Publié le 31 Aug 2018 - 14:29
THIES - EAU SAUMÂTRE ET ROUGEÂTRE SERVIE AUX POPULATIONS

Le ras-le-bol des habitants du Dixième

 

Depuis plus de 10 ans, les habitants du quartier Dixième de Thiès boivent une eau, dit-on, dont la qualité est douteuse. La situation est exacerbée depuis la Tabaski où une eau rougeâtre et saumâtre coule des robinets. Face à cette situation qui perdure, les populations crient leur détresse et appellent au secours.

 

Aussitôt la grande porte de la demeure des Kane franchie, le visiteur fait face au salon. A droite, une grande case y est aménagée. Deux garçons et une fille jouent à l’intérieur sous le regard vigilant de deux dames. Après les ‘’salamalecs’’, nous sommes invité à entrer dans le salon. Notre hôte Pape Kane présente un récipient contenant de l’eau qui fait polémique au quartier Dixième. Car elle est rougeâtre. M. Kane explique que ce n’est pas la première fois que les habitants du Dixième sont confrontés à cette situation. Parce que le problème date de très longtemps et perdure.

Au lendemain de la fête de Tabaski, renseigne-t-il, les ‘’Dixièmois’’ ont remarqué la réapparition de cette eau. Conscients des dangers qu’elle présente, ils ont décidé ‘’d’alerter’’ les autorités en charge de la question de la distribution de l’eau potable, afin qu’une solution ‘’durable’’ soit trouvée et, ainsi, mettre fin à leur calvaire. ‘’On nous sert de l’eau avec un ajout de l’eau de javel assez important. En buvant cette eau, on peut la sentir. En plus d’être saumâtre et rougeâtre à la fois, celle-ci présente beaucoup de calcaire et d’argile. C’est récurrent. Cela date de plus d’une dizaine d’années. Pour échapper à cette mauvaise eau qu’on nous sert, les habitants de Dixième décident désormais d’acheter de l’eau filtrée. La bouteille de dix litres coûte désormais 200 F Cfa au niveau des Hlm. Tout le monde part en acheter. Parce que les gens ont de plus en plus peur de contracter des problèmes de santé. Même au repos, cette eau est rougeâtre’’, regrette Pape Kane. 

Poursuivant ses récriminations, l’enseignant estime que cette situation est devenue ‘’trop inquiétante’’ et qu’il n’est pas normal que les populations continuent dans ce XXIème siècle à consommer de l’eau saumâtre ou encore rougeâtre. ‘’Le matin, quand on ouvre nos robinets, on constate la présence de la couleur rouge dans cette eau qui nous est servie par la Sénégalaise des Eaux (Sde). C’est très fréquent. Vous pouvez même remplir dix bassines sans que cela change. De ce fait, quand on veut préparer le petit-déjeuner, on rencontre d’énormes difficultés’’, fulmine-t-il.

D’où provient cette eau qui, à la limite n’est pas ‘’consommable ?’’ Pape Kane croit savoir que l’eau qui coule de leurs robinets provient du château d’eau qui jouxte l’Avenue Caen et se trouve juste à côté de la direction régionale de la SDE. Lequel château d’eau polarise les quartiers Som, Grand Thiès, Dixième, Carrière, Escale, Aiglon, Diamaguène…

Donc, ce n’est pas seulement à Dixième qu’on peut rencontrer le problème de la mauvaise qualité d’eau. D’après M. Kane, tout ceci pose un problème de santé publique. ‘’A Nguinth (Thiès-Nord), les habitants n’ont aucun problème. Ils ont un nouveau château d’eau et, par conséquent, une très bonne eau, propre, limpide. Contrairement à la nôtre qui présente beaucoup d’argile et de calcaire, l’eau du château de Nguinth peut être bue sans crainte et peut être utilisée pour les tâches domestiques. Le goût est même différent’’, révèle celui qui a vécu près de 40 ans au quartier Dixième.

‘’Nous avons tout sauf une eau potable au Dixième’’

Si au Dixième ou encore à Carrière, l’on peine à avoir une eau potable, ce n’est pas forcément le cas à Diakhao. Ce quartier est alimenté par le grand réservoir à eau de Nguinth. Dans ce secteur, précise un confrère, l’eau n’est pas rougeâtre encore moins saumâtre. Une thèse corroborée par cette autre habitante de Diassap (Thiès-Nord). Pour cette dame, qui a préféré garder l’anonymat, dans cette partie de la capitale du Rail, l’eau est ‘’propre et prête à être consommée sans aucun risque sanitaire majeur.’’ Tout le contraire au quartier Dixième Impasse où la qualité de l’eau du robinet n’est pas des meilleures, confie Ismaïla Ndiaye. Menuiser de profession, ce jeune homme fait le procès de la Sénégalaise des Eaux (Sde) et de la Société nationale des eaux du Sénégal (Sones). Il accuse sans aucune hésitation.

‘’Je suis né et j’ai grandi dans ce quartier. La SDE et la SONES doivent fournir une bonne eau et en quantité suffisante aux citoyens de ce pays. Le Sénégal est indépendant depuis plus de 57 ans. Je ne peux pas concevoir que ces deux structures continuent à servir une mauvaise eau aux populations. Je puis vous assurer que l’eau que nous buvons est remplie de fer et de calcaire’’, se lamente Ismaïla Ndiaye. Ce jeune qui tient son atelier non loin de la place Pétanique indique que le pays du Président Léopold Sédar Senghor et d’El Hadj Oumar Foutiyou Tall doit dépasser cette situation. Pour cela, il invite les deux structures en charge de l’eau dans ce pays à être ‘’beaucoup plus rigoureuses dans le traitement de l’eau.’’

Pour sa part, Pape Kane, qui revient aussi à la charge, pense qu’il appartient à la SONES et la SDE, qui s’occupent au Sénégal de la fourniture de l’eau, de veiller à sa qualité. ‘’Il y a beaucoup de problèmes, et tu ne les verras jamais présenter des excuses ou des explications à la population. Depuis plus de dix ans, les gens sont confrontés à ce problème et personne n’en parle, même les populations concernées. Il faut que des mesures soient annoncées par rapport à cela. La SONES et la SDE doivent fournir aux habitants du Dixième une eau potable pour éviter les maladies récurrentes, comme l’insuffisance rénale qui, pour la plupart, frappe les personnes les plus âgées. Cette situation crée un problème de santé publique’’, certifie-t-il.

De ce fait, c’est un combat que doivent mener les citoyens, à son avis.

GAUSTIN DIATTA (THIES)

 

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