Publié le 13 Sep 2012 - 20:14
AFFAIRE YÉRIM SECK-AISSATA TALL

Les dessous d'un renvoi

Arrêté pour le présumé viol de la fille du magistrat Boubou Diouf Tall, depuis le samedi 8 septembre dernier, le journaliste Cheikh Yérim Seck a fait hier sa première comparution, devant le tribunal des flagrants délits de Dakar. Mais, pour absence des témoins, son procès a tout simplement été renvoyé sur la demande de son conseil et malgré l'opposition de la partie civile. Mais derrière ce renvoi, se cache une volonté de la défense de prendre du temps pour mieux affûter ses armes.

 

Le Procès opposant le journaliste Cheikh Yérim Seck et Aïssata Tall n'a pas eu lieu hier. Il a été renvoyé sous huitaine pour cause d'absence des témoins. Avant d'en arriver à ce renvoi, les débats entre les pools d'avocats des deux protagonistes, sur l'opportunité du renvoi du procès, ont été houleux. Si le conseil du prévenu a plaidé le report à une date ultérieure, en prétextant l'absence des témoins, la partie civile n'a voulu rien entendre. ''Nous pouvons inscrire l'audience en fin de rôle, aller chercher les témoins et reprendre l'audience en début d'après-midi'', a proposé Me Bourso Pouye, membre du pool d'avocats de la partie civile.

 

Une proposition agréée certes par le juge, mais rejetée par Me Aly Fall et Cie qui assurent la défense de Yérim Seck. ''Nous demandons le renvoi du procès parce que les témoins ne sont pas présents'', ont-ils insisté. Une posture que le conseil de la partie civile a expliqué par le fait que la défense n'est pas prête. Toutefois, il a reconnu qu'elle avait le droit de demander le renvoi du procès. Au finish, le juge a tranché en faveur de la défense, en renvoyant le procès jusqu'au mercredi 19 septembre prochain.

Aussi faut-il relever que derrière ce renvoi, se cache une stratégie des avocats de Cheikh Yérim Seck de se donner plus de temps, pour mieux organiser la défense du journaliste.

 

Aïssata Tall sera absente le 19 septembre

 

Il faut dire que le renvoi n'arrange guère les affaires de la partie civile. D'autant plus que la jeune bachelière de 19 ans devait se rendre en France hier matin. Ainsi que l'a expliqué Me Bourso Pouye : ''La partie civile est étudiante. Elle est inscrite à Montpellier, elle doit partir impérativement aujourd'hui (Ndlr: hier). Elle devait partir ce matin''. L'avocat a notifié, dans la foulée, qu'ils ont été obligés de repousser le vol et de payer des pénalités pour que la partie civile puisse assister à l'audience. ''Nous, nous étions prêts à retenir cette affaire'', dira-t-il.

 

Ainsi, selon Me Ousmane Sèye, lui aussi membre du pool d'avocats de la partie civile, Aïssata Tall n'est pas tenue d'assister à la prochaine audience. ''Sa présence n'est pas obligatoire, dit-il. Elle peut aller s'inscrire à Montpellier, sinon elle va perdre doublement. Elle a perdu sa virginité, il ne faut pas qu'elle perde son inscription.'' Cette révélation a fait vivement réagir la défense. ''Dans ce type d'infraction, dira Me Aly Fall, la présence de la partie civile en général est nécessaire. Elle est même fondamentale''. Le conseil a ajouté que ''c'est la seule source d'accusation qu'on ait''. ''Si elle n'est pas présente, poursuivra-t-il, elle peut le faire, elle en a tous les droits ; mais on en tirera les conséquences.''

 

Les PV qui accablent Yérim

 

Le patron de Dakaractu a été arrêté samedi 8 septembre pour le présumé viol d'Aïssata Tall, fille du magistrat Boubou Diouf Tall. Selon la version de la plaignante, Cheikh Yérim Seck l'aurait contrainte à un rapport sexuel non consentant. Pour le prévenu, la plaignante avait bel et bien consenti à coucher avec lui. Mais, il est accablé par les procès-verbaux du constat, de l'audition et le PV scellé. Dans ce dernier figure un drap blanc et une serviette tachés de sang, le slip de couleur rouge de la victime, un morceau de papier hygiénique et une compresse utilisée par Aïssata Tall, en plus d'un préservatif Manix utilisé par le présumé violeur.

 

Dans le rapport d'audition, les témoins, des employés de l'auberge Madamel où s'est déroulé le présumé viol, ont relaté que lorsqu'ils ont entendu un cri strident, ils se sont précipités devant la chambre pour y voir plus clair. Mais, Cheikh Yérim leur aurait dit qu'il ne se passait rien, qu'il voulait tout simplement coucher avec la fille, mais que cette dernière a eu peur. Ces témoignages, a souligné Me Ousmane Sèye, sont fondamentaux pour l'éclatement de la vérité dans cette affaire. En outre, l'avocat a soutenu que les faits reprochés à Cheikh Yérim Seck sont d'une extrême gravité. En effet, le procès-verbal de constat a décelé chez Aïssata Tall un saignement utérin, avec des lésions endo-vaginales occasionnées par une perforation hyménale.

 

 

 

Coulisse d'une audience hyper médiatisée

 

Initialement prévu à 10 h, le procès opposant Cheikh Yérim Seck à Aïssata Tall a démarré hier avec quelques minutes de retard.

 

Annoncé à la barre, Cheikh Yérim Seck est apparu avec un visage émacié, visiblement marqué par son séjour carcéral. Le journaliste avait la mine déconfite, l'air fatigué et le regard hagard. Drapé dans un boubou bleu clair, il semblait perdu. Il a passé un moment considérable à serrer la main de ses avocats et à faire des signes de la main à des connaissances parmi l'assistance. Le procès renvoyé, il est retourné dans l'antichambre du box des détenus, sous une escorte pénitentiaire. Le journaliste devra encore séjourner une semaine en prison, avant d'être édifié sur son sort. En attendant, il est privé de portable...

 

Il faut signaler que le palais de justice a refusé du monde, hier. C'était la grande mobilisation des parents, amis et proches de la plaignante, comme du prévenu qui, en plus de ces derniers, a pu compter sur le soutien de quelques-uns de ses confrères dont Yakham Mbaye, directeur de publication du journal Libération et le journaliste Adama Sow.

 

Toutefois, ce dernier est venu avec sa casquette de président de l'Ong Grave. Il a plaidé pour un changement du format de l'audience, afin de ne pas trop exposer la fille, devant ce beau monde qui a pris d'assaut, tôt le matin, la salle d'audience de la première composition du tribunal des flagrants délits de Dakar, obligeant d'ailleurs les forces de l'ordre à fermer les portes à un moment donné. Dès lors, les retardataires pouvaient rester devant le hall du palais de justice ou se bousculer devant l'unique entrée (celle des avocats) laissée ouverte, mais gardée par un officier gendarme, pour tenter de suivre à partir de là le procès.

 

 

ASSANE MBAYE

 

 

 

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