Publié le 10 Oct 2020 - 23:04
COMBAT SOCIAL 

Frapp sur tous les fronts  

 

Le Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (Frapp) est actuellement très actif dans les différents combats sociaux. Ce qui montre, quelque part, qu’il a fini de s’imposer devant certains mouvements et partis politiques sénégalais.  

 

Exit, le temps où l’opposition, à travers différentes coalitions, assiégeait la rue pour protester contre le recul démocratique ou la mal gouvernance. Le dialogue national est peut-être passé par là, avec ses effets escomptés dont la pacification de l’espace politique. L’heure est, de plus en plus, à la revendication sociale dont les acteurs majeurs sont plutôt les activistes. Et les plus en vue, en ce moment, sont les membres du Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (Frapp). Ils ont d’ailleurs, avec d’autres mouvements, mis sur pied le collectif Doyna, pour mieux prendre en charge les différentes revendications sociales. Le collectif compte, à cet effet, renouer avec la rue, ce 10 octobre.   

Cette énième manifestation a pour but de dénoncer, entre autres, ‘’les dépossessions foncières, les licenciements arbitraires, les spoliations foncières, les démolitions de maisons, les menaces de déguerpissement, l’exploitation des aspirations des étudiants et l’absence d’infrastructures routières bitumées’’. Ces doléances exhibées au quotidien à travers des rencontres à leur siège, selon les membres du mouvement Frapp, relèvent de la normalité. Un membre du mouvement se réjouit qu’ils bénéficient actuellement de la confiance du peuple. Ce qui fait, renseigne notre interlocuteur, que différentes entités les sollicitent pour une collaboration, afin de résoudre leurs problèmes. 

Le Secrétariat administratif du Frapp indique, dans le même sillage, qu’ils essaient de conformer leurs actes aux statuts du mouvement qui, d’après Guy Marius Sagna, leur imposent de contribuer à mettre au cœur du débat politique, économique, social et culturel de l'Afrique les questions de souveraineté économique et populaire. 

Il faut toutefois rappeler que le combat du Front pour une révolution anti-impérialiste, populaire et panafricaine (Frapp) a d’abord été anticolonial, avant de devenir social.  Frapp a débuté par la lutte contre les Accords de partenariat économique (APE).  

On est en 2014 et ses membres intègrent la coalition nationale Non aux APE qui deviendra, en 2017, le Front anti-APE, anti-CFA. C’est cette dernière entité, avec d'autres organisations, qui donnera naissance à la campagne "Pour la souveraineté monétaire France dégage", en novembre de la même année. Le temps aidant, les membres de ce mouvement s’illustrent sur plusieurs fronts, notamment les luttes sans merci contre les multinationales étrangères. 

D’ailleurs, le mouvement, avec son slogan ‘’Auchan dégage’’ et grâce à ses multiples actions, a réussi à obtenir du gouvernement sénégalais, en 2018, un décret réglementant l’implantation des supermarchés.  

Aujourd’hui, même si les contestations continuent dans ce sens, force est de constater que le front s’oriente de plus en plus vers les combats sociaux. Il ne se passe pas une semaine sans que le siège du mouvement n’accueille différentes entités pour porter leurs revendications.  Toutes les catégories socio-professionnelles y passent : des travailleurs de l’industrie alimentaire au cercle des étudiants orientés dans le privé, en passant par l’Association nationale des préparateurs en pharmacie diplômés d’Etat du Sénégal et l’Association nationale des prothésistes-dentaires du Sénégal.  Un ensemble de doléances portées par le Frapp et qui a fini de le mettre au-devant de la scène politico-sociale. 

 Les animateurs du mouvement souhaitent eux, cependant, rester cohérents dans leur démarche. ‘’Les membres du front ne cherchent pas à imposer le mouvement. On ne cherche pas à éclipser, ni des mouvements ni des plateformes. Nous sommes un mouvement citoyen social de masse anti-impérialiste, populaire et panafricain’’, précise Guy Marius. 

 ‘’Ce n’est pas un mouvement de conciliation, mais plutôt d’opposition’’   

Mais, du côté de la majorité présidentielle, on a une autre lecture des actes posés par ces ‘’révolutionnaires’’. Le conseiller politique du président Macky Sall les considère comme une autre forme d’opposition qui ne dit pas son nom. Aux yeux du Pr. Luc Sarr, les revendications telles qu’elles sont portées et menées ressemblent à des postures d’opposition. A l’en croire, le mouvement n’agit pas dans une perspective de conciliation, mais plutôt d’opposition. 

‘’Aujourd’hui, dit-il, il y a une transmutation qui s’est opérée au sein de ces mouvements d’activistes. Leurs leaders ne sont pas neutres. Ce sont des opposants qui n’évoluent pas dans le cadre d’un parti classique, structuré de manière traditionnelle, mais dans des formes nouvelles d’intervention. Guy Marius Sagna n’est pas membre du pouvoir. Donc, c’est un opposant dans la définition primaire’’, insiste le président de la Cellule d’appui à la veille stratégique de l’Apr.  Le Pr. Sarr se désole ainsi que les membres du Frapp ‘’n’apprécient jamais les actions positives du pouvoir, mais cherchent plutôt à mettre en exerce les carences du régime’’. 

 Le socio-anthropologue Abdou Ndukur Kacc Ndao trouve, lui, que le Frapp, à travers ses activités, grignote les prérogatives connues des partis politiques. Ce qui, dit-il, n’est pas seulement le propre du Front patriotique, mais de tous les mouvements d’activistes comme Y en a marre ou d’autres. A la question de savoir ce qui différencie le Frapp des autres mouvements qui sont là, compte tenu de sa forte présence sur la sphère médiatique, M. Ndao souligne qu’il a une grande visibilité, mais il reste convaincu qu’on ne peut pas réduire l’édile social sénégalais autour d’un seul mouvement. A ses yeux, il doit y avoir une cartographie beaucoup plus élaborée, même si, ponctuellement, dit-il, parmi ces organisations, certaines sont plus ou moins en léthargie ou n’ont pas de visibilité médiatique requise.  Le socio-anthropologue est d’avis que la structure de Guy Marius Sagna et ses compagnons est extrêmement dynamique sur des revendications d’un certain nombre d’injustices et mène une activité multiforme.     

Le professeur titulaire de sociologie et d’anthropologie au Département de sociologie de l’Ucad, Sylvain Landry Birane Faye, considère que le Frapp n’a pas encore éclipsé les autres mouvements. En ce sens, il analyse que les orientations sont différentes. ‘’Guy Marius Sagna est particulier. Il se définit comme un militant de la gauche anti-impérialiste et panafricaine, un activiste politique. Cela veut dire que son positionnement est différent de celui de Y en a marre qui s’active plus dans la citoyenneté, la sensibilisation pour le changement de comportement’’, déclare M. Faye.

Il reconnait, toutefois, qu’ils ont une plus grande présence, mais cette visibilité, précise-t-il, est soutenue par les médias, parce que ce sont des contestataires. 

Monsieur Faye indique, en outre, que la personnalité de Guy Marius Sagna a davantage contribué à la popularité du mouvement. Ce qui donne l’impression qu’ils effacent les autres.  ‘’On traite beaucoup plus des actions de Guy Marius Sagna, de ses sorties, parce que c’est de la contestation politique, alors que les autres mouvements citoyens connaissent aussi leurs champs d’intervention au Sénégal et sont en train de faire un travail. La différence réside dans le militantisme qui serait beaucoup plus actif. Guy Marius Sagna n’a pas la même aura qu’Alioune Sané, Thiat, Kilifeu ou Fadel Barro. Ce n’est pas forcément une léthargie, mais on s’intéresse moins à ces gens-là’’, explique le socio-anthropologue.  

Du côté du Frapp, on clame ‘’un engagement, un dévouement, mais aussi une volonté de restituer au peuple ce qui lui appartient. Il s’agit, dit-on, de soutenir les luttes sénégalaises et celles africaines de manière générale. ‘’A travers ses actions, le Frapp essaie de contribuer à rendre plus visibles et audibles les luttes étouffées, muselées, bâillonnées de notre peuple’’, détaille Guy Marius Sagna.  

Rapports entre le Front patriotique et les partis politiques classiques

Au-delà de cette démarcation avec les autres mouvements, quels sont les rapports entre le Front patriotique et les partis politiques classiques ? Le mutisme de l’opposition sur le terrain social n’a- t-il pas été en sa faveur ? Sur ces interrogations, le membre du parti au pouvoir, Pr. Luc Sarr, estime que l’opposition n’a pas déserté l’espace. Seulement, dit-il, elle a compris que la bataille contre le pouvoir n’est pas toujours productive. ‘’Tous les pays qui ont réussi dans le monde ont bénéficié d’un minimum de consensus politique et social. A chaque fois que les revendications ont porté sur une approche binaire, elles ont rarement abouti. Ce modèle de prise en charge des revendications des populations uniquement pour s’opposer, n’est pas du tout dans le sens de rechercher des solutions’’, fait savoir le conseiller en politique du président de la République.  

Pour lui, l’opposition a trouvé une nouvelle manière de marquer sa présence, qui est souvent aux antipodes de ces groupes. ‘’D’autres utilisent des voies plus adéquates pour régler ces questions, en les portant à l’Assemblée nationale ou dans certains départements ministériels dédiés. C’est la manière de faire qui pousse certains à croire que ces groupes sont les seuls à même de régler les problèmes, alors que cela n’est pas le cas’’, croit savoir le Pr. Sarr.  

Le socio-anthropologue Sylvain Landry Birane Faye reconnait, pour sa part, que le Frapp est certes dans la dénonciation, mais le mouvement est loin de prendre la place de l’opposition dans l’espace politique. ‘’Du point de vue de l’activité sur le terrain, ils sont très présents et sont dans la contestation sur plusieurs sujets, sur différentes questions sociales. Ils sont beaucoup plus présents que les partis politiques d’opposition’’, analyse M. Faye. 

D’après le spécialiste, à travers le Frapp, résonne le discours amplificateur de l’opposant Ousmane Sonko. Ce qui n’est pas sans conséquence sur la portée du message du mouvement. ‘’C’est comme s’il s’agit d’un discours qui relaie Sonko avec qui ils ont une certaine accointance, et cela dérange les autres. Du point de vue politique, Sonko n’a pas une plus grande percée que certains partis politiques connus tels que le Rewmi, le Pds’’, dit-il.

Pire, notre interlocuteur signale que le discours du candidat de la coalition Sonko Président vis-à-vis de ses pairs, ne milite pas en faveur d’un rassemblement de l’opposition.  

Les membres du Frapp ont pourtant été très clairs, en ce qui concerne la politique. D’après le secrétaire administratif, leur structure est un mouvement citoyen avec des statuts qui interdisent la possibilité, pour le Frapp, de faire campagne pour un candidat ou une liste de candidats. ‘’Le Frapp est indépendant de tout parti politique. Au sein du Frapp, il y a des Sénégalais qui ne sont membres d’aucune formation politique et d’autres qui militent dans des partis’’, précise-t-il. 

Représentativité

Avec cette omniprésence du mouvement dans le combat social, se pose la question de sa représentativité, aussi bien à Dakar que dans les localités reculées. Et notamment celle de sa figure de proue, Guy Marius Sagna. Le sociologue Sylvain Faye est d’avis que tout tourne autour de l’ancien directeur de campagne d’Ousmane Sonko. Du point de vue sociologique, fait-il remarquer, dans une organisation avec différentes composantes, il y a toujours une personnalité charismatique qui fait finalement confondre le mouvement avec sa personnalité. 

‘’Quand on parle de Frapp ou de Aar Li Nu Bokk, on pense tout de suite à Guy Marius Sagna, parce qu’il y a une personnalité forte qu’il a développée. Il a connu de nombreuses gardes à vue. Il a aussi joué un rôle dans le mouvement du 23 Jin. Il a glané un capital symbolique assez important, qui fait que ce n’est pas parce qu’il n’y a pas d’autres composantes dans le Frapp, mais le mouvement se confond quelquefois à Guy Marius Sagna, en raison de la personnalité charismatique de ce dernier’’, analyse M. Faye. Le sociologue souligne, en outre, le fait que le secrétaire administratif du Frapp ait été de tous les combats et entretienne des relations avec des activistes comme Kémi Séba.  

Mais le secrétaire administratif refuse de réduire le mouvement à sa seule personne. A l’en croire, les activités qu’ils mènent ne pourraient être déroulées par un seul membre. Guy indique d’ailleurs que le Frapp a une politique de leadership collectif qui lui permet d'envoyer sur les plateaux des médias des profils nombreux et variés. ‘’Les Sénégalais connaissent les visages d’Alioune Badara Mboup, de Fatima Mbengue, de Bentaleb Sow, de Pape Abdoulaye Seck, de Diao Diallo, de Daouda Guèye... En réalité, le Frapp est surtout très impliqué dans les luttes du peuple sénégalais, avec une politique d'implantation dans les différents départements du Sénégal. Autant de choses qui donnent l'impression d'une grande mobilité’’, indique Guy Marius Sagna.  

De son côté, un autre membre du mouvement reconnait que la personne de Guy Marius Sagna est beaucoup plus apparente et reste impliquée dans beaucoup de combats.  Toutefois, indique notre source, le front est également porté par d’autres membres qui, rappelle-t-il, ont livré un combat âpre pour la libération de M. Sagna, à chacun de ses séjours carcéraux.    

Des combats remportés… 

Abdou Ndukur Kacc Ndao, lui, n’est pas trop convaincu par ces assertions. Il doute de la massification du Frapp. ‘’C’est aussi le propre des mouvements sociaux ou activistes d’être efficaces et dans la communication et dans les activités. Mais si nous regardons très bien les dynamiques massives, on ne peut pas les comparaitre à d’autres partis ou syndicats qui sont plus représentatifs au plan démographique. Cela renseigne sur un fait : on peut être deux ou trois personnes et avoir de la visibilité. Je pense que Guy Marius Sagna, sous ce rapport également, s’est imposé de par ses actions d’abord personnalisées. Même s’il y a derrière un certain nombre de gens qui le suivent, il comprend le sens de la communication sociale. Je pense que c’est la chose qui fait qu’il est plus connu’’, explique M. Ndao.   

Le mouvement peut, pendant ce temps, toujours se glorifier des nombreux combats remportés ou en phase d’être remportés. Sur le tableau de victoires à son actif, le Frapp est heureux d’accrocher : le cas des animateurs polyvalents de la case des tout-petits, restés, relève-t-on, plus de 5 ans sans salaire, à cause d'un système de bénévolat qui ne devait pas durer plus de deux ans. ‘’La lutte aux côtés de ces enseignants a permis la formation et la régularisation de près d'un millier d’entre eux. Le Frapp est aussi heureux d'avoir participé à la lutte des 189 ex-contractuels de la Senelec, des soutiens de famille qui étaient restés 3 ans sans salaire et qui bénéficient aujourd'hui de contrat’’. 

Il y a également le cas de la petite Aïssatou Cissé, fille d'un militant de l'APR, renversée par le convoi d’Abdoulaye Timbo à Pikine, lors d'une campagne électorale. ‘’Elle fut abandonnée sans soin. Le Frapp, à travers sa structure départementale de Pikine, s’est mobilisé pour que sa famille bénéficie de soutiens afin que la petite Aïssatou Cissé puisse être soignée’’. Le Collectif des anciens travailleurs de l’Aéroport bus service (ABS), en difficulté depuis 2016, n’ont, eux, pas encore trouvé de solution à leurs problèmes. Après leur expulsion de la société, avec la traque des biens mal acquis, ils ont toqué à toutes les portes sans succès.  D’après Ababacar Kane, ils ont eu beaucoup de promesses de réintégration, sans suite. Le Frapp, avec qui ils sont en collaboration depuis juin dernier, leur a, dit-il, permis d’intégrer la plateforme Doyna. ‘’On n'a pas encore de résultats concrets et la situation n’a pas encore évolué, mais on est très optimiste, dans la mesure où on a découvert beaucoup de choses avec le Frapp. Notre collaboration nous a permis de rencontrer d’autres victimes, que ce soit du foncier, du monde du travail, des victimes estudiantines’’, fait savoir M. Kane.  

Toutefois, pour le président de la Cellule d’appui à la veille stratégique de l’APR, la plupart des causes défendues par le mouvement ne sont pas nouvelles. A l’en croire, c’est plutôt des questions anciennes et non encore jusqu’à ce jour résolues qui lui sont soumises. Et d’après le Pr. Luc Sarr, ce n’est pas du tout dans le sens d’une résolution, mais plutôt pour se faire entendre. ‘’Les populations savent que ces groupes ne peuvent pas régler leurs problèmes, mais elles savent qu’ils peuvent porter auprès des médias et de l’opinion leur situation’’, fait remarquer le conseiller politique du président de la République.   

En attendant, pour avoir les moyens de sa politique, le Frapp vend des cartes de membre pour l’adhésion au mouvement, initie des cotisations mensuelles, bénéficie du soutien des bonnes volontés ou demande tout simplement un paiement à ses hôtes pour l’organisation d’une rencontre avec la presse dans ses locaux. Un budget pour la prise en charge des dépenses fixes du siège… 

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SAHITE GAYE, ENSEIGNANT-CHERCHEUR EN COMMUNICATION DES ORGANISATIONS AU CESTI/UCAD 

‘’ Le message du Frapp passe plus que celui de l’opposition’’ 

Le Frapp est de plus en plus sollicité dans certains combats sociaux. Est-ce que le message du mouvement a une portée ? 

Du moment où ils sont sollicités, oui. Leur siège est presque devenu un mur de lamentations, un carrefour de tous ceux qui ont quelque chose à réclamer ou à dénoncer. Cela veut dire que leur message passe. Il faudra se dire aussi que l’un des porte-étendards de ce mouvement a une visibilité médiatique. Quand on parle de Frapp, on fait l’association avec Guy Marius qui, du point de vue de la perception des Sénégalais, est du côté des faibles. Cela veut dire que le message passe. Ils sont plus dans ce que l’on appelle aujourd’hui les nouvelles formes de l’agir citoyen. Ce qui les préoccupe, c’est tout ce qui concerne le social. C’est comme s’ils étaient non pas du côté du pouvoir, mais plutôt de la population. Le contexte est aujourd’hui très favorable, parce qu’on a beaucoup de crises sociales et c’est comme s’il y avait une ‘’dépréciation’’ de la communication ou des actions politiques. C’est ce qui fait que leur message passe.  

Est-ce qu’ils ne sont pas en train de se substituer aux politiques, particulièrement à l’opposition ?   

Cela montre un peu l’échec du contre-pouvoir que devait être l’opposition et leur message passe plus que celui de l’opposition qui est quasi-inexistante, ces derniers temps, alors qu’il y a beaucoup de questions sociales. 

L’autre élément est qu’ils font de la communication pragmatique, avec des actions qui retiennent l’attention. Donc, ils sont plus proches de la population. Le terrain laissé libre par l’opposition est en train d’être occupé par ces mouvements-là.  

Le secrétaire administratif du Frapp, Guy Marius Sagna, a battu campagne pour une coalition politique, à la dernière Présidentielle. Cela ne risque-t-il pas de brouiller le message du mouvement ? 

A un moment donné, cela peut être un handicap, parce que les Sénégalais se détournent de plus en plus des chapelles politiques. Ce qui fait un peu la force du Frapp, c’est qu’on ne peut pas, aujourd’hui, l’associer à un parti. Guy Marius Sagna, même s’il parle de son appartenance politique, il le fait de manière transparente. Cela peut être aussi un handicap, si on n’arrive pas à dissocier les deux organisations. Cela peut, à un moment donné, avoir une interférence par rapport à son action. Mais jusqu’à présent, il a réussi à dissocier les deux.  

Est-ce que vous avez décelé des limites dans leur communication, des choses à améliorer ? 

C’est peut-être par rapport à l’action. Le plus souvent, quand elle est accompagnée de la violence, cela peut ternir l’idéal ou l’objectif qui est derrière. C’est sur la forme. C’est vrai qu’ils sont dans l’action, mais il faudra peut-être revoir les modalités d’action. Il faudra qu’il diversifie les visages de la lutte. Quand on parle de Frapp, on parle de Guy Marius Sagna, de Nittu Deug, on fait allusion à Karim… Il faudra qu’il soit aussi dans les régions. Il ne faut pas limiter tous leurs combats à Dakar ; qu’ils puissent créer, au niveau des départements, des figures émergentes. La décentralisation ne doit pas se limiter que dans l’organisation.  

HABIBATOU TRAORE 

 

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