Publié le 15 Jan 2015 - 14:40
REFORME SUR LES UNIVERSITES

La contestation en marche 

 

Le dialogue de sourds entre le ministre de l’Enseignement supérieur et le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (SAES) fait son chemin. Le syndicat qui estime que l’autonomie des universités est menacée par la loi 18/2014 a organisé une marche hier. Son secrétaire général fait savoir que le ministre n’est plus leur interlocuteur.

 

De son siège situé au camp Jérémy à la Bibliothèque centrale de l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD) en traversant le campus social et le couloir de la mort, le Syndicat autonome de l’enseignement supérieur (SAES) a marché hier pour dire non à la loi 18/2014 sur les universités publiques. Le SUDES, le SATUC, le CUSEMS, USEQ, UDEN, le SIPROS, le SNELS/CNTS le SUTELEC, le M23 et le SUTSAS, tous convaincus que la nouvelle réforme est ‘’autonomicide’’, ont défilé aux côtés des initiateurs. Dans le cortège, bon nombre de professeurs se sont parés de leur toge, comme c’est le cas du médiateur de l’UCAD qui était là ‘’en qualité d’enseignant’’.

Plusieurs pancartes ont été brandies le long de l’itinéraire. Certains rappellent l’attachement du SAES à l’enseignement supérieur et à l’autonomie des universités. Tandis que d’autres sont hostiles au ministre de l’Enseignement supérieur, appelant même à sa démission. En guise d’exemple, il était écrit sur une des banderoles principales : ‘’La communauté universitaire se mobilise pour barrer la route à la dictature de Mary Teuw Niane.’’ Le SAES, par la voix de son secrétaire général, s’est dit ‘’prêt à tout’’, mais ne laissera jamais le ministre obtenir gain de cause.

D’ailleurs, Seydi Ababacar Ndiaye a fait savoir clairement, tout en refusant de prononcer son nom,  que le ministre de tutelle n’est plus leur interlocuteur. Ils vont désormais parler au Premier ministre ou au président de la République. A ce dernier de voir s’il veut une université en marche ou alors s’il préfère garder un homme et bloquer le système. Une source nous a signalé d’ailleurs que le PM Mahammad Dionne a invité le syndicat à une rencontre. Elle devait se tenir hier à 16h.

Le fond du problème entre Mary Teuw Niane et ses anciens camarades syndicales se résume en un point : le conseil d’administration (CA). En fait, comme l’a précisé hier Seydi Ababacar Ndiaye, le SAES ne s’oppose pas à l’existence  d’un CA. ‘’C’est un mensonge de dire que nous sommes contre. Les autres universités en ont et les membres de notre syndicat y siègent’’, réplique-t-il. Ce que le Syndicat combat par contre, c’est sa composition, la mouture de la loi qui d’ailleurs d’après M. Ndiaye n’est plus celle amendée le 21 décembre 2011. Il soutient que le ministre l’a falsifiée.

En fait, cette loi votée le 26 décembre dernier à l’Assemblée nationale donne tous les pouvoirs au conseil d’administration. La loi dispose : ‘’Le conseil d’administration est l’organe délibérant de l’université. Il veille au respect de la mission de l'université. Il est l’instance de validation de ses orientations stratégiques, pédagogiques et scientifiques. Il est chargé de l’évaluation et du contrôle de la gestion administrative et financière.’’

Délibérer à l’absence des enseignants

Parmi ses prérogatives figurent donc l’examen et l’adoption de ‘’la création ou la suppression des filières et des structures’’ du ‘’plan stratégique de développement de l’université’’ des prévisions budgétaires, du budget annuel, du plan d’investissement, des états financiers et du rapport annuel de l’université, du ‘’recrutement des personnels de l'université’’... il y a également une autre compétence non définie et qui s’intitule ainsi : ‘’Toute question qui lui est soumise par le ministre chargé de l’Enseignement supérieur ou par le recteur.’’

Seulement, dans sa composition, il est prévu qu’il y aura 20 membres. Les dix sont issus du monde socioprofessionnel et sont nommés par le Président sur proposition du ministre. Dans l’entendement des enseignants, c’est comme si c’est l’entreprise qui décidera de ce que sera la mission de l’université. Les professeurs de rang A quant à eux choisissent 3 parmi eux en plus du recteur qui lui, est nommé. Ceux de rang B mandatent 2 des leurs. Le personnel administratif et technique a deux représentants. Et les étudiants 2 délégués. Ce qui veut dire que les enseignants ne sont que 6 à siéger, c’est-à-dire qu’ils constituent 30% de l’effectif.

Si on y enlève le recteur qui est nommé et supposé être plus enclin à être du côté du ministre, les enseignants qui sont ‘’au cœur des préoccupations scientifiques et pédagogiques’’, ne seront que 5 personnes sur les 20. Autrement, précise Seydi Ababacar Ndiaye, le quorum peut être atteint pour les délibérations sans qu’aucun enseignant ne soit présent. Pendant ce temps, le ministre qui choisit 11 parmi eux (les 10 et le recteur) détient une majorité confortable. Ce qui sonne dans les oreilles du SAES et autres syndicats comme une négation totale de l’autonomie de l’université. 

BABACAR WILLANE

 

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