Publié le 13 Dec 2013 - 21:10
ISMAËL ISAAC, CHANTEUR

Un disciple de Nelson Mandela

 

A une époque où des mouvements de prestation se faisaient entendre partout dans le monde pour dénoncer l’apartheid en Afrique du Sud et réclamer la libération de Nelson Mandela, les artistes d’horizons divers s’étaient mobilisés aussi. Dans la sous-région ouest africaine, des chanteurs de renommée internationale comme Youssou Ndour (Nelson Mandela en 1985), Alpha Blondy (Apartheid is nazisme en 1985) et Oumar Pène (Soweto en 1986) avaient contribué à l’élan de solidarité panafricaine à l’égard de leurs frères et sœurs d’Afrique du Sud. C’est dans cette mouvance que Diakité Issiaka Kaba dit Ismaël Isaac s’était révélé en  chantant la liberté de Madiba Nelson Mandela.

 

En prison ou libre, Nelson Mandela a été magnifié à coup de plusieurs concerts et de chansons par les musiciens  d'origines diverses au talent incontestable, dans les plus grandes villes du monde. Jamais une légende vivante n’a aussi été magnifiée dans l’histoire du continent africain. Ils sont certes nombreux les artistes sénégalais et africains ayant composé des chansons pour dénoncer le régime de l’apartheid, ou louer l’abnégation de Nelson Mandela. Mais Ismaël Isaac est une exception.

Lorsque l'Organisation des Nations-unies décrétait 1985 année internationale de la jeunesse, Ismaël Isaac était âgé de dix-neuf ans. Auprès des ''loubards'' (gros bras) de Treichville, il commence à chanter en reprenant le titre Emma des frères Touré Kunda. Découvert par Georges Kouakou l’ancien claviériste de l’orchestre de la Radiodiffusion et télévision ivoirienne (RTI), Ismaël Isaac passe à l’émission Première chance présentée par feu Roger Fulgence Kassy qui a révélé de grands noms de la musique ivoirienne tels qu’Alpha Blondy et Meiway. Ce premier passage sur le petit écran pour une émission retransmise en direct devient un succès.

Les Abidjanais tombent sous le charme vocal d’Ismaël Issac en compagnie des frères jumeaux Hassan et Oussein Keïta. Koné Dodo, ancien manager d‘Alpha Blondy et actuel Directeur du palais de la culture d’Abidjan, ne va pas hésiter à produire Liberté, le premier album d’Ismaël Isaac et des frères Keïta. C’est en chantant pour réclamer la liberté de Nelson Mandela qu’Ismaël Isaac s’est donc révélé au monde de la musique en 1986. Le titre Libérez Nelson Mandela devient un succès. Car pour la première fois en Côte d’Ivoire un artiste avait osé chanter pour réclamer la liberté du leader charismatique de l’ANC.

Au courant de la même année, Tchilaba, un second opus, viendra confirmer les talents de chanteur Ismaël Isaac. Victime de la poliomyélite depuis son bas âge, le gamin de Treichville impose un style qui lui est propre avec le ‘‘Nouchi’’ (argot ivoirien) pour faire passer les messages destinés aux jeunes. Toujours en complicité avec les frères Keïta, Ismaël Isaac enrichit sa carrière avec Yatiman en 1989. Dans toutes les dix communes d’Abidjan, les paroles des chansons comme Bako, Alidjine, Iran-Irak, Yatiman (Orphelin) sont fredonnées par des jeunes mélomanes.

La vidéo de la chanson Children of Africa passe régulièrement dans la programmation musicale de la RTI. Ismaël Issac finit par imposer à ses compatriotes une musique reggae à la sauce locale avec la rythmique des danses ‘’Niama niama’’ et ‘’Zigehi’’. En 1990, la carrière d’Ismaël Isaac prend un nouveau départ. Il évolue seul désormais après le décès d'Oussein l'un des frères Keïta. Boncana Maïga signe les arrangements de l’album Rahman qui annonce le début d’une carrière en solo.

Pour la première fois, Ismaël est convoité par de grands majors du disque tels qu’Island record et Polygram  à Paris.  En 1993, il sort Taxi jump avec Island. Encore une fois, Ismaël séduit le public hexagonal en adaptant Sauver l’amour de Daniel Balavoine à la musique reggae, sept ans après sa disparition dans le désert du Ténéré en compagnie de Thierry Sabine le concepteur du rallye Paris-Dakar.

‘’Bob Marley a eu pour guide Haïlé Selassie, Burning Spear se reconnaît en Marcus Garvey, notre grand frère Alpha Blondy s’identifie en Houphouët Boigny. Ismael Isaac vénère Nelson Mandela’’, telles sont les premières paroles de la chanson Thientigui (Le vertueux en Dioula) que l’enfant de Treichville a dédiée au monument de la lutte contre l’apartheid, Nelson Mandela, dans l’album Treich feeling  sorti en 1997 sous le label Syllart production. Trois ans plus tard, Ismaël Isaac sort l’album Black system et récidive avec ‘’Tchefari’’ (Le guerrier) pour rappeler à ceux qui doutaient des paroles de sa toute première chanson Libérez Nelson Mandela. ‘’Aujourd’hui est un grand jour.

Le combattant de la liberté arbitrairement jeté en prison hier, rit de sa belle victoire aujourd’hui. J’avais prédit qu’un jour Nelson Mandela triomphera. Ce jour est enfin arrivé’’, rappelait-il. Depuis 2000, l’artiste multiplie les prestations à travers le monde. Pendant la crise postélectorale de 2011, il sort le single ‘’Le train de la paix. C’est au moment où il annonce la sortie de son prochain album dont un duo avec le rappeur français La fouine en cette fin d’année 2013, que Nelson Mandela son guide spirituel a tiré sa révérence, le 5 décembre dernier. Il reste à espérer qu’Ismaël Isaac va rendre un ultime hommage à la légende vivante qui l’a toujours inspiré, pour immortaliser l’œuvre grandiose de la figure fondamentale de la nation arc-en-ciel.

Almami Camara

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