Publié le 12 Sep 2018 - 19:02
PR DAOUDA NDIAYE (CHEF DU DEPARTEMENT DE PARASITOLGIE DE L’UCAD)

‘’Le palu ne tue pas les populations des grandes villes’’

 

Acteur de premier ordre dans la lutte contre le paludisme au Sénégal et ailleurs dans le monde, le chef du département de parasitologie de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, le Pr. Daouda Ndiaye, a affirmé, avant-hier à Thiénaba (Thiès), que le palu n’inquiète pas trop les citadins, mais plutôt les villageois.  

 

Quand on parle de l’engagement communautaire pour vaincre et repousser carrément le paludisme hors des frontières du Sénégal, il faut se tourner vers l’arrondissement de Thiénaba. Depuis 18 ans, associations de jeunes et de femmes, chefs religieux, infirmier chef de poste etc., appuyés par l’Aism  (l’Association islamique Sopey Mouhamed) (Psl) se battent corps et âme dans ladite commune en vue d’éradiquer cette pathologie. Aujourd’hui, les résultats sont probants. Il y a quelques années, rappelle Khady Niang, une habitante de Darou Mbodj, les cas liés au palu étaient omniprésents dans son village et les populations se rendaient régulièrement dans la commune de Fandène pour se faire soigner. Mais depuis cinq ans, témoigne-t-elle, aucun cas de paludisme n’a été signalé dans le village de Darou Mbodj. Une affirmation appuyée par l’infirmier chef de poste de Thiénaba, Alioune Niass.

Lundi dernier, Darou Mbodj a abrité la cérémonie de lancement du mois du paludisme. Une occasion pour le parrain de rappeler aux uns et autres l’utilité et l’engagement des populations dans la lutte contre le paludisme. De l’avis du Pr. Daouda Ndiaye, sans la communauté, il sera difficile de ‘’maîtriser les problèmes de santé’’. ‘’Les spécialistes que nous sommes gérons beaucoup plus les malades qui viennent dans les hôpitaux. Sans la communauté, nous ne parviendrons pas à maîtriser les problèmes de santé. La santé est d’abord préventive. Et comme elle est préventive, elle est d’abord l’affaire de la communauté. Aucune stratégie préventive et de lutte contre les maladies (tropicales négligées) ou encore le palu ne peuvent connaître des résultats positifs si la communauté n’est pas engagée. Nous devons encourager cette communauté si nous voulons lutter contre toutes les maladies’’, a recommandé le chef du service parasitologie et mycologie de l’hôpital Aristide Le Dantec. 

Chef du département de parasitologie de la Faculté de Médecine et Pharmacie de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, Pr. Ndiaye soutient que le palu ne ‘’tue pas les populations qui sont dans les grandes villes’’. C’est pourquoi conseille-t-il à toutes les communautés de se livrer au combat pour son éradication. ‘’Le palu ne pose pas de problème en milieu citadin. C’est dans les villages qu’il pose problème, parce qu’il y a beaucoup de verdures et de niches écologiques. Toutes les conditions sont réunies pour un développement du cycle biologique du parasite et l’implantation de cette maladie’’, souligne-t-il, non sans mentionner l’éloignement des structures sanitaires. ‘’Heureusement que l’aspect communautaire est très bien compris ici. Il y a des dispensateurs de soins à domicile (Dsdom). Ce sont des personnes ressources sur lesquelles nous avons obligatoirement mission de s’appuyer pour atteindre les objectifs de développement durable (Odd) par rapport à la lutte contre les maladies d’une manière générale’’, a ajouté le Pr. Ndiaye.

D’après ce spécialiste, le paludisme a beaucoup reculé. Un résultat mis sur le compte de l’amélioration de la prise en charge aussi bien chez les enfants que chez les femmes enceintes et de la population d’une manière générale. ‘’D’ici à 2020, le Sénégal va atteindre la phase de préélimination du paludisme à l’échelle nationale afin de faire partie, en 2030, des pays qui vont éliminer cette pathologie à travers l’engagement et la lutte communautaire, la prise en charge et l’engagement de l’État’’, s’est réjoui l’inventeur du test révolutionnaire de diagnostic des parasitémies (Illumigene malaria).

Zéro cas de palu importé

En citant l’exemple de Thiénaba, un exemple dans la lutte contre le paludisme, le Pr. Daouda Ndiaye invite toutes les autres localités du Sénégal à s’inspirer de ladite commune afin de bouter hors du pays cette maladie qui, il n’y a pas longtemps, faisait des ravages au plan international. ‘’A Thiénaba, il y a eu un engagement de personnes.  Des personnes comme El Hadj Diop et la Dsdom qui n’ont ménagé aucun effort pour conjuguer leurs efforts et mettre à la disposition de leur communauté des stratégies préventives telles que l’utilisation des moustiquaires imprégnées, du traitement préventif intermittent mais également et surtout la gestion de l’environnement. C’est pour moi l’occasion de féliciter les populations de Thiénaba et de demander à tous les autres villages du Sénégal de prendre cet exemple’’, a préconisé le Pr. Daouda Ndiaye, révélant que le Sénégal est en phase de préélimination dans la zone Nord (Saint-Louis).

Pour sa part, le président de l’Association islamique Sopey Mouhamed (Psl) (Aism) qui fait de la lutte contre le palu son cheval de bataille à Thiénaba soutient que le mois du paludisme est une occasion pour eux de sensibiliser davantage les chauffeurs de camions qui font la navette entre le Sénégal et les autres pays de la sous-région pour ne pas qu’il y ait un cas de palu importé. D’ailleurs, le thème :’’zéro palu chez les camionneurs inter pays’’ et le slogan : ‘’En plus de ma ceinture de sécurité, ma moustiquaire imprégnée pour me protéger et protéger ma famille’’ de la présente édition du mois sans palu à Thiénaba cadrent bien avec la sensibilisation qu’entend mener l’Aism. Ainsi, du 10 septembre au 10 octobre, des stratégies vont être développées et mises en œuvre dans 75 villages de l’arrondissement de Thiénaba en vue de stopper net le paludisme.

GAUSTIN DIATTA (THIES)

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