Publié le 4 Sep 2019 - 02:33
PROJET ENERGIE OMVG

Un éléphant blanc devenu réalité

 

700 millions de dollars de financement, huit bailleurs, 1 700 km de ligne interconnectée… Voilà les ambitions ‘’monstrueuses’’ du projet énergétique de l’Omvg (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Gambie). En tournée dans les localités abritant les chantiers, il a été constaté que le projet prend de plus en plus forme. Reportage !

 

10 h à Kahone. Ciel partiellement dégagé ; 34 degrés au thermomètre de la météo nationale. Casquette bien vissée sur la tête, les membres de la délégation de l'Omvg (Organisation pour la mise en valeur du fleuve Gambie) franchissent le seuil du poste de stockage du matériel. Un vaste hangar où s’étalent, à perte de vue, divers matériels : câbles, fibres optiques, pylônes, isolateurs… Tout pour transformer un vieil ‘’éléphant blanc’’, en l’occurrence le projet énergie-interconnexion de l’organisation susvisée, en réalité. 

Un projet gigantesque qui, à terme, reliera les réseaux électriques de la Gambie, de la Guinée-Bissau, de la Guinée et du Sénégal. Soit 1 700 km de ligne interconnectée, pour un budget total de 722 millions de dollars, environ 361 milliards de francs Cfa. Pour y arriver, il a fallu de l’audace, de la détermination, mais aussi des partenaires techniques et financiers décidés à mettre leurs billes.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’engouement n’a pas manqué du côté de ces bailleurs de fonds. Au total, ils sont au nombre de 8, dont la Banque africaine de développement, la Banque mondiale, la Banque européenne d’investissement, la Banque islamique de développement, l’Agence française de développement, la Banque ouest-africaine de développement. Même le Koweit et les Allemands ont répondu à l’appel des pays membres.

De quoi ravir le secrétaire général de l’Omvg, le Sénégalais Ababacar Ndao. Il revient sur la complexité du projet : ‘’Il y a 15 postes à ériger, 8 bailleurs qui interviennent, plusieurs lots avec différentes entreprises… Ce projet sera un important levier de développement qui va booster toute l’économie de cette zone.’’

Vingt ans durant, les Etats ainsi que les populations l’ont attendu. ‘’Enfin, on y est presque’’, se réjouit le représentant de l’ingénieur (l’Américain Aecom) sur la route de Tambacounda. Nasser Chekkouri : ‘’C’est vrai que ce projet était en gestation depuis très longtemps. Moi-même j’en entends parler depuis des années. Mais là, c’est presque fait. Au plus tard, il sera livré au mois de mars 2020 (pour ce qui est de la phase concernant le Sénégal).’’ Pour le reste, rendez-vous est fixé en fin 2020.

A quelques kilomètres de Tambacounda, du côté droit de la route nationale, sont debout les pylônes s’étendant sur 35 mètres de long, pour une surface de 60 mètres carrés environ par pylône. A ce jour, l’entreprise indienne Kec qui s’active sur cet axe Kaolack – Birkilane - Tamba a déjà réalisé 248 fondations, 164 pylônes achevés sur un total de 447 à intervalle de 400 m.

Des retards dans la mise en œuvre

Ainsi, ‘’Sambangalou’’ n'est plus un simple rêve. Il prend bien forme. Mais malgré les avancées notoires, force est de constater que pour un programme lancé depuis 2017, et qui doit se terminer en 2020, quelques retards ont été enregistrés dans la mise en œuvre. Encore une fois, les lenteurs administratives ont été déplorées.

Mais, aujourd’hui, tout semble derrière. On oublie lenteurs, lourdeurs et on met les bouchées doubles pour ne pas rater le rendez-vous de mars 2020. L’ingénieur-conseil rassure : ‘’Nous allons doubler le personnel, le matériel, nous allons tout mettre en œuvre, parce qu’un retard aurait des conséquences. Nous ne pouvons pas nous le permettre.’’

Revenant sur le retard, M. Ndao se veut rassurant. ‘’On ne peut ni affirmer qu’il y a retard ni l’infirmer. Sur un projet d’une telle dimension, cela ne peut manquer. Il faut savoir que c’est un projet partagé entre 4 pays qui n’ont pas la même tradition administrative, huit bailleurs de fonds différents, plusieurs impactés. Cela nous a pris un peu de temps. Mais c’est maintenant derrière nous’’, se réjouit le spécialiste qui capitalise plusieurs années d’expériences à l’Omvs comme à l’Omvg.

A termes, le projet Energie-interconnexion réussira là où les Etats ont jusque-là échoué sur le plan institutionnel. En effet, depuis Mathusalem, des experts ont défendu la pertinence de fusionner les deux organisations assurant la mise en valeur des fleuves Sénégal et Gambie. Mais en vain ! Pour le moment, cela ne semble même pas être la préoccupation des politiques, malgré les nombreux avantages en termes d’économie et de ressource. Mais, aujourd’hui, grâce aux réseaux interconnectés des deux organisations, la collaboration devient inéluctable. Ababacar Ndao explique : ‘’C’est un réseau qui va nous interconnecter avec le réseau de l’Omvs déjà existant. A partir du poste de Bakel, nous allons être en liaison avec le réseau Omvs qui relie le Sénégal, le Mali et la Mauritanie.’’

Mieux, grâce au projet Energie, les pays membres de l’Omvg pourront également être interconnectés avec le réseau de Clsg (Côte d’Ivoire, Liberia, Sierra Leone, Guinée). En effet, de l’avis toujours du secrétaire général, le présent réseau interconnecté va permettre de réunir beaucoup de pays de l’Afrique de l’Ouest. Ainsi, ‘’du Sénégal, on pourra profiter de l’énergie produite en Côte d’Ivoire et vice-versa’’.

Saluant l’état d’avancement des travaux et l’engagement des différentes parties prenantes, le représentant du gouverneur de Kaolack, Babacar Moundor Ngom, salue l’initiative : ‘’C’est un projet extrêmement important qui va permettre de régler, en partie, les problèmes d’énergie au Sénégal. Au niveau local (région de Kaolack), les préoccupations sont gérées de façon collégiale par un comité local de suivi présidé par le gouverneur lui-même.’’ Relativement aux retombées, plusieurs ouvriers sont originaires de la région, selon le gouverneur.

En plus, se réjouit M. Ngom, ‘’tous les villages traversés seront électrifiés. Comme vous le savez, l’électrification rurale est une des priorités du gouvernement. Cela va nous permettre d’atteindre nos objectifs en la matière’’. Quant au lancinant problème des indemnisations, le gros du travail a déjà été fait, si on l’en croit. En tout, 311 personnes affectées par le projet sont déjà entrées dans leurs fonds. Vingt autres cas qui se sont signalés tardivement sont en train d’être étudiés.  

Idem pour Kaffrine qui a été la deuxième étape de la visite de l’Omvg et où les autorités déconcentrées ont également salué l’état d’exécution des travaux. Pour l’ingénieur-conseil, ils en sont à plus de 25 % de réalisation, dans cette phase où il ne reste que la construction.

MOR AMAR

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