Publié le 8 Jul 2015 - 23:15
AYANT ASSENE TROIS COUPS DE PILON A SON EPOUSE EN 2009

L’ancien professeur de Mathématiques risque la perpétuité  

 

El Hadj Alcime Ndoye est cet homme qui a asséné des coups de pilon à sa femme, en 2009. Hier, il a comparu devant la chambre criminelle du tribunal de Grande instance, pour homicide volontaire. Du fait d’un délestage, le procès a été renvoyé. Il risque la perpétuité.

 

Une affaire à la fois bizarre, mystique et mystérieuse. El Hadj Alcime Ndoye qui risque de passer le restant de sa vie en prison, selon la réquisition du procureur, était un grand mathématicien. Assistant à la faculté des Sciences du département de Mathématiques, il est titulaire d’un diplôme d’études approfondies (Dea) en Mathématiques. Mais, en raison de ses troubles mentaux, il a dû quitter l’université et rejoindre une entreprise privée, avant de se retrouver au chômage. A ces malheurs allait suivre le meurtre de son épouse avec qui il avait vécu 11 ans. A la barre, il a déclaré qu’elle s’était toujours occupée de lui, même dans ses moments de galère.

Le 28 juin 2009, vers 3h du matin, Alioune Ndoye, frère de l’accusé, a appelé au commissariat de police des Parcelles Assainies, informant que son frère Alcime Ndoye venait de tuer son épouse Ndèye Fatou Diallo. Les policiers se sont rendus immédiatement à Scat Urbam. Ils ont trouvé la dame couchée dans un matelas baignant dans une mare de sang. Sous ledit matelas, ils ont sorti un pilon. Plus tard, le certificat de genre de mort a indiqué un polytraumatisme avec polyfracture cranio-faciale et hémorragie interne et externe à la suite de coups et blessures par objet dur.

Interpellé,  El Hadj Alcime Ndoye avait reconnu les faits, en expliquant qu’il s’est disputé avec son épouse, parce qu’elle avait refusé de lui remettre l’argent destiné à la scolarité des enfants. Dans un premier temps, les parents sont intervenus et ils se sont calmés. Mais, tard dans la nuit, aux environs de 2 heures du matin, El Hadj Alcime Ndoye s’est levé de sa couchette pour aller s’emparer d’un pilon à l’aide duquel il a assené des coups à la dame. Ensuite, fermant l’appartement à clé, il s’est rendu chez son jeune frère à Dieupeul pour lui demander d’aller secourir la victime.

Toutefois, il est à souligner que l’accusé souffre de spasmophilie qui se manifeste par des troubles visuels, pertes de mémoire, amaigrissement etc. D’ailleurs, il confie qu’au moment de l’incident, il faisait l’objet d’un suivi médical par un psychiatre du nom de Fatoumata Ba, à l’hôpital Fann. En outre, l’accusé a été pensionnaire, pendant six mois, de l’hôpital ‘’Dalal Khèl’’ de Thiès, et que ses crises refont surface tous les deux ans, pour une durée de six mois.

L’accusé croyait avoir asséné des coups à un âne

Hier, à la barre, El Hadj Alcime Ndoye semblait jouir de toutes ses facultés intellectuelles. Même si, par moments, il montrait sa paume au représentant du Parquet, disant qu’il y figure un ‘’salatou ala Nabi’’ et que sa femme lui rend visite en chair et en os dans sa cabine spéciale en prison. En dehors de cela, il a reconnu tous les faits. Il a dit se souvenir de toutes les scènes d’avant et d’après le drame, à l’exception du meurtre. En revanche, il a soutenu s’être emparé  d’un pilon pour se battre contre des forces maléfiques qui en voulaient à son épouse et à ses enfants. Ensuite, répondant à une question du juge, il a déclaré : ‘’C’est un homicide. On m’en a parlé. Mais dans ce cas, il est involontaire.‘’

L’audition des deux témoins, son frère germain et son neveu, a permis d’en savoir plus. Juste après les faits, l’accusé leur avait dit qu’il venait d’asséner des coups de pilon à un âne. Mais toujours, selon son frère Abdou Aziz Ndoye, à qui il a remis les clés de son appartement, juste après le meurtre, son frère lui a demandé de prendre un taxi et d’aller secourir sa femme, puisque, tantôt il voyait l’âne, tantôt il voyait sa femme. L’autre témoin, en l’occurrence son neveu, a confié au juge qu’il a assisté son oncle à la police et qu’au moment de l’interrogatoire, il était en train de délirer. Son frère a ajouté qu’il avait tenté, à deux reprises, de se suicider. Que dernièrement, l’accusé s’était lui-même rendu à la police, pour leur demander de le garder, afin de l’empêcher de commettre de graves erreurs.

‘’Il a préparé son système de défense depuis très longtemps’’

Mais ces témoignages n’ont pas ébranlé le procureur dans ses convictions. Au juge, il a dit : ‘’Vous êtes en face d’un accusé doué d’intelligence au-dessus de la moyenne. Il a un esprit très cartésien. Il a préparé son système de défense depuis très longtemps. Car, cet accusé qui dit qu’il ne se souvient de rien, se souvient de quelques détails qui datent de plusieurs années’’. Le procureur a ajouté que les témoins ne sont pas crédibles. ‘’Leurs déclarations tendent vers la version de leur frère pour se tirer d’affaire. Ses déclarations sont en porte-à-faux avec les écrits du procès-verbal’’. Ce faisant, il a requis une peine de prison à perpétuité.

Mais, comme on pouvait s’y attendre, la défense s’est appesantie sur les troubles psychiatriques. Les 5 avocats de la défense ont tous évoqué l’amour mutuel qui unissait les deux conjoints, pour dire que leur client n’a pas tué volontairement. L’un d’eux a parlé de coups mortels et non de meurtre, puisque leur client croyait voir l’être maléfique qui le hante depuis des années. La défense de dire qu’Alcime était en période de crise, car la veille de l’incident, il devait se rendre à un rendez-vous avec le Dr Aïda Sylla Ndiaye. Un autre conseil de dire que l’accusé est un Lébou qui s’est démarqué de ses ‘’xamb’’ et de ses ‘’tuur’’ qui l’ont sanctionné. Il a demandé qu’il soit acquitté purement et simplement, puisque devant bénéficier de suivi médical pour être sauvé. Dans le cas échéant, il a demandé à la Chambre criminelle de disqualifier les faits en coups mortels, étant donné qu’il ne savait pas qu’il frappait son épouse.

Il faudra attendre le 9 juillet prochain pour connaître le fin mot de cette affaire, puisque le procès a été renvoyé à cette date, à cause d’une coupure d’électricité, au moment de la plaidoirie de Me Demba Ciré Bathily.  

AMINATA FAYE (Stagiaire)

 

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