Publié le 27 Feb 2020 - 21:13
PROPENSION RAPIDE DU CORONAVIRUS EN ITALIE

Les Sénégalais des villes touchées dans l’expectative

 

Le coronavirus fait désormais des ravages en dehors de la Chine. Après la Corée du Sud et l’Iran, c’est en Italie qu’il sème la panique. A l’approche du Magal du Kazou Rajab, prévu le 22 mars prochain, les nombreux Sénégalais, particulièrement les fidèles mourides établis dans ce pays, craignent pour la tenue de l’évènement qu’ils avaient l’habitude de célébrer dans une ville choisie entre compatriotes.  

 

L’épidémie de coronavirus installe la psychose à travers le monde. Venu de la Chine, le Covid-19 enregistre désormais plus de nouveaux cas ailleurs dans le monde que dans l’’’empire du Milieu’’.

En effet, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre quotidien de nouveaux cas ailleurs dans le monde est supérieur à celui enregistré en Chine, qui a d’ailleurs compté, ce mardi, 52 nouvelles victimes, soit le plus bas taux depuis trois semaines. Cependant, la maladie fait des ravages en Corée du Sud, en Iran et en Italie, qui reste le pays européen le plus touché, avec 12 décès et plus de 300 contaminations.

Dans ce pays qui accueille un nombre important d’immigrés sénégalais, la psychose gagne du terrain. Les lieux publics sont fermés et les matches de football joués à huis clos.  

Contactés par ‘’EnQuête’’, des Sénégalais établis dans ce pays affirment que la maladie a fini par installer une atmosphère de peur et d’angoisse, surtout dans les régions mises en quarantaine comme Codogno, en Lombardie. Et en cette période de préparatif du Magal de Kazou Rajab, prévu le 22 mars prochain, la communauté mouride, très présente dans cette partie de l’Europe, doute de la tenue de l’évènement, comme cela se faisait les éditions précédentes. Car, vu la situation qui y prévaut, il est presque impossible, pour ces fidèles, de tenir des cérémonies de célébration de l’anniversaire de Serigne Fallou Mbacké, deuxième Khalife de Cheikh Ahmadou Bamba.

En effet, d’habitude, la communauté sénégalaise d’Italie, en particulier les fidèles mourides, organisait le Magal du Kazou Rajab, à tour de rôle, dans les différentes villes de ce pays, entre compatriotes. En attendant le grand Magal de Touba pour faire le déplacement au Sénégal.

Le compatriote Mor Dieng est établi dans la ville de Zingonia. Il est d’avis que la tenue du Kazou Rajab, en Italie, est quasi impossible, cette année, pour la simple et bonne raison que les autorités italiennes ont mis en place des mesures draconiennes pour stopper la propension du virus. Tout rassemblement est banni. ‘’Je ne crois pas qu’on puisse organiser, cette année, le Kazou Rajab ici, comme il se faisait, car toutes les places publiques sont fermées et interdites d’accès. Les rassemblements publics sont également interdits. C’est pourquoi, quelle que soit la ville qui doit organiser le Kazou Rajab, je ne crois pas que les autorités vont autoriser la tenue de l’évènement, parce que même les matches de football sont annulés ou se jouent à huis clos, à plus forte raison la célébration du Kazou Rajab qui réunit d’habitude beaucoup de monde’’, regrette un autre Sénégal établi à Milan, joint par ‘’EnQuête’’.

Les mesures drastiques des Italiens pour barrer la propagation du virus

Le coronavirus continue de faire des ravages en Italie, avec 12 décès et plus de 300 contaminés. Face à cette situation, le gouvernement de Giuseppe Conte a renforcé son dispositif de surveillance et de prévention, afin d’éviter au maximum des contaminations en dehors des trois régions mises en quarantaine. En effet, le foyer principal de l'épidémie se trouve autour de Codogno, à 60 km de Milan, et est totalement mis en isolement, à l’instar des

autres villes touchées par le Covid-19.

Le compatriote Mor Dieng réside à Zingonia, à 40 km de cette ville épicentre de l’épidémie en Italie. Il indique que les dispositifs de prévention sont élargis à sa zone de résidence, après qu’un cas a été annoncé à 15 km de sa ville. Ainsi, à Zingonia, les écoles sont fermées, de même que tous les lieux publics. Ses enfants sont ainsi confinés à la maison. Quant à lui, il ne sort que pour aller au travail. Et dans cette situation, souligne-t-il, il est impossible d’envisager, dans ce pays, la tenue d’un évènement à la hauteur du Kazou Rajab.  

‘’Les mesures relatives à l’interdiction des rassemblements sont valables jusqu’à 2 mars. Mais cette date risque d’être repoussée, compte tenu de la situation et de la rapidité avec laquelle le virus gagne du terrain. Nous sommes à 40 km d’une ville concernée par la quarantaine, mais toutes les églises et mosquées sont fermées. Nous avons ici une mosquée appelée ‘’Diakhaa mouride’’ où nous nous réunissions pour nos dahiras.  Mais les autorités locales y ont mis une affiche pour nous dire que c’est désormais interdit de s’y réunir. Nous avons même suspendu les séances de dahiras qu’on organisait souvent à domicile entre talibés. On se conforme aux recommandations des autorités et on évite tout ce qui est rassemblement’’, renseigne-t-il au bout du fil.

Il ajoute : ‘’Il est impossible d’organiser le Kazou Rajab, cette année, car pour louer les salles de cérémonie, il faut une autorisation des autorités. Et toutes ces autorisations sont suspendues. Pour les éditions précédentes, on se réunissait entre 4 et 5 mille Sénégalais pour célébrer ensemble le Kazou Rajab, mais actuellement, même les matches de Milan sont à huis clos, à plus forte raison des cérémonies religieux. C’est inimaginable de tenir ça.’’

MOISE SARR, SECRETAIRE D’ETAT DES SENEGALAIS DE L’EXTERIEUR

‘’On ne peut pas parler de Sénégalais mis en quarantaine’’

Depuis l’annonce de la propagation très rapide du coronavirus en Italie, devenu le pays européen le plus touché par le Covid-19, une bonne partie de la population sénégalaise vit dans l’angoisse, à cause du nombre important de nos compatriotes dans ce pays. Des informations fusent déjà de partout concernant la situation de ces Sénégalais, surtout ceux se trouvant dans les trois régions mises en isolement. Certains médias ont même avancé des chiffres sur le nombre de Sénégalais concernés par ces mesures d’isolement.

Contacté par ‘’EnQuête’’, le secrétaire d’Etat des Sénégalais de l’extérieur a tenu à clarifier la situation de nos compatriotes en Italie, plus particulièrement, ceux se trouvant dans les trois régions concernées par les mesures d’isolement.

Selon Moïse Sarr, l’on ne peut parler, actuellement, de Sénégalais mis en quarantaine, puisque ces mesures d’isolement ne concernent pas uniquement des ressortissants sénégalais, mais plutôt tous les résidents des trois régions italiennes touchées (Milan, Lombardie, Vénétie) par le Covid-19.  ‘’Il faut savoir qu’il ne s’agit pas de trois villes, mais plutôt de trois grandes régions italiennes où résident 50 151 Sénégalais en situation régulière. Il faut faire bien attention sur le choix des mots. L’on ne peut pas dire que des Sénégalais sont mis en quarantaine, parce qu’ils ne sont pas les seuls concernés par cette situation. C’est plutôt trois grandes régions italiennes, avec plusieurs résidents dont des Sénégalais qui sont au nombre 50 151 avec des papiers légaux et qui sont en situation régulière.  Cependant, il peut y avoir des Sénégalais en situation irrégulière ou des binationaux. Mais ceux-ci ne sont pas comptabilisés, car les binationaux ne sont pas pris en charge par l’ambassade du Sénégal, mais plutôt par l’Etat italien. Ce qui fait qu’on pourrait avoir d’autres Sénégalais dans ces régions, puisque nos compatriotes représentent 2,1 % des étrangers en Italie’’, précise M. Sarr.

C’est le même constat du côté des Sénégalais vivant dans ce pays, joints par ‘’EnQuête’’. A les en croire, au moment où l’on parle, il est difficile de dire avec précision le nombre de citoyens sénégalais concernés par la mise en quarantaine, puisque l’Etat italien ne donne que les chiffres globaux des régions concernés. ‘’Nous n’avons pas le nombre de Sénégalais mis en quarantaine, parce que les autorités italiennes n’ont donné que le nombre d’habitants des villes touchées’’, confie Mor Dieng, résident à Zingonia, à 40 km de Codogno, ville épicentre de l’épidémie en Italie.


L’Italie, plateforme de diffusion du virus

L'Italie, pays le plus touché, apparaît de plus en plus comme une plateforme de diffusion du virus, ce qui a conduit de nombreux pays du continent à renforcer leurs dispositifs de prévention et de confinement. Les citoyens français revenant des régions italiennes touchées ont ainsi été invités à éviter « toutes les sorties non essentielles » pendant deux semaines après leur retour. Londres a demandé aux voyageurs revenant des zones concernées au nord de l'Italie de s'isoler à domicile et d'en informer les autorités.

Alors que plus de 240 000 Italiens vivent en Espagne, les autorités espagnoles déconseillent les voyages dans les régions d'Italie touchées par l'épidémie, de même que dans les autres pays à risque. Plusieurs pays européens ont conseillé à leurs citoyens de ne pas se rendre dans les régions touchées d'Italie, notamment la Grande-Bretagne, l'Autriche, la Hongrie, l'Ukraine, le Luxembourg, la République tchèque et la Roumanie.

Le Covid-19 est arrivé ce mercredi en Amérique latine, continent jusqu'ici épargné par l'épidémie. Le malade brésilien, un sexagénaire de Sao Paulo, avait séjourné près de deux semaines en Lombardie, dans le nord de l'Italie, devenue un important foyer de propagation. Le Brésil compte actuellement 20 cas suspects de contamination, dont 12 sont des personnes ayant voyagé en Italie, ont précisé les autorités.  

Plus grand pays d'Amérique latine avec 210 millions d'habitants, ce pays a des frontières de près de 15 000 km avec dix pays. Il achèvera par ailleurs en fin de semaine une longue période de festivités autour du carnaval ayant réuni des foules considérables, parfois dépassant le million de personnes, dans des conditions de grande proximité physique, dans toutes les grandes villes, ce qui fait craindre de nouvelles contaminations.

Avec Rfi.fr

ABBA BA

 

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