Publié le 17 Aug 2012 - 11:47
YARAKH, RETOUR SUR LES LIEUX DU DRAME

Le danger plus que jamais présent

 

 

72 heures après les fortes précipitations qui se sont abattues sur Dakar et causé beaucoup de pertes en vies humaines, le quartier Rail-bi de Yarakh est toujours plongé dans le deuil. Six de ses fils ont péri dans l'affaissement d'un mur mardi dernier sur 14 concessions en baraque. Aujourd'hui, force est de constater que le danger demeure latent.

 

Quartier Rail-bi de Yarakh. En ce jeudi 16 août 2012, le bidonville est toujours plongé dans le deuil. Ses ruelles quasi-désertes peinent à sortir de leur torpeur inhabituelle, en cette veille de fête de Korité. Ici, l'heure n'est pas, pour le moment, aux préparatifs des festivités. Mais plutôt aux funérailles de Alioune Sène, Djib Tine, Khady Yade, Mane Diouf, Fatou Thiam et Penda Diouf, du nom des habitants qui ont tous péri sous la dalle du mur qui, jusque mardi dernier, surplombait leurs concessions en fortune. Submergé par les violentes averses qui sont tombées sur Dakar pendant la nuit du lundi 12 au mardi 13 août, le mur a cédé sous le poids de l'humidité et s'est affaissé de toute sa hauteur et de tout son poids sur 14 concessions, faisant du coup 6 morts et cinq blessés dont deux dans un état grave. Extirpés des décombres, les blessés ont été conduits à l'hôpital général de Grand Yoff et les corps sans vie acheminés hier, à Touba où ils ont été enfouis sous terre. Ils laissent derrière eux toute une communauté attristée et inconsolable.

 

Assis à côté des décombres, le visage triste, le regard lointain, Babacar Yade ne revient toujours pas de cette tragédie à laquelle il a échappé belle, lui, sa femme et ses cinq enfants. Reconstituant les faits, c'est à peine s'il parvient à expliquer les causes du drame. ''Les choses sont allées si vite que personne ne peut dire ce qui s'est réellement passé'', confie amèrement le sexagénaire au cœur meurtri. ''En tout cas, ce que je peux vous dire, c'est que c'est la volonté divine et personne n'y pouvait rien du tout'', tente-t-il de se consoler.

 

Au beau milieu des décombres, un désordre indescriptible règne. Des tas d'habits posés par-ci, des restes de matelas par-là, des débris de bois et de zinc de l'autre coté. Manifestement, le travail de tri entamé par les rescapés massés sur la cour de la maison, risque de prendre du temps. Par ailleurs, au compte-gouttes, le voisinage vient présenter ses condoléances.

 

On laisse entendre que Malick Sall, le propriétaire du local dont le mur s'est affaissé, est passé, lui aussi, présenter ses condoléances, quelques heurs plus tôt. Le bâtiment, une fabrique de savon dénommée ''Noville'' et construit depuis belle lurette, peine à démarrer ses activités.

 

L'État et la mosquée de Point E au chevet des victimes

Juste après les douloureux événements, l'État du Sénégal a délégué son ministre de l'Intérieur Mbaye Ndiaye au chevet des familles des victimes. À cet effet, une enveloppe de 2 millions de nos francs a été dégagée et confiée au commandant de la brigade de gendarmerie de Yarakh pour le rapatriement des corps à Touba où ils sont enterrés. Il a joint à cette enveloppe des vivres pour soutenir les familles des victimes. Il a été épaulé dans cette entreprise par la moquée de Point E qui a également offert aux populations du sucre, du riz et des habits.

 

Problème de santé publique

Mais toujours est-il que cette communauté a plus besoin d'aide, dans le cadre de l'assainissement de son environnement. Car, ce quartier manque de tout. Il fait face à un véritable problème d'insécurité liée à la promiscuité et à la paupérisation. Il n'a aucun système de canalisation pour drainer les eaux usées stagnantes. Ce qui fait que ses ruelles sont gorgées d'eaux usées puantes qui menacent la santé des populations, surtout des enfants qui souffrent presque tous de maladies épidermiques.

 

''Nous n'avons nulle part où aller''

Malgré cet incident, les familles des victimes persistent toujours à vouloir rester dans cette grande concession où le danger est toujours latent. Car, une partie du mur meurtrier qui s'est effondré sur quatorze baraques, resté intact, plane toujours sur une vingtaine de concessions. Même si les locataires des lieux estiment que ce pan du mur est plus dur que celui qui s'est effondré, rien ne garantit qu'il ne va pas lui aussi céder face à de fortes précipitations. Si un tel incident se produisait, le bilan risquerait d'être cette fois-ci beaucoup plus lourd.

 

Face à cette situation, aucune action allant dans le sens d'éloigner les populations de ce danger n'est entreprise, ni par la municipalité de Yarakh, ni par le gouvernement, encore moins par les occupants des lieux. ''Où aller si nous quittons ces lieux'', répondent-ils à la question de savoir s'ils comptaient toujours rester dans cette contrée. ''Nous n'avons nulle part où aller, si nous quittons ces lieux. Nous occupons ce quartier depuis les années 90'', déclare Babacar Yade.

 

 

ASSANE MBAYE

 

Section: