Publié le 7 Jun 2019 - 20:21
TEGGI NDAWAL

Com’ de crise

 

C’est la crise au sommet de l’Etat sénégalais. Bbc, Mayeni Jones, enquête, Petro-Tim, Frank Timis, Aliou Sall, milliards, Agri-Trans, corruption... Bon, on ne va pas vous la refaire. Et en communication de crise, disait-on, trois stratégies s’offrent : la reconnaissance, le projet latéral, le refus. L’option d’Aliou Sall et des autorités (que diable sont-elles allées faire dans cette galère journalistique ?) est un condensé des deux dernières : une sorte d’esquive, de défausse sur des éléments extérieurs. Mais comme le savent tous les experts en com’, manipuler ces deux éléments requiert la dextérité de Stephen Curry.

A défaut, ils peuvent être plus problématiques que la crise elle-même. La rhétorique conspirationniste de Macky, le point de presse superflu (et super inutile) de la porte-parole du gouvernement, la béatification d’Aliou par le ministre de la Justice (sidérante celle-là) pour contrer le documentaire de la Bbc, témoignent des cafouillages d’une com’ où les sorties sont accumulées et manifestement pas articulées.

On essaie de se forger des éléments de langage qui offrent une vision rassurante d’une crise qui n’a décidément rien de rassurant. La presse semble y tenir une place importante. Il faut toutefois que ce soit clair au niveau des principaux intéressés, qu’elle n’est pas la Pravda de l’action gouvernementale (clin d’œil à Amadou Ba qui pense qu’il appartient à la presse locale de déceler et d’exposer les faiblesses de l’enquête de la Bbc).

Il y a pourtant plus simple que tout ce déploiement inhabituel des identités remarquables de l’Etat : rendre publics tous les documents qui pourraient (remarquez le conditionnel) discréditer Bbc, si tant est que la chaine britannique a eu faux. Immense gageure en perspective. Toute autre option de communication ne ferait qu’épaissir et assombrir le nuage de suspicion qui emmaillote, depuis 2012, le premier tonton de la République. Entre un frère qui fait tout pour contrarier son frère, et un frère qui ne fait pas grand-chose pour n’être pas contrarié par son frère, Aliou a vite fait d’incarner, pour la gouvernance Macky, renoncement moral et hantise politique. Bravo Sadio Mané !

 

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