Publié le 14 Mar 2015 - 06:50
PROCÈS ALBOURY NDAO VS KARIM WADE

Le match de la paperasse

 

C’est hier, 12 mars, qu’a enfin été retenue l’affaire opposant l’expert Alboury Ndao au prisonnier (autoproclamé) politique, Karim Meïssa Wade. Une audience qui s’est jouée à coups de rapports et de contre-preuves, le tout dans un ouragan de documents tombant, en trombes, sur la table des juges.

 

Après sept renvois, le tribunal correctionnel a enfin pu connaître, si ce n’est l’épilogue, tout du moins le début de l’affaire pour faux, usage de faux et tentative d’escroquerie au jugement opposant Karim Meïssa Wade à Alboury Ndao. C’est donc la salle numéro 3 du Palais de Justice de Dakar qu’a eu lieu hier, le théâtre des débats dont les protagonistes étaient d’une part, le prévenu et ses avocats (avec Me Elhadj Diouf en tête de file) et de l’autre, l’ancienne « défense coalisée » (réduite aujourd’hui à un noyau dur de membres « All Stars ») qui représentait une partie civile aux abonnés absents. Rebeuss oblige.

Pas de ticket VIP ce coup-ci

Malgré ce semblant de déjà-vu quant aux deux équipes, ce match de droit pénal n’a en rien ressemblé à ceux auxquels on a quotidiennement pu assister, de juillet 2014 à février 2015. Et comment ! Les avocats, fussent-ils anciens ministres ou même « dignes représentants du peuple sénégalais » (dixit El Hadj Diouf), à aucun moment, il ne leur a été permis de se lancer dans les frasques et autres envolées envenimées qu’à maintes reprises, la CREI  a tolérées. Le Président, sans jamais élever la voix bien qu’ayant une fois ou deux eu à taper sur la table, a su recadrer les débats à chaque fois que les choses menaçaient de tourner dans le mauvais sens. Une belle leçon d’humilité donnée là, en somme, à l’ensemble des citoyens de ce pays.

Sapiteurs, contre-preuves et 2e demande de renvoi

Pour en revenir au fond du dossier, on peut affirmer que l’audience d’hier a été forte en éléments nouveaux… À tel point que c’est cet excès de nouveautés qui va couper court aux plaidoiries quand, se prévalant du besoin d’un nouveau délai pour étudier le dossier transmis à lui par la partie civile, le substitut du procureur a demandé (et obtenu) un nouveau renvoi au 26 mars ! Ainsi, ce n’est pas moins de cinq nouvelles pièces que la partie civile a produit et communiqué au cours des débats, de manière à, selon elle, apporter la preuve de la fausseté des allégations d’Alboury Ndao dans son rapport et dans ses actes posés 

SUBSEQUEMMENT

De l’autre côté de la barrière néanmoins, on campe sur ses positions en réitérant les mêmes propos tenus à la barre. Suite aux questions des juges (notamment), le prévenu a réitéré qu’il tient les « preuves » de ce que lui ont affirmé des sapiteurs qu’il a employés, lorsque la CREI lui a donné mandat de faire des investigations à Dubaï et apparemment à Singapour (mais c’est un tel imbroglio, dans la bouche du prévenu, qu’on n’est pas sûr d’avoir tout compris)…

Bref, pour en revenir à nos moutons, Alboury « Le Roy » Ndao a maintenu ce qu’il a dit. A plusieurs reprises, il a demandé aux avocats de la partie civile de se référer à son rapport, au lieu de « répondre » à leurs questions… Si preuve n’est pas faite là, du « sang royal » que Me El Hadj Diouf lui prêterait, on se demande bien comment il pourrait autrement demander à la plèbe de manger du gâteau quand il n’y a point de pain !

Mais « Buur Rebeuss » (là encore un titre « autoproclamé ») aurait lui aussi des tentacules dans les plus hautes sphères de la « haute » de ce pays, puisque c’est derechef que sa meute d’avocats s’en est prise au reg Alboury, allant même (en voulant battre en brèche ses propos) jusqu’à l’accuser d’être « protégé par une haute autorité du pays », qu’il aurait « rencontré à Paris » et dont il aurait accepté, moyennant paiement sans doute, de « devenir le bras armé » pour « détruire » Karim Wade !

‘’Pitreries’’

Mais, il fallait compter avec Me El hadj Diouf qui a particulièrement irrité les avocats de Karim Wade. Car, à chaque fois que ces derniers posaient une question à Pape Alboury Ndao, il venait à la barre lui chuchoter à l'oreille, ou carrément lui demandait de ne pas répondre, puisque Karim Wade s'était comporté de la sorte avec la Crei.  A ce jeu, il a tellement énervé Me Ciré Clédor Ly, qu’à un moment donné, l’avocat a lancé : ''M. le président, je vais le battre''. ‘’Qui s’y frotte s’y pique’’, a répondu le parlementaire, avec aplomb. Heureusement qu'ils ne sont pas passés à l'acte. Me Seydou Diagne a également dû hausser le ton pour demander au tonitruant avocat de cesser ses ''pitreries''.

Il n'y a pas que Me Diouf qui a crié sur les gens. Le président a aussi passé ses nerfs sur l'un de ses assesseurs. Le jeune magistrat a commis la maladresse de demander aux gendarmes d'interpeller des personnes qui applaudissaient. ''C'est quoi ça? C'est moi qui assure la police de l'audience. J'ai fait 20 ans de magistrature'', a lancé le vieux juge à son jeune collègue qui s'est senti visiblement humilié.

L’épilogue est pour le 26 mars. 

Sophiane Bengeloun

 

 

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