Publié le 8 Jan 2015 - 02:17
PERSPECTIVES 2015

Quels chantiers pour la culture ?

 

Cette année encore, les enjeux majeurs dans le secteur de la culture seront (comme toujours) ceux du cinéma, de la diversité culturelle et du patrimoine, de l’animation culturelle et, enfin, des droits des artistes.

 

La culture au Sénégal est souvent, à tort ou à raison, considérée comme le secteur d’activité socioprofessionnel le moins structuré du pays. Cette année encore, c’est un certain flou qui règne tant du côté officiel, avec un calendrier tout au plus au stade de l’ébauche, que du côté des acteurs qui espèrent beaucoup mais ne s’attendent vraiment pas à grand chose.

Relance du cinéma local

Grand thème des dernières rencontres cinématographiques de Dakar (RECIDAK), la ‘’relance’’ est le mot d’ordre pour tous les acteurs sénégalais du 7e art en 2015.

En effet, à l’issue de cette dernière édition, le patron de la Direction de la cinématographie (Dci), Hugues Diaz, réaffirmait sa volonté ainsi que celle de ses collaborateurs de réellement faire revivre le cinéma local : ‘’Certains disent que la cinématographie sénégalaise est morte, nous, nous allons leur prouver que ce n’est pas le cas. On veut couper court avec cette idée selon laquelle on ne produit des films que pour les festivals. Nous voulons faire des films pour des marchés’’, confiait-il avant de rappeler aux autorités leur engagement à réhabiliter les salles de cinéma dont ne subsiste, à Dakar, qu’une poignée.

Cette nécessité, pour le Sénégal, est d’autant plus pressante avec la tenue prochaine du FESPACO, au Burkina Faso, après l’écrasante victoire connue par nos cinéastes lors de la précédente édition. Pour l’instant, quatre films sont en lice dans le cadre de ladite compétition… Ces films sont ‘’Des Étoiles’’ (Dyana Gaye), ‘’Dakar Trottoirs’’ (Hubert Laba NDAO), ‘’Mbeubeuss’’ (Nicolas Sawalo Cissé) et ‘’Les vérités du fou’’ (Cheikh Ahmadou Bamba Diop)

L’argent restant bien entendu le nerf de la guerre, il est constant que ce qu’attend le 7e art sénégalais en 2015, c’est surtout d’avoir enfin accès au milliard qui lui a été promis depuis 2014 par les autorités… Aux dernières nouvelles, ce fonds de promotion a été réduit, lors du vote du budget 2015, à ‘’seulement’’ 200 millions de francs du fait d’une ponction validée par l’Assemblée nationale.

Diversité culturelle, du micro au macro

Axe présenté comme majeur dans la politique du ministère, la diversité culturelle est néanmoins un concept encore flou pour la majorité. En effet, sur le terrain, les initiatives de valorisation mises en place souffrent autant d’un défaut de moyens que d’un défaut de visibilité. Ainsi, la tournée de promotion de la diversité culturelle de 2014 ne semble (pour l’instant) pas reconduite pour l’année en cours… L’essentiel des activités se résumant en une série de dates pour des festivals qui sont, pour la plupart, conçus et budgétisés soit par des privés soit par les collectivités locales elles-mêmes. Certaines activités restent toutefois des initiatives inscrites à l’agenda national et,  comme telles, bénéficient (totalement ou en partie) d’une implication du Ministère.

Parmi elles, la Foire internationale du livre et du matériel didactique, le Festival national des arts et de la Culture… D’autres bénéficient d’un appui ou accompagnement plus ponctuel, à l’exemple du Festival international du folklore et des percussions de Louga.  Quoi qu’il en soit, le défi cette année est surtout dans la réhabilitation et la sauvegarde des sites historiques, de même que des objets témoins constituant notre patrimoine. En effet, les conventions de l’Unesco sur le patrimoine immatériel  et sur les expressions culturelles signées il y a maintenant près de 10 ans par le Sénégal peinent encore à être appliquées or, ce sont elles qui doivent, en théorie, servir de socle à une politique ambitieuse de la diversité  et à l’exploitation du potentiel  économique de la culture.

Grandes œuvres sur les musées et centres culturels

Avec le Musée des Civilisations noires qui doit être livré en 2016, l’ouverture du Musée Senghor et l’acquisition récente du Musée Boribana, pour ne citer que ces exemples, on peut dire que 2015 sera l’année de tous les chantiers pour les musées du Sénégal. En plus de ces opérations de valorisation, de construction et de maintenance, il faut rappeler les besoins pressants qu’expriment les sites dont le fonctionnement est effectif… On citera tout particulièrement les Centres de lecture et d'animation culturelle (CLAC), dont le manque en livres, matériel informatique et autres se font d’autant plus ressentir qu’ils sont parfois les seuls lieux culturels accessibles dans leur localités d’implantation.

Parmi les différents projets annoncés en fin 2014, on cite l’établissement d’un centre culturel chinois à Dakar qui, de source officielle, permettra de ‘’raffermir les relations entre le Sénégal et la Chine’’. Ledit centre, qui accueillera des événements artistiques, culturels et sportifs, sera donc un levier culturel pour la région de Dakar et pour tout le Sénégal en plus d’être un ‘’nouveau jalon dans le cadre d’échanges (…), un endroit de dialogue et non un outil qui assurera une quelconque prédominance culturelle’’.

Nouvelle impulsion Société de Gestion

Avec la récente nomination de Bouna Manel Fall à la tête de la nouvelle société de gestion collective des droits d’auteurs et des droits voisins, on s’attend à des avancées dans ce domaine surtout en ce qui concerne les droits d’auteurs et le statut de l’artiste.

D’un point de vue plus élargi, on note que ce que les acteurs attendent avec impatience, en 2015, est la signature des décrets d'application se trouvant à l’heure actuelle du côté du secrétariat général de la Présidence de la République… Cela, 6 ans après la promulgation de la loi du 25 janvier 2008 sur les droits d'auteurs et droits voisins.

Comptant 36 membres répartis en trois collèges, ladite structure ‘’définit la politique générale de la société et en contrôle la mise en œuvre, dans le cadre de la gestion quotidienne, par le gérant’’, selon les mentions indiquées à l’article 13 de ses statuts... Autant dire qu’il y a encore du travail surtout en ce qui concerne les aménagements nécessaires pour permettre à l’artiste d’exercer son métier au même titre que les autres citoyens, tout en créant un environnement lui permettant de vivre de son art et d’avoir une retraite digne.

Sophiane Bengeloun

 

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