Publié le 27 Dec 2023 - 08:43

Senghor, le socialisme africain et ses héritiers.

Barth ne sait rien de la doctrine idéologique de Senghor et, pour ne point l'en disculper, ce n'est pas de sa faute. Rien qu'à l'entendre on sait que son vocabulaire est vernaculaire et qu'il n'est pas un littéraire dans l'âme. Tout le contraire de ce qui est attendu de la fabrique Senghorienne du militant socialiste négro-africain.

Senghor ne s'est jamais réclamé de la social-démocratie et si les socialistes se donnaient un peu de peine à lire ses œuvres, quoique la lecture, paradoxalement, soit d'un ennui à nul autre pareil pour nos politiciens, ils apprendraient la préférence de Senghor pour le socialisme démocratique en lieu et place du groupe de mots social-démocratie. Car disait-il, en bon grammairien, le substantif socialisme lui était préférable au qualificatif social.

Dans son essai liberté 4 le socialisme et planification, Senghor parle d'ailleurs de socialisme démocratique et postule que :
""c’est le socialisme démocratique en Afrique qui fait des progrès." Car argue-t-il, "Il s’appuie sur les traditions africaines : les décisions se font de manière communale, il y a un chef mais il y a aussi un conseil. Ainsi la coopérative villageoise doit être l’instrument du socialisme africain".

C'est dire combien ceux-là mêmes qui s'adjugent l'héritage du poète président ignorent tout ou presque de son œuvre et se barricadent derrière des lieux communs et un verbiage abscons pour espérer toujours tromper leur monde.

Barth reste un matamore friand de polémiques, qui ne se meut que dans les petites jacqueries juvéniles de boy town. Et quand bien même chercherait-il à s'en départir pour se donner en figure intellectuelle que son phrasé et son gestuel le trahissent.

Le must de son oral hier et qui donne à voir combien sa formation militante a manqué une cage. Preuve si besoin que Senghor n'a été assimilé par son côté écume loin de la vague qu'il portait. C'est quand Barth dit que le vote des sénégalais sera motivé par : la paix, la stabilité, la prospérité, la tenue et la retenue. Diantre que le diable se fît ange.

Il faudra peut-être lui envoyer en cadeau de Noël l'excellent ouvrage de Raymond Aron "Guerre et Paix" ne serait-ce que pour saisir les intrications causales entre la paix et la guerre. La guerre n'est pas absence de paix et non plus la paix n'est absence guerre. Si tant est qu'il s'intéresse à l'histoire des idées. De quelle Paix parle-t-il au Sénégal ? L'absence de tensions et conflits sociaux et politiques est-ce vraiment synonyme de paix?

Les universités fermées, les hôpitaux publics transformés en mouroirs automatiques et last but not least les trois repas un luxe que ne peuvent s'offrir que les citadins boy town, passons sur les crises institutionnelles cycliques dont notre régime politique est le nom, depuis 1962 à nos jours, est-ce cela la paix ?

Quant à l'ordre stable qu'il assimile à la stabilité, n'est-il pas le résultat du rapport de domination profitable à un État otage d'une aristocratie élective qui s'autorise tout, ne s'interdit rien et engage au moindre remous, à la moindre objection, les forces de répression contre les miséreux citoyens? Quid de la redistribution et le partage équitable de nos richesses ?

Pour la tenue et la retenue, il n'est besoin de sortir de polytechnique pour savoir à qui faisait-il allusion : Khalifa Sall serait donc un homme de tenue et de retenue. Ça c'est une fable que l'on peut conter aux nouveaux venus. Mais tous ceux qui ont connu les années de braises du mouvement élève et estudiantin des années 80-90 savent combien cet homme se démontrait violent et intraitable envers les syndicalistes élèves et étudiants.

Au finish, le règne des libéraux a ouvert une ère de crétinisation des élites tant et si bien que les familles politiques dont on espérait qu'elles se fussent gnostiques et gnoséologiques, notamment la gauche marxiste-léniniste, maoïste et socialiste, en ont perdu leur âme, à force de copuler avec le libéralisme par pragmatisme et soi-disant esprit d'efficacité.

Militants de tous les partis, retournons en classe et apprenons à réapprendre...grand bien cela fera à notre communauté nationale.

Par Aguibou DIALLO

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