Publié le 28 Feb 2020 - 19:18
SIMULATION D’ATTAQUES TERRORISTES ET TUERIE DE MASSE

Le Sénégal se prépare à toute éventualité

 

Le Cadre interministériel de coordination des opérations de lutte anti-terroriste (CICO) avait prévu, dans son plan d’action de 2020, d’effectuer deux exercices de simulation d’attaques terroristes de dimension nationale. Le premier exercice s’est tenu, hier, au Grand théâtre de Dakar et a mobilisé les différents corps de l’armée. L’effet recherché était de tester la coordination des interventions, en cas d’attaque ou de tuerie de masse à Dakar. 

 

Le Grand théâtre de Dakar a abrité, hier, un spectacle inédit, inconnu de son agenda.  Presque toute la journée, cette salle de spectacle qui porte le nom de doudou Ndiaye Rose ainsi que le musée des civilisations noires étaient interdits d’accès au public. A la place des artistes et autres visiteurs, les forces de sécurité tenaient une séance d’exercice militaire de simulation d’une attaque terroriste de grande envergure. L’opération, organisée par le ministère de l’Intérieur avec l’appui de l’Union européenne, vise à améliorer l’efficience, l’efficacité et la recevabilité du service de sécurité intérieure pour lutter contre les grandes menaces au nombre desquelles figure le terrorisme.

En effet, dans le contexte actuel où tous les pays de l’Afrique de l’Ouest engagés dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, à l’exception du Sénégal, ont subi des attaques terroristes, les autorités sénégalaises ne veulent pas attendre que l’irréparable se produise pour réagir. Elles ont déjà engagé la bataille de la prévention et se préparent à la riposte, en cas d’éventuelles attaques.  En plus, bien qu’étant épargné jusqu’ici, la menace terroriste sur le Sénégal demeure, d’après les autorités,  prégnante. C’est pourquoi, dans ses actions de lutte anti-terrorisme et de prévention, les autorités en charge de la sécurité intérieure ont entamé une série de simulations d’attaques terroristes à Dakar et dans les régions du pays. C’est d’ailleurs dans ce cadre que s’inscrit l’exercice d’hier.  

Le scénario mis en œuvre consistait en une attaque terroriste de grande envergure avec des victimes de masse confinées au Grand théâtre de Dakar. Les auteurs sont issus d’un groupe de terroristes sénégalais dirigés par un imam virulent résident à Keur Mbaye Fall et en connexion avec un autre groupe au Mali. Il recrute dans les quartiers de Keur Massar, Keur Mbaye Fall et Ouakam. Des adeptes du groupe profitent d’un grand concert qui se tient dans ce haut lieu de spectacle, animé par Didier Awadi et d’autres groupes d’artistes de renommée, pour perpétrer une attaque violente.  Ces assaillants sont entrés par la porte des artistes en plein concert, dans une salle pleine à craquer et ont directement tiré sur la foule. Ce qui a créé une débandade et une confusion générale. L’alerte est aussitôt donnée et le commissariat central de Dakar a pris le commandement des opérations de la police et de la gendarmerie. Un important dispositif sécuritaire composés de la police, de la gendarmerie, des forces armées et des sapeurs, est envoyé sur place pour intervenir.

Arrivée sur les lieux du crime, les forces de sécurité interpellent aussitôt un individu qui est ensuite mis à la disposition de la police judiciaire et 50 victimes dont un mort sont découverts. Quelques minutes plus tard une arme de type kalachnikov est retrouvée sur les lieux du crime. Une deuxième personne est interpellée et deux journalistes qui ont tenté d’infiltrer la scène du crime aussi. Les forces de sécurité arrivent à maitriser la situation après 4 heures de manœuvre. Dans un premier temps, elles annoncent un bilan de 10 suspects neutralisés et 36 otages libérés dont 2 morts non identifiés, un blessé grave et 31 personnes contaminées à des produits chimiques. 

Le ministre de l’Intérieur accompagné des chefs des différents corps de l’armée et de la représentante de l’Union européenne au Sénégal rejoint, ensuite, le lieu de l’attaque pour faire le constat de la situation et dresser le bilan. ‘’Dans le bilan, il y a eu plus de 90 morts, parce que c’était une tuerie de masse. Mais ce qui était important, c’était de voir comment les services ont coordonné depuis le gouverneur en tant que responsable régional. Avec la technologie, nous suivions en direct toutes les opérations qui se passaient dans tout le secteur’’, a déclaré le ministre Aly Ngouille Ndiaye.

Les objectifs de l’exercice

Les objectifs de l’exercice consistaient à tester les capacités de coordination, vérifier les capacités de riposte des services et des forces de lutte antiterroriste et à faire une évaluation des moyens de coordination mis à la disposition du Cico et des primo intervenants, en vue de les compléter éventuellement pour leur permettre de faire face efficacement à un attentat terroriste. ‘’Nous avons engagé, aujourd’hui près de 500 éléments pour l’exercice, en plus des moyens matériels assez impressionnants, pour montrer qu’on est prêt. Mais, ce qui est plus difficile dans ce genre de situation, c’est la coordination des hommes de différentes sources devant intervenir. Et l’exercice a montré qu’il y a beaucoup d’améliorations dans les unités’’, indique Aly Ngouille Ndiaye.  Puis, il ajoute : ‘’on voulait simuler sur une opération de tuerie de masse, il fallait donc un endroit où c’est plus facile et le Grand théâtre a une capacité de 1800 personnes et théoriquement l’exercice pouvait concerner 1800 personnes’’.

‘’Cet exercice de simulation portant sur un attentat terroriste avec tuerie de masse a pour objectif d’apprécier la complémentarité, la coordination et la coopération entre les services appelés à intervenir dans de telles circonstances de crise sous la coordination du Cico. Les enseignements qui seront tirés de cet exercice sont précieux à la fois pour les services, mais aussi, pour les partenaires que nous sommes, pour approfondir la coopération en la matière, à travers nos programmes en cours et à venir. Je confirme la volonté de l’Union européenne, partenaire du Sénégal et de nombreux pays dans la région, de continuer à soutenir le gouvernement sénégalais dans ses efforts pour assurer la sécurité de sa population’’, indique, pour sa part, la représentante de l’Union européenne au Sénégal.

‘’Aucun pays n’est à l’abri’’

L’exercice d’hier intervient dans un contexte où le terrorisme sème le désordre, dans plusieurs pays du Sahel et où aucun Etat de la région n’est à l’abri du fléau. C’est pourquoi, le Sénégal qui, jusqu’ici, fait l’exception des victimes, s’arme de prévention tout en préparant la riposte en cas d’éventuelles attaques. ‘’Le président de la République a pensé, depuis 4 ans, qu’il fallait se préparer et il a mis en place le Cadre interministériel de coordination des opérations de la lutte anti-terroriste, pour cela. Ainsi, à travers ce dispositif, la police, la gendarmerie, l’armée, les sapeurs et les renseignements dans le cadre d’une équipe sous la responsabilité du ministre de l’Intérieur se préparent avec beaucoup de moyens pour prévenir toute sorte d’attaque’’, indique le ministre.

Avant d’ajouter : ‘’la menace est partout et on se prépare. De toute façon, nous n’avons pas été ciblés particulièrement. C’est-à-dire que nous n’avons pas subi de menace directe, pour dire que tel jour on va venir ou non, mais on se prépare, parce qu’on sait qu’aucun pays n’est à l’abri’’.  

ABBA BA

Section: