prochaine fois, si le rapport de force n’est pas inversé. Pour moi, ce n’est plus le pouvoir qui est interpellé, mais plutôt l’opposition. On est venu pour soutenir Khalifa Sall, mais on n’attend rien de la justice. Les décisions viendront du palais. Il faut que l’opposition s’organise davantage, s’unisse avec tous ceux qui, même sans être en politique, se considèrent comme des citoyens vivant au Sénégal et qui pensent que le pays doit être gouverné de façon normale. Est-ce qu’ils vont laisser ce pays être gouverné par une autocratie ou bien est-ce qu’ils vont se dresser pour mettre à bas l’autocratie ? Il n’y a que cela qui reste à faire.’’

Me MADICKE NIANG, PRESIDENT DU GROUPE PARLEMENTAIRE LIBERTE ET DEMOCRATIE

‘’Je continue d’avoir espoir que Khalifa Sall va être relaxé’’

‘’Je ne suis pas là en tant qu’avocat, je n’ai pas le droit de me constituer contre l’Etat du Sénégal, parce que je suis un député. Mais avec les collègues de mon groupe et les non-inscrits auxquels appartient Khalifa Sall, nous sommes venus marquer notre solidarité. C’est pourquoi nous avons porté nos écharpes pour marquer de manière forte et symbolique notre soutien à notre collègue qui reste député, car même si son immunité est levée, il a toujours ce statut, tant qu’il n’y aura pas une décision de l’Assemblée nationale à l’issue d’une condamnation définitive. Et je suis sûr et je continue d’avoir espoir qu’il va être relaxé.

C’est pourquoi je continue d’avoir foi en la justice, parce que, même si on peut faire des reproches contre certaines décisions de justice, nous disons que ce n’est pas une situation générale. Nous avons des magistrats qui savent rendre la justice au nom du peuple sénégalais et que ceux-là ne subiront aucune forme d’influence. Nous prions que, dans le dossier de Khalifa Sall, ceux qui ont en main cette affaire puissent rendre la justice au nom exclusivement du peuple sénégalais, en appliquant toutes les règles de droit. Il faut que le droit soit dit et c’est ce que nous demandons et c’est ce que nous espérons que ces hommes que nous avons vu à l’audience diront le droit.’’

THIERNO BOCOUM, MEMBRE DE L’OPPOSITION

‘’On veut condamner Khalifa Sall pour l’éliminer indirectement de la course présidentielle’’

‘’On nous parle de question de procédures, mais ce qui est clair, c’est que maintenant le procès est ouvert. Ceci, avec une solide violation des droits de Khalifa Sall. Il y a eu une volonté clairement affichée de tout faire pour empêcher la candidature de Khalifa Ababacar Sall et surtout de faire en sorte qu’il ne puisse pas être dans la course. C’est avec beaucoup de regrets que nous constatons au Sénégal, aujourd’hui, que nous avons un président de la République élu au suffrage universel pour rendre compte au peuple. Mais, au cours de son mandat, il décide de qui va être son adversaire et de qui va voter, parce qu’actuellement beaucoup de Sénégalais n’ont pas reçu leur carte d’électeur. C’est d’ailleurs dans cette dynamique que s’inscrit le procès de Khalifa Sall. On a violé tous ses droits, depuis le début, et on veut le juger et le condamner pour l’éliminer indirectement.’’

Propos rassemblés par AWA FAYE

HABIBATOU TRAORE    

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