Publié le 19 Mar 2016 - 02:09
QUINZAINE DE LA FRANCOPHONIE

La puissance que peuvent avoir les mots

 

C’est parti pour 15 jours de célébration de la francophonie à Dakar. La cérémonie officielle de lancement de cette quinzaine s’est tenue hier à la place du souvenir où un panel sur ‘’le pouvoir des mots’’ a été animé par une palette d’experts.

 

Un mot a le pouvoir de guérir mais peut tout aussi détruire. Cette capacité a été la quintessence des échanges recueillis hier lors du panel d’ouverture de la quinzaine de la francophonie. ‘’Le pouvoir des mots’’, thème de la quinzaine de la francophonie, est, selon le vice-président des amis de la francophonie et ambassadeur de la Roumanie Ciprian Mihali, extrêmement suggestif et approprié au contexte actuel. ‘’Nous devons réfléchir sur le pouvoir que nos mots ont dans la société, la qualité de langue éducationnelle dans nos pays et cela doit reposer sur le problème de la qualité pédagogique des écoles’’, affirme-t-il. Aussi, ajoute-t-il, ‘’la dimension politique est la richesse de l’espace public, du pouvoir des personnes sans pouvoir, qui est une preuve de ce pouvoir des mots’’. Par ailleurs, la secrétaire générale à la francophonie Michael Jean a souligné, dans le discours politique de la francophonie, les notions de liberté, d’égalité, de solidarité, de fraternité, de diversité et d’universalité. 

Selon la représentante du Président auprès de la francophonie Penda Mbow qui a pris part à la cérémonie de lancement de la quinzaine de la francophonie hier, à la place du Souvenir, dans le contexte actuel où l’on se trouve, ‘’ce n’est point superflu de rappeler ces mots, de les utiliser et de les réorganiser en fonction de ses propres objectifs’’. ‘’Il est essentiel de revenir sur le sens des mots lorsqu’on veut bâtir des démocraties. Toutefois, il urge de ne pas utiliser les mots dans n’importe quel sens dans des sociétés où l’oralité joue un rôle essentiel, où les émotions sont très fortes. Il s’agit là, ‘’de donner aux mots un sens qui unit, fédère et donne la possibilité d’être dans un contexte de fraternisation’’, explique-t-elle.

Pour rendre compte du pouvoir des mots, le professeur Ibrahima Sow de l’institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) a soutenu ses propos dans trois domaines d’expériences socioculturelles. Ces dernières sont relatives au système de nomination de nouveau-nés qui apparaît comme une ruse ou ‘’trompe-la-mort’’ ; aux interdits et superstitions liés à la magie participative du mot et au rapport de pouvoir magique des incantations. ‘’Pour conjurer la mort en neutralisant son pouvoir nocif, il existe une croyance très ancrée dans la mentalité collective qui relève du magique qui veut que nommer une chose, c’est la faire apparaître.

C’est pourquoi, pour qualifier le mort, même le mot mort est soigneusement éviter en le diluant dans des euphémismes tels que « il s’est endormi »’’, explique-t-il. Ainsi, le pouvoir des mots peut vaincre la mort en interrompant la fatalité du destin par la nomination qui sied. Quand au professeur Mamoussé Diagne, il informe que ‘’la police de pensée est indispensable pour qu’une société soit normale. ‘’Ce qu’il faut dire et ce qu’il ne faut pas dire’’.

Ce, en passant du propre à la métaphore. ‘’Les métaphores sont dangereuses et l’amour commence par une métaphore’’, avance-t-il. Mais le pouvoir des mots, l’écrivain Felwine Sarr l’envisage sous ‘’l’angle du pouvoir de servitude que le langage assure. Et l’écriture comme une tentative de se libérer de cette servitude’’. ‘’Le langage exerce un pouvoir, sa structure oblige à dire ou à ne pas dire en ce sens qu’il ordonne, classe et hiérarchise. Mieux, on se rend compte que plus que d’autoriser à dire, le langage oblige à dire et contraint la dimension du réel que l’on peut exprimer’’, conçoit-il.

Après ce panel, une série d’activités scientifiques, littéraires, artistiques, sportives et gastronomiques sont au programme tout au long de la quinzaine de la Francophonie, allant du 17 mars au 15 avril 2016.

AMINATA FAYE 

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