Publié le 23 Jan 2024 - 16:16
RESPECT DES DROITS HUMAINS

Le Sénégal, un ‘’bon élève’’, selon Me Aïssata Tall Sall

 

Pour la garde des Sceaux, ministre de la Justice, le Sénégal est un bon élève en ce qui concerne le respect des droits humains. Pour étayer ses propos, Me Aïssata Tall Sall a parlé des avancées du Sénégal dans ce secteur, malgré le rapport de Human Right Watch qui dit le contraire.

 

En compagnie d’une forte délégation, la garde des Sceaux, ministre de la Justice, a représenté hier le Sénégal à Genève devant le Groupe de travail du Conseil des Droits de l’homme des Nations Unies sur l’Examen périodique universel (EPU), lors de sa 45e session. Maitre Aïssata Tall Sall de rappeler qu’au lendemain de l’examen du Sénégal, en 2018, un plan d’action national avait été élaboré sous l’égide du Conseil consultatif national des Droits de l’homme et du droit international humanitaire (CCNDH-DIH). Un comité technique, composé des départements ministériels compétents ainsi que des acteurs de la société civile et l’Institut national des Droits de l’homme du pays, qui y ont été étroitement associés, a procédé à l’élaboration et à la validation de ce rapport.

C’est donc, selon elle, un rapport riche d’une dynamique participative et totalement inclusive à travers l’élaboration de rapports nationaux. ‘’Le Sénégal s’est toujours engagé à œuvrer pour la promotion et le respect des Droits de l’homme, la consolidation de la démocratie et de l’État de droit. Sous ce rapport, notre pays coopère de manière constante et constructive avec les mécanismes internationaux et régionaux des Droits de l’homme et du droit international humanitaire. Ainsi, il a soumis, depuis 2018, aux différents organes des Nations Unies, 10 rapports, dont huit périodiques et deux initiaux. Cinq de ces rapports ont fait l’objet d’une présentation. Dans la même période, le Sénégal a reçu les visites du rapporteur spécial sur le droit de réunion pacifique et la liberté d’association, du rapporteur spécial sur les défenseurs des Droits de l’homme en Afrique, du rapporteur spécial sur l’extrême pauvreté et les Droits de l’homme, du rapporteur spécial chargé d’examiner la question des obligations relatives aux Droits de l’homme se rapportant aux moyens de bénéficier d’un environnement sûr, propre, sain et durable, de la rapporteuse spéciale sur la promotion et la protection des Droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste, d’une délégation du sous-comité pour la prévention de la torture ainsi qu’une délégation de la Cour africaine des Droits de l’homme et des peuples. Enfin, notre pays vient également d’accepter la demande de visite du rapporteur spécial du groupe de travail sur les disparitions forcées’’, a indiqué Me Sall.

Dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations issues du 3e cycle de l’EPU, a-t-elle indiqué, le Sénégal a consenti de multiples efforts en renforçant son cadre juridique et institutionnel afin de le rendre plus propice à la promotion et à la protection des droits humains. Il s’agit notamment de l’adoption de plusieurs mesures d’ordre législatif et réglementaire, mais également de l’adaptation du Droit national au système juridique international avec la ratification de plusieurs instruments régionaux ou internationaux de promotion et de protection des Droits de l’homme ou d’adhésion à ces mécanismes.

‘’Cette réforme majeure a permis le désengorgement des prisons et la maîtrise de la population carcérale…’’

Plus spécifiquement, le Sénégal s’est attelé, ces dernières années, à la mise en œuvre plus efficiente des droits humains avec le respect strict des règles de non-discrimination, le renforcement du droit au respect de la dignité humaine, l’interdiction absolue de la torture et la lutte contre les violences basées sur le genre.

Dans le même sillage, selon elle, les garanties procédurales en matière pénale et les règles régissant la garde à vue ainsi que les conditions de vie en milieu carcéral ont été améliorées de manière significative. À cet effet, pour lutter contre la surpopulation carcérale et les longues détentions, le Sénégal a adopté une série de lois en 2020. ‘’Ces lois ont renforcé les alternatives à la privation de liberté instituées depuis quelques années, en introduisant le port du bracelet électronique dans notre législation pénale. Cette réforme majeure a permis le désengorgement des prisons et la maîtrise de la population carcérale avec plus de 300 personnes qui en ont bénéficié, en moins d’un an d’utilisation effective. Dans le même registre, il est important de relever que la commission chargée de statuer sur les demandes d’indemnisation présentées par les personnes ayant fait l’objet à tort d’une décision de détention provisoire est désormais fonctionnelle. Mais le plus décisif est le projet de révision du Code de procédure pénale en cours pour notamment limiter la durée de la détention préventive en matière criminelle’’, a-t-elle confié.

En outre, elle a soutenu que dans sa volonté de lutter contre les violences basées sur le genre (VBG) et d’apporter une meilleure protection aux femmes, le Sénégal a adopté une démarche dans quatre directions : un plan d’action national sur l’éradication des violences basées sur le genre et la promotion des droits humains, une stratégie nationale pour l’équité et l’égalité de genre, une stratégie nationale pour l’éradication des mutilations génitales féminines et un plan d’action contre les mariages d’enfants.

Dans la même dynamique, selon elle, l’État du Sénégal s’est fortement investi pour la réalisation effective des droits à l’éducation, à la santé et à l’intégration de la dimension genre dans le secteur extractif et celui de l’énergie. Mais le Sénégal a surtout fait voter, en janvier 2020, une loi criminalisant les actes de viol et de pédophilie. Cette loi, a-t-elle expliqué, est devenue un référentiel en Afrique dans la longue lutte des femmes contre les violences exercées sur elles et les petites filles.

En ce qui concerne la participation des femmes à la vie politique, le gouvernement du Sénégal, à travers la loi du 4 juillet 2018, a incorporé dans le Code électoral une disposition imposant la parité absolue dans toutes les instances électives et semi-électives.

‘’44 % de femmes à l’Assemblée nationale, 35 % au HCCT et 22 % au Cese’’

Dans le domaine de la protection des réfugiés et de la lutte contre l’apatridie, des efforts considérables ont été consentis par le Sénégal aux fins d’assurer l’amélioration de la situation des réfugiés et la lutte contre l’apatridie, à travers notamment l’adoption d’une loi en 2022 portant statut des réfugiés et apatrides. Cette loi, dont la finalité est de mettre fin à l’apatridie et de permettre aux réfugiés de jouir quasiment des mêmes droits que les nationaux, a apporté les innovations majeures dont la mise en place d’un organisme administratif chargé d’assurer avec efficience la protection juridique des réfugiés et des apatrides, l’encadrement du statut des apatrides, la reconnaissance et l’aménagement d’un droit de recours contre les décisions prises en matière d’octroi du statut de réfugié et/ou d’apatride, la consécration du droit au regroupement familial.

‘’Grâce à cette loi, les Sénégalaises sont représentées à hauteur de 44 % à l’Assemblée nationale, 35 % au Haut conseil des collectivités territoriales (HCCT) et 22 % au Conseil économique, social et environnemental (Cese). Dans les assemblées territoriales, cette parité est totalement appliquée et respectée. Le gouvernement du Sénégal est conscient que la promotion et la protection des droits humains passent nécessairement par le renforcement des institutions nationales qui les portent. C’est pourquoi, dans le domaine de la prévention de la torture et pour l’amélioration des conditions de détention des personnes privées de liberté, il a quasiment doublé le budget de l’Observateur national des lieux de privation de liberté (ONLPL), qui est le mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (MNP). Pour mieux assurer son indépendance, l’ONLP a été détachée du ministère de la Justice par un décret du 23 mars 2023. Relativement à la Cellule nationale de lutte contre la traite des personnes (CNLTP), un projet de décret dont l’objectif est d’améliorer la législation pénale en matière de lutte contre la traite des personnes, le trafic illicite de migrants et l’exploitation de la mendicité d’autrui a été initié. Ce projet de réforme vise également le renforcement du statut du mécanisme national de coordination à travers notamment la création d’un Fonds d’assistance dédié aux victimes et aux témoins’’, a expliqué la ministre de la Justice.

Dans la même logique, a-t-elle poursuivi, le gouvernement du Sénégal a engagé un processus de réforme du Comité sénégalais des Droits de l’homme (CSDH) visant fondamentalement à permettre à l’Institution nationale des Droits de l’homme (INDH) d’être plus conforme aux principes de Paris sur les INDH. Le projet de loi vient d’être adopté le 6 décembre 2023 en Conseil des ministres. Elle doit être votée par l’Assemblée nationale.

‘’La jouissance effective des libertés de réunion et de manifestation constitue une priorité majeure pour les autorités sénégalaises. À titre illustratif, le gouvernement a institué, par la loi du 23 mai 2022, le référé administratif. Le juge agit ainsi surtout lorsque cette violation porte une atteinte grave et manifestement inégale à l’exercice de cette liberté fondamentale. Dans le domaine de l’éducation et de la santé, des efforts ont aussi été enregistrés avec des résultats notables. Ainsi, le taux d’abandon scolaire, à l’élémentaire et au cycle moyen, a baissé respectivement de 7,9 % et de 8,4 %.

S’agissant de l’enseignement coranique, l’inspection des ‘’daara’’ est érigée désormais en direction nationale, la Journée nationale des ‘’daara’’ a été institutionnalisée depuis janvier 2023 et la politique nationale d’éducation inclusive a fait l’objet d’une validation politique.

Le passage du Sénégal devant le groupe de travail de l’EPU est important, en ce qu’il permet de passer en revue l’ensemble des réalisations de notre pays dans le domaine des Droits de l'homme durant les cinq dernières années. Notre ambition est d’engager avec les experts et les institutionnels que vous êtes, un dialogue exhaustif et constructif pour l’amélioration de la situation des droits humains dans notre pays’’, a soutenu l’avocate.

CHEIKH THIAM

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