Les raisons d’une recrudescence

La violence chez les jeunes prend de plus en plus de l’ampleur dans le pays. Pour mettre fin à cette situation, l’Institut africain de gestion urbaine cherche à cerner le problème et à lui trouver des solutions.
Depuis 18 mois, l’Institut africain de gestion urbaine a entamé, à Dakar, une étude sur la violence chez les jeunes. Son directeur renseigne que ses équipes évoluent dans les communes des Hlm et de Médina Gounass pour la collecte d’informations. Docteur Oumar Cissé explique qu’ils ont voulu, à travers ces recherches, connaitre les aspects essentiels liés à ce phénomène. Il l’a dit, hier, lors d’un atelier organisé par sa structure sur cette problématique.
‘’Il s’agit, d’abord, de savoir si la violence prend comme source les questions socio-économiques, de revenus, d’implication politique, culturelles. L’autre aspect, c’est les questions de politique et de stratégie. Le dernier point concerne l’utilisation des Tic. Nous avons vérifié si ces Tic pourraient constituer une solution dans la recherche d’alternative à cette situation’’, détaille le Dr Cissé.
Ainsi, ces recherches, financées par le Centre de recherche et de développement international du Canada (Crdi), ont montré que les aspects communautaires et familiaux sont déterminants sur les violences sur et par les jeunes. A ce propos, la chargée de projet à l’Institut africain de gestion urbaine, docteur Fatimatou Sall Ndiaye, renseigne qu’ils ont étudié l’exclusion des jeunes et notamment la question de la violence. Il ressort de cette enquête, qui a porté sur plus de 900 jeunes dans les deux communes, que ces derniers ne sont pas simplement victimes, ils sont les auteurs des cas de violence. ‘’En plus des garçons, il y a les jeunes filles qui sont impliquées dans ces cas de violence. L’autre élément, c’est le cadre familial et communautaire. Ce qu’on a remarqué, dans les premières analyses effectuées : ces deux cadres peuvent être déterminants, du fait que le jeune soit acteur ou victime de violence’’.
A l’en croire, les faits de marginalisation, les rejets, le fait que les enfants soient battus peuvent être déterminants dans leur avenir en tant qu’auteurs de violence. En tant que victimes, c’est le secteur aménagement qui ressort. ‘’Tout ce qui concerne la fréquentation des espaces publics, la disponibilité des moyens de transport sont déterminants sur les cas de violence. Nous allons pousser la réflexion pour voir ce qui est spécifique aux garçons et ce qui l’est pour les filles’’, fait-elle savoir.
L’autre aspect concerne l’exclusion socio-économique. Ici, les juvéniles n’arrivent pas à faire des études poussées. La proportion de ceux qui arrivent à des études supérieures ne représente que 16 % dans les deux communes. S’agissant de l’insertion socioprofessionnelle, le taux est de près de 44 %. Ceux qui sont dans le secteur formel ne représentent qu’une infime partie. Pour ce qui est de la violence, il y a une diversité des formes. ‘’On a des cas de violence qui portent sur les atteintes obviant, en termes d’agression, de vol à la tire, de cambriolage et autres qui représentent une très forte proportion, avec plus de 44 % des jeunes victimes. Il y a également les cas de violence physique, verbale qui se distinguent parallèlement aux cas de violence sexuelle et à d’autres mauvaises pratiques auxquelles les jeunes sont victimes, notamment tout ce qui touche à l’alcool et à la drogue’’, souligne le Dr Sall Ndiaye.
Pour la chercheure Mayi Seck Sy, qui a parlé des politiques et stratégies mises en place, il y a une synergie d’acteurs présents, mais avec aussi des difficultés d’intervention. Les acteurs ont d’énormes problèmes sur la sécurisation. Ils ont besoin, selon la chercheure, de plus de sécurisation dans leurs actions, notamment en termes de financement. ‘’Les Asc ont besoin d’avoir des financements réguliers, des besoins de formation. Parce que tout le monde n’a pas la capacité d’intervenir auprès d’un public jeune, surtout difficile, quand il s’agit des gens qui sont déjà dans des situations de violence ou de déviance. Les résultats montrent qu’il y a un réel besoin de gouvernance, c’est-à-dire travailler le lien entre collectivités, mettre en cohérence les interventions des différents acteurs’’.
VIVIANE DIATTA