Publié le 29 Apr 2015 - 09:37
ATTRAIT A LA BARRE POUR ABUS DE CONFIANCE

Me Babou risque une condamnation

 

L’avocat politicien Me Abdoulaye Babou a été attrait hier à la barre pour abus de confiance. Il risque six mois assortis du sursis et une amende de 500 000 francs CFA.

 

La Chambre spéciale de la Cour d’appel chargée de juger les avocats s’est penchée hier sur l’affaire opposant le nommé Bienvenue Ntab à Me Abdoulaye Babou. L’avocat politicien est accusé d’abus de confiance portant sur la somme de 33 millions de F CFA. Il encourt une peine de six mois assortie du sursis et une amende de 500 000 F CFA.

Les faits qui valent à l’avocat des poursuites sont liés à une transaction portant sur une maison. Selon Daniel Ntab, représentant de la partie civile, un courtier du nom de Seydou Sow avait mis son frère en rapport avec Me Babou, pour l’acquisition d’une maison. Après négociation, les deux parties sont tombées d’accord sur le prix de 28 millions, plus un montant de 5 millions destiné aux frais de mutation.

‘’Bienvenue voulait lui remettre un chèque, mais Me Babou a exigé du liquide’’, a raconté Daniel qui a précisé que la remise a eu lieu à la banque. Il a ajouté que son frère n’avait pas l’intégralité des 33 millions et restait devoir une somme reliquataire d’un million de F CFA. ‘’Lorsqu’on a appelé Me Babou pour lui verser le reliquat, il nous a dit qu’il se trouvait à Diourbel, chez son marabout et nous a mis en rapport avec son épouse. Après remise, elle nous a fait une décharge et nous a offert un billet de 5 000 F, en guise de transport’’, a précisé le témoin Abdoulaye Diop, hier à la barre.

Toujours est-il que la transaction a eu lieu en novembre 2007 et jusqu’à présent, l’émigré n’arrive pas à obtenir sa maison. Et chaque fois qu’il a interpellé Me Babou pour obtenir le titre foncier, l’avocat a évoqué les lenteurs de la justice. Jusqu’à ce que la famille Ntab tombe des nues en apprenant que la maison appartenant à des héritiers est placée sous séquestre. ‘’Est-ce que vous avez demandé la restitution de votre argent’’, a lancé le président Demba Kandji à la partie civile. Celle-ci de lui rétorquer avec désolation : ‘’Il ne voulait plus nous recevoir et lorsqu’un jour, il nous a convoqués dans son bureau, il m’a traité comme un enfant.’’ C’est pourquoi, las de courir derrière son argent, M. Ntab a porté plainte contre la robe noire.

Mais devant la barre, Me Babou a juré sur le Saint Coran que ni son cabinet ni lui ne sont mêlés en rien dans la transaction. Il a nié avoir signé un quelconque contrat de vente. L’avocat accuse l’un des héritiers, Serigne Mor Ndao, son clerc d’alors, d’avoir vendu la maison de son père, à l’insu des autres héritiers. ’’Alors que j’étais dans le gouvernement et occupé par mes activités politiques, Serigne Ndao a fait son coup dans mon dos’’, s’est défendu le prévenu. L’ancien ministre nie catégoriquement avoir signé l’acte de vente. Le président Kandj lui a alors demandé pourquoi Serigne Ndao lui a versé l’argent. ‘’Il me l’a remis en tant que dépositaire et mandataire de la famille Ndao’’, s’est justifié Me Babou, tout en précisant avoir reversé les 28 millions dans son compte CARPA.

Plainte contre son ex-clerc et Me Serigne Ndao

Toutefois, il s’est empressé d’ajouter que Ndao a finalement tout retiré. Sauf que, a confié Me Babou, ‘’il a fait le partage de ‘’Bouki’’ l’hyène, en donnant des miettes à ses frères et sœurs, en leur faisant croire que c’est moi qui leur versais l’argent’’. Il a ajouté que les 5 millions représentent le montant de ses frais et de ses honoraires liés à la procédure d’expulsion. L’avocat, qui dit avoir été atteint dans son honneur par cette affaire, a soutenu avoir même porté plainte contre son ex-clerc pour vol au préjudice de l’employeur et faux et usage de faux. La plainte a été déposée le 12 novembre 2012 au niveau du 2ème cabinet d’instruction. L’avocat a même porté plainte contre un de ses confrères, notammentl’avocat de Serigne Ndao qu’il accuse d’avoir manipulé Ntab.

Mais le principal témoin a balayé d’un revers de la main les dénégations de Me Babou. Selon Abdoulaye Diop, l’acte de vente a été bel et bien signé par l’avocat. Il a ajouté que c’est après négociations que celui-ci a appelé Serigne Ndao pour rédiger l’acte de vente. Seydou Sow a également affirmé que Me Babou a conclu la transaction après l’échec de la négociation avec l’actuel député Farba Ngom qui ne disposait pas des 28 millions.

Compte tenu de tous ces éléments, Me Khalilou Sèye a demandé à la Cour de déclarer son confrère coupable. Pour le préjudice, il a réclamé 45 millions de F CFA, non sans ajouter que c’est après l’échec des négociations que son client a saisi la justice. Le substitut général Alioune Ndao a abondé dans le même sens pour indiquer que ‘’ce n’est pas de gaieté de cœur’’ que le parquet général traduit un avocat devant la Chambre spéciale. Par rapport aux faits, le parquetier a estimé qu’ils sont établis, d’autant plus que le nom du prévenu est mentionné sur le contrat de vente. D’une part, Me Babou ‘’a agi en toute connaissance de cause, alors qu’il n’avait pas le droit d’aliéner les biens des héritiers’’. D’autre part, le substitut général considère que le prévenu ne devait pas, en tant que conseils des héritiers, accepter que Serigne Ndao vende un bien collectif.

Pour Me Adnan Yakhya, le seul responsable dans cette affaire c’est Serigne Ndao et il devrait être poursuivi pour escroquerie. Quant à son client, il a demandé qu’il soit blanchi. ‘’S’il avait quelque chose à se reprocher, il allait mettre la main à la poche, car il en a les moyens’’, a conclu Me Adnan. Délibéré le 26 mai.

FATOU SY

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