Publié le 9 Aug 2018 - 00:44
SOULEYMANE ABDALLAH (ECONOMISTE DE LA CEA)

‘’Renforcer le commerce intra-africain, c’est renforcer l’industrie africaine’’

 

Les échanges commerciaux entre les pays africains sont plus utiles que ceux que le continent a avec le reste du monde. C’est ce qu’a indiqué Souleymane Abdallah, économiste, responsable à la Commission économique pour l’Afrique (CEA), accroché hier par EnQuête à l’occasion d’une rencontre sur la Zone de libre-échange continentale.

 

Quels sont les avantages de la Zleca pour les économies des pays africains ?

Depuis 2015, les négociations étaient engagées par les pays africains pour la création de la Zone de libre-échange continentale (Zlec). Actuellement, le continent est engagé dans un processus de ratification au bout duquel on espère avoir 22 pays qui vont ratifier l’accord au 31 décembre de cette année, pour qu’il puisse entrer en vigueur dès 2019. Aujourd’hui, 8 pays l’ont ratifié, mais l’espoir est permis. Dans une vingtaine de pays dont le Sénégal, le processus est très avancé et très probablement, la ratification aura lieu avant la fin de l’année. En effet, ce projet est porteur d’avenir pour les économies africaines, les entreprises et les jeunes du continent. Lorsqu’on regarde la nature du commerce qui se passe entre les pays africains, on se rend compte que bien que faible, il est plus concentré sur des produits manufacturiers à valeur ajoutée. Donc ces produits créent des emplois en Afrique, contrairement au commerce de l’Afrique avec le reste du monde. Ce dernier porte à plus de 70% sur les matières premières. Or, en exportant nos matières premières, nous exportons également des emplois. Cette Zone de libre-échange promet des perspectives pour l’intensification des échanges entre pays africains, puisqu’il n’y aura plus de droits de douane sur plus 90% des produits.

Donc c’est pour renforcer le commerce sud-sud ?

C’est une opportunité pour renforcer la densité des réseaux d’échanges entre les différentes entreprises dans nos pays. Le commerce intra-africain est de qualité. Il porte essentiellement sur les produits à valeur ajoutée dont les projets de fabrication créent de l’emploi. Tout ce qui contribue à renforcer le commerce intra-africain renforce aussi l’industrie africaine. Dans une première phase, les Etats ont la latitude d’identifier 10% des produits sensibles, y compris ceux exclus. Il y a plusieurs logiques qui leur permettent d’y arriver notamment avec l’approche fiscale qui consisterait à minimiser les moins-values fiscales qui seraient issues de la mise en vigueur de la Zleca. Mais, cela risque de compromettre l’avantage qui est attendu, puisque c’est la libéralisation du commerce. Si on met 10% sur les produits qu’on importe le plus, cela veut dire qu’on ne s’engage pas en tant que tel à jouer le jeu du libre-échange, donc à être un acteur clé et entier de ce processus.

Aujourd’hui, comment est-ce que les Etats peuvent faire pour éviter les pertes de recettes douanières qui seront causées par la Zleca ?

De façon mécanique, on doit s’attendre à des pertes de recettes douanières. Mais l’avantage, c’est que celles-ci peuvent être très rapidement absorbées par les avantages qui seraient attendus de la Zleca. Ceci, avec non seulement l’intensification des échanges entre les Etats, mais surtout avec les opportunités que cela donne aux entreprises. Les entreprises sénégalaises seront dans la possibilité d’exporter plus vers le marché africain, avec 1,2 milliard de consommateurs, 2 500 à 3 000 milliards de dollars de Produit intérieur brut (Pib) et qui est en pleine croissance. Avec les dynamiques qu’on connaît sur le continent, les projections montrent clairement qu’en 2050, c’est 26% de la population en âge de travailler qui sera africaine. Ce n’est pas un hasard si on remarque que le monde entier commence à avoir un regard de plus en plus tourné vers l’Afrique.

La Zleca n’a pas que des avantages, elles a aussi des limites…

En termes d’inconvénients, il faut noter que tous les pays ne seront pas logés à la même enseigne. Donc, il y en aura qui vont tirer plus avantages que d’autres. C’est comme dans tous les processus. Maintenant, c’est aux pays d’éviter que les bénéfices soient mal répartis et que tout le monde y trouve son compte. On peut comprendre que certains puissent avoir des réticences. Mais très clairement, les études montrent que les pays qui vont le plus en profiter très rapidement sont ceux qui ont un secteur industriel assez vivace, dynamique et qui puisse répondre aux opportunités qui se présenteront. Mais il y a des mécanismes qui sont mis en place pour s’assurer qu’on ne laisse personne au bord de la route. Petit à petit, il y aura des chaînes de valeur régionales qui vont se mettre en place et même les petits pays pourront s’industrialiser, être des fournisseurs et les Petites et moyennes entreprises qui vont grandir de plus en plus. Ça crée un effet d’entraînement qui sera bénéfique à l’ensemble des pays.

Quelles sont les recommandations à faire pour les pays tels que le Sénégal ?

Le Sénégal a tout le potentiel. Il a déjà un tissu industriel qui n’est pas aussi embryonnaire que ça. On a discuté avec quelques entreprises et on se rend compte qu’elles sont dans une situation de sous-utilisation des facteurs de productions. L’ouverture de ce marché représente quand-même un bon levier pour ces entreprises qui peuvent accroître leurs capacités facilement et s’implanter sur de nouveaux marchés. Dans le même temps, il faudrait aussi voir la mise en place des mesures d’accompagnement et d’adaptation pour être sûr que les entreprises seront au rendez-vous au moment de l’ouverture progressive des frontières.

MARIAMA DIEME

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